Forum de RPG basé sur l'univers de l'Âge du Feu par E.E. Knight
 
Bienvenue sur la Saison 2 de l'Âge de Feu !

Partagez
 

 ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : Précédent  1, 2
AuteurMessage
Invité
Invité
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitimeVen 14 Fév 2020 - 1:44




Minuit était proche, pourtant bien loin de se vider les rues étaient plus peuplées et plus vivantes que jamais. Les enfants couraient entre les passants en brandissant des moulins à vent en papier multicolores pour aller se servir aux quatre coin de la ville dans les banquets populaires, les femmes richement vêtues se hâtaient pour rejoindre les galas au sommet de la ville et bien entendu... il y avait les autres.

«- Partiiiiiiii au loiiiiiiin sur les flots déchaînééééééés,
Je voyagerai longteeeeeemps,
Puis je te reviendraiiiiiiiiiii !»


Au milieu de la rue, un petit groupe d’individus bras dessus bras dessous tentaient péniblement de progresser vers la Place du Dragon Farceur. Sans doute y seraient-ils parvenus plus aisément si ils ne s’étaient pas obstiné à avancer alignés en se balançant au rythme de la chanson comme un bateau malmené par les flots. Cette troupe, vous l’aurez compris, était composée des membres les plus éminents de la grande Confrérie des Ombres qui s’étaient bien malheureusement retrouvés, par la force des choses, dans un état que l’on ne pouvait plus qualifier d’éméché, mais chuuuuuut: c’est un secret, et la moindre tentative de votre part pour faire connaitre ce fait vous vaudrait sans doute d’avoir les oreilles et la langue coupées.

Au gré d’un n-ième balancement, le pied de l’un d’entre eux buta malencontreusement contre un pavé mal positionné (décidément ces elfes ont ne peut pas leur faire confiance !), à moins que ce ne soit le poids mort de l’enfant garne, pendu toujours inconscient entre deux épaules sans même toucher le sol, qui finit par les déséquilibrer. Quoi il en soit les voleurs s’étalèrent tous sans exception sur la rue pavé, faisant à leur tour trébucher quelques passants qui, eux, surent retrouver leur équilibre.
Ils éclatèrent de nouveau d’un rire incontrôlable dans une suite de fou rire qu’ils ne comptaient plus. Ok les elfes étaient peut être des bons à rien en ce qui concerne l’entretien des rues pavées, mais il fallait bien reconnaitre qu’ils savaient faire du bon alcool.

«- Aller debout bande de fainéants ! On est presque arrivés ! Leur ordonna Ydil entre deux rires une fois qu’elle fut de nouveau sur pieds.

- Oui chef, oui chef !» Répondirent-ils en choeur.

Et de nouveau ils éclatèrent de rire, mais cette fois ils firent en même temps l’effort de se relever. De nouveau ils dissimulèrent le petit garne à l’abri des bottes des passants (c’est à dire contre un mur, allongé dans le caniveau), avant de s’en aller vers la place bondée.

La Place du Dragon Farceur était immense, pleine de gens, de vivres, de tonneaux, de musique, de couleurs et de lumière. Un véritable trésor vivant au rythme des pas et des danseurs. Les feux et les parures se reflétaient dans les yeux de la jeune voleuse qui en resta hypnotisée quelques secondes, à moins que ce ne soit du aux effets de l’alcool. Près d’elle, ces compagnons s’extasiaient.

«- Ouhaaaa ! T’as vu un peu la taille du cochon sur le feu ? On dirait un boeuf ! S’exclama l’un d’eux.

- Et les pâtisseries ! C’est qu’ils ont l’air de les offrir en plus !

- Je veux une poire au caramel !

- Eh, visez moi un peu ces poulettes derrières !»
leur fit remarquer l’indomptable Corneille d’un signe de tête assorti d’un franc coup de coude dans les côtes du voleur qui avait eu la malchance de se tenir près d’elle.

Presque aussitôt le groupe se dispersa. Et Ydilianda se dirigea d’un pas légèrement chancelant vers le plat de viande le plus proche. Si ses activités illégales la préservaient de la misère absolue, comme elle avait pu la connaître à de rares moment dans sa vie, la viande, exceptée celle des poissons marins, restait souvent quoi qu’il en coûte hors de ses habitudes alimentaires car chère, difficile à conserver et à préparer discrètement. C’est donc les entrailles brulantes d’envie qu’elle s’approcha d’une carcasse de volatile tout juste rôtie et empoigna à pleine main une partie qui semblait dépourvue d’os (après tout pourquoi s’embêter ?) avant de faire volte face pour aller déguster son butin dans un coin de la place.
Elle mordit de toutes ses dents dans chair tendre et délicieusement grillée et la sensation de brûlure sur sa langue et son palais ne suffit pas à l’arrêter une fois la première bouchée entamée. Elle avait l’impression de n’avoir jamais mangé quelque chose d’aussi bon de toute sa vie. Ce délicieux morceaux de viande cuit avec elle ne savait quelle sauce ou herbes était pour elle plus savoureux que tous les petits plats soit disant raffinés (insipides aurait-elle dit) qu’elle avait eu l’occasion de goûter durant ses infiltrations.

La viande fut vite engloutie et elle s’en lécha les doigts. Encore ! Lui gronda son ventre. La jeune femme se tourna de nouveau vers sa volaille mais c’était trop tard: une foule de convives s’était déjà amassée autour de la table pour découper l’animal à la force de leurs ongles comme une nuée de mouettes sur un poisson échoué.

Tant pis pour la volaille. La voleuse n’eut aucune difficulté à trouver d’autres carcasses fumantes. Elle dévora tout: le gros gibier comme le petit, du bétail de toutes sortes et des oiseaux de toutes tailles. Elle se laissa même aller à des viandes plus exotiques avec un cuisinier affirmant servir de la viande de crocodile, et bien qu’elle n’avait aucune idée de ce que pouvait être cet animal (on aurait pu lui servir du dragon qu’elle n’aurait même pas tiqué) elle se laissa aller à la tentation et repartit avec une tranche qu’elle rongea curieusement.

L’estomac plein à craquer d’alcool et de viande, elle s’assit lourdement sur une caisse de bois. Mon Dieu qu’elle se sentait bien ! Elle était au chaud face à tous ces feux et son ventre n’avait jamais été aussi rassasié. Elle ressentait sur ses épaules la fatigue de jours de labeur et aurait pu s’endormir en seulement quelques minutes si une voix près d’elle ne lui avait pas dit:

«- Envie de continuer la fête ?»

Elle ouvrit les yeux et se tourna vers un homme à la face rougie par l’ivresse et à la bedaine impressionnante. Le visage joyeux, il lui tendit une choppe pleine.

«- Buvez ça, ça va vous remettre d’aplomb. Il est encore bien trop tôt pour se reposer !»

Puis, joyeux comme un chiot, il repartit dans la foule distribuer d’autres choppes.
Méfiante elle renifla le contenu. Ce ne serait pas la première fois qu’un homme proposerait bien gentiment un dernier verre à une femme visiblement sur sa fin de soirée. Elle ne put reconnaitre l’alcool mais, voyant d’autres convives avaler cette mixture sans trop d’hésitation, elle haussa les épaules et porta le liquide à ses lèvres. Après tout ce ne serait pas la première fois.

On aurait dit un vin particulièrement épicé, il lui brûla la gorge et la fit grimacer. Cependant l’effet était là: à chaque gorgée elle avait l’impression de recevoir un coup de fouet et qu’un vide d’abord apaisant puis dévorant se creusait dans son estomac. C’était donc ce que voulait dire le gros homme ? En effet, plus rien ne l'empêchait de continuer la fête. La voleuse se résolut donc à finir sa choppe. Bordel, elle se sentait en pleine forme ! La jeune femme se remit d’un bond sur ses pieds et vacilla dangereusement. Bon d’accord, peut être qu’elle n’était pas objectivement au mieux de sa forme, mais elle se sentait revigorée par la boisson, prête à courir pendant des heures mais surtout, elle avait de nouveau faim. Se détournant de la viande, elle se dirigea vers les déserts. Colombe avait bien mentionné des poires au caramel, non ?

Elle ne mit pas longtemps à les repérer, un peu plus à les rejoindre, s’en saisit et tourna sur elle même pour retrouver ses compagnons.
Le poussin dormait toujours dans son caniveau, Ydil envisagea pendant une seconde de le réveiller à coup de pied pour lui faire boire une de ces mixtures épicées mais se ravisa. L’apprenti voleur avait peut être suffisamment subi pour aujourd’hui.

Elle retrouva la fougueuse Corneille en plein tête à tête avec un jeune homme, enfin, il était évident que c’était elle qui menait la danse dans l’histoire tant le jeunot semblait presque... effrayé ? Fasciné ? Il fallait dire que la jeune femme avec son air rebelle et ses tatouages était impressionnante. La Pie ne lui donnait pas une demie-heure avant qu’il ne finisse dans son lit, enfin, si lit il y avait. Car à la vue des regards outrés que lui lançaient les fameuses «poulettes» de début de soirée la jeune femme avait déjà essuyé quelques refus.
Elle repéra aussi leur chère Colombe, dansant au bras d’un inconnu, ainsi que le fière Pivert occupé à finir une énième choppe tandis que l’impressionnant Busard se démenait pour remporter un bras de fer avec un marin à l’air farouche.
Alors qu’elle croquait avec envie dans sa poire sucrée, une vague de nostalgie l’envahit. Karm aurait adoré cette fête, jamais à Portangue ils n’auraient pu espérer un Gra’R’No aussi riche. De sa main libre elle effleura le bijou de cuivre qui ornait son poignet. Elle ignorait tout de ce qui lui était arrivé, elle ne savait même pas si il était encore en vie avant ou après la Catastrophe. Quel âge avaient-ils lorsqu’ils s’étaient vus pour la dernière fois ? quatorze ans ? Quinze ans ? Seize ans ? Dix-sept ans ? C’était déjà si loin. Aujourd’hui elle avait l’impression d’avoir enfin des gens autour d’elle qu’elle pouvait presque appeler «famille», et elle espérait qu’un jour cela suffirait pour combler le vide qu’il avait laissé. «Tu me manques.» souffla-t-elle aux ombres.

«- Je suis flatté ! Dis-moi, je te croyais bien partie pour manger un dragon il y a quelques minutes.» Lui répondit une voix taquine.

Elle faillit s’étouffer avec sa poire et se retourna. Pivert avait fini sa série de verre et se tenait debout (enfin plus ou moins) à côté d’elle.

«- Et toi ? Tu as fini de vider les tonneaux ? Répondit-elle.

- Certainement pas !»

Ils rirent. Un rire stupide et nerveux comme en avaient ceux qui tiraient trop sur la boisson dans une seule soirée. Un rire de Gra’R’No en somme. Leurs regards dérivèrent vers leurs complices féminines qui vaquaient toujours à leurs occupations, l’une cherchant le contrôle absolu et l’autre la tendresse. Deux voies bien différentes pour fuir les maisons closes.

«- Bon, c’est pas tout mais il serait peut être temps de rentabiliser la soirée tu me penses pas ?» Avança le voleur aux cheveux bruns.

La voleuse pouffa, alors ça ça n’allait pas plaire à leurs compagnes !

«- Tu as raison. Mieux vaut en profiter tant qu’on peut encore marcher droit ! Puis je suis sûre que tu ne pourras pas faire aussi bien que moi, ajouta-t-elle avec un sourire de défi.

- Tu rêves !

- C’est ce qu’on va voir ! »


Puis, animés d’une détermination nouvelle, les deux voleurs quittèrent les banquets pour aller retrouver leurs confrères.




Ceux de la Confrérie sont comme des ombres la nuit,
Ils sont partout dans la ville, ils vous observent dormir,
Pourtant ils sont invisibles, du moins jusqu’à minuit
Quand l’éclat de la lune va leurs silhouettes trahir.




*************




Vous entrez à présent dans une nouvelle phase du Gra’R’No ! La phase de la Confrérie des Ombres ! En effet, aucune occasion n’est plus belle que celle-ci pour dérober en masse les biens des pauvres passants heureux et ivres qui pullulent dans les bals et les rues ! Qu’à cela ne tienne ! Les voleurs, biens qu’ivres eux aussi, sont encore suffisamment compétents (du moins c’est ce qu’ils pensent) pour jouer les troubles fêtes ! Et malheureusement pour vous chacun de vous sera la cibles d’un de ces criminels. Mais réussiront-ils leur coup ? Et la récompense sera-t-elle à la hauteur de l’effort ? Et comment réagiront leurs pauvres victimes ? Seules les ombres le savent.

Spoiler:



Résultat du jet d’Erilys = (objet 7 et voleur 43): Celle qui s’en prend à notre chère Erilys est un être à l’apparence tout aussi douce. Ses longs cheveux ondulés et ses yeux ont la couleur du caramel. Qui pourrait se méfier d’elle ? Malheureusement une vie de misère eut raison de ses réticences et la voilà parmi les criminels ! Vous vous demandez quel est son nom ? Je l’ignore, mais ici on l’appelle la Colombe. #ffccff

Résultat du jet de Nirfäel = (objet 41 et voleur 30): Prend garde pauvre barde ! Car tu as tapé dans l’oeil de la redoutable Corneille ! Chasseuse d’homme (et de femme) et surtout voleuse expérimentée elle ne reculera devant rien pour atteindre ses objectifs... quels qu’ils soient. Les cheveux courts et noirs et le corps paré de nombreux tatouage, une vrai rebelle au temps des dragons ! #996699

Résultat du jet de Syobhan = (objet 59 et voleur 3): Le voleur qui la prend pour cible est surnommé Pivert, c’est un jeune homme aux cheveux bruns et aux yeux verts. Malheureusement bien qu’il ait l’oeil pour repérer les cibles les plus faciles et les biens les plus précieux il semblerait qu’il ait surestimé ses capacités pour cette nuit. #ff9900

Résultat du jet pour Danalhéa = (objet 59 et voleur 41): Qui ne connait pas Busard au sein de la Confrérie ? Avec sa grande silhouette musclée et imposante contrastant avec son air avenant c’est un peu notre Edwinktus à nous. Mais ne vous fiez pas à lui, avec Pivert il appartenait déjà à cette guilde bien avant la Grande Catastrophe et connait toutes les ficelles du métier ainsi que la loi de la rue. #cc9966

Résultat du jet pour Ydilianda = (objet 37 et voleur 57): Vous connaissez déjà la Pie Voleuse, elle aussi se doit de participer à cette razzia collective. Heureusement pour elle l’étrange boisson épicée lui permet de rester maîtresse de son esprit et de son corps. Mais pour combien de temps ? #33ffff

Revenir en haut Aller en bas
Erilys
Erilys
Ambassadrice de l'Amour
Messages : 1047
Date d'inscription : 07/01/2018
Age : 23
Localisation : Abyre
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitimeMer 26 Fév 2020 - 14:10



« Oyo eh oh ! Dame Erilys ! Que mes yeux se percent, que ma voix se bri…
Erilyfe ! Erilyfe ! Erilyfe ! Regarde ! Mj’ai une baronne de pleurs. Une gouronne de fleurs. Hé.
Ah ! Quelle mouche la pique !
– Hé là ! Oh ! Triple buse !
– Bon sang ! Faites attention !
– Rien de cassé ?
– Maître barde ! Vous allez bien ?!
Pas de quoi paniquer ! Bien sûr, je vais bien, c’était délibéré je l’ai fait exprès.
La demi-elfe rabattit sa robe et s’accroupit au chevet de la Capitaine qui gisait inconsciente.
Sybbie ? Sybbie, c’est bien vous ? (Elle souleva doucement sa tête d’une main et, de l’autre, lui infligea de petites tapes sur la joue.) Vous ne m’entendez pas ?
L'elfe entrouvrit les paupières, puis elle les referma dans un gémissement d'abandon. Ted pencha alors son museau par dessus leurs épaules et huma la scène de sa royale truffe.
Oh… Voilà qui est cocasse, gloussa-t-il.
Qu'est-ce qui est cocasse ?
L’ours blanc souffla du nez et s’ébroua.
Que je trouve au creux de tes saints bras la Capitaine de la garde d’Abyre plus ronde qu’une queue de pelle, ou encore que je t’ai entendu l'appeler "Sybbie", ce qui d’après le dictionnaire semble être le diminutif hypocoristique de Syobhan des Eskiagès. J’ignorais que vous étiez si proches.
Qu’avez-vous dit ? Comment s’appelle-t-elle ?
Eskiagès. Syobhan de la maison Eskiagès. Dis donc, Crevette, ne me dis pas que…
Suis-je bête.
Erilys tourna la tête vers la Capitaine et la dévisagea avec un autre regard, celui que l'on adresse aux gens que l'on était pas sûr de reconnaître.
Il faudrait peut-être prévenir la garde…
Ça va faire jaser pendant un bon moment… Tout le monde ne lui veut pas que du bien – il faut reconnaître qu’elle est quand même un peu toquée – alors si tu veux vraiment lui rendre service, je pense plutôt qu’il faudrait l’amener dans un endroit tranquille et la mettre au lit avec son doudou et un verre d’eau.
La demi-elfe demeura silencieuse un instant, pensive.
Je vois. Eh bien nous n’aurons qu’à faire le détour par chez moi. Ted, tu veux bien la prendre sur ton dos ?
Mais elle pourrait me saloper le pelage, s’il lui venait l’idée de vomir… »

*

Lorsqu’elles eurent hissé Syobhan sur le dos d’Edwinktus, Erilys et Danalhéa retournèrent auprès de Nirfäel. La demi-elfe, qui malgré son trouble tenait à faire bonne figure, épousseta sa robe et ajusta son corset.
« Quelle tête en l’air ! Olala ! Est-ce ton amie ? Je me confonds en excuse, je ne voulais pas évidemment qu’elle chute. Je voulais la rattraper, enfin, l’attraper, enfin, l’aider, quoique quelle chute la moucher ! (Puis le demi-elfe rit de façon sotte et la serra dans ses bras) Erilys, tu es en beauté ce soir. En fait, je me demande si ce n’est pas la nuit qui te jalouse et qui vient tantôt essayer de se faire belle pour toi.
Vous devriez écrire un Guide du Séducteur, Nirfäel ! Vous me dites toujours de jolies choses !
Soudain minuit sonna et leva une acclamation qui rententit dans tout Abyre. Une grande détonation fit trembler le sol sous leurs pieds. Erilys se tourna vers la provenance du bruit et distingua le palais des fêtes nimbé d'étincelles dorées. le bal masqué qui devait avoir lieu à la Chambre du divin Ningal allait maintenant commencer.
Nous devrions fêter nos retrouvailles ! Ah, j’espère que vous avez vos invitations pour le bal !' Quoique, je crois avoir le souvenir que très peu des trente troupes armées gardant les issues sont encore en état de garder ne serait-ce qu’un verre ! Qu’importe, il ne risque rien d’arriver. Alors mes amis, que chantons-nous ? Quand dansons-nous ? Allez, avec moi !
Il empoigna un luth et prit les devants de leur petite troupe. La joie dans sa musique irradia les passants, les enfants et même les chiens, les chats et les perroquets se mirent à le suivre.

Quand Erilys sentit un contact sur son épaule, elle fut surprise de voir que cette main appartenait à une Danalhéa dont les joues étaient toutes fardées par l'ivresse. Elle sourit en découvrant les dents.
Dana ! Eh bien ! Cette nuit promet d'être mémorable ! D'après le programme, il y aura les membres les plus éminents du Grand Orchestre d'Abyre ! Je ne me souviens plus de tous les titres, mais j'ai vu quelque chose de curieux en finale. Cela s'appelait : "Valse pour un orchestre et un cerisier en fleur"... »

*

Adossée au porche d'une maison qui n'était pas la sienne, Colombe observait avec des braises dans les yeux la silhouette d’une femme qu’elle n’avait toujours vu que de loin et qu’elle avait appris à détester au fil des conversations. Une créature à la peau blanche comme un lys et parée de la tenue la plus incendiaire de toute la cité.
Elle aurait pu être à sa place, pensa-t-elle en léchant nonchalamment le caramel de sa poire au four. Elle aurait dû être à sa place, si la vie lui avait laissé le choix.
Colombe, à qui rien n’avait jamais appartenu, avait toujours cru posséder au moins la beauté et les privilèges qu’elle confère. À Abyre, elle était la reine de la nuit. Et elle ne tolérait pas de rivale sur son territoire.
La soeur des Ombres l'aurait bien défigurée de ses propres mains, mais elle éprouvait comme... de l'admiration à son égard. Elle se voyait en elle. Cette femme, ce devait être son double angélique. Le miroir de sa vie maculée par le vice. "L'honnête petite poule de luxe… "
Colombe passa une dernière fois sa langue le long du bâtonnet de sa friandise. Puis elle le laissa tomber au sol, avant de s'engager dans la masse.
Les fourmis grimpèrent aussitôt sur le trognon et commencèrent à le dépecer.

*

Erilys enfila ses gants jusqu'aux coudes et chaussa son masque de filigrane et satin noir. Il lui tardait d'être au bal ! Le premier bal mondain avec orchestre auquel elle allait participer depuis 2152 ! Elle avançait avec hâte, sans inquiétude aucune. Cette fois-ci, elle ne se souciait plus de son apparence. Elle est trop heureuse pour cela. C'était peut-être la cohésion des astres, un coup du destin s'il existait, un dieu bien généreux… Mais il y avait certainement eu quelque part un miracle, car toutes les plus belles rencontres qu'elle avait faite en cette nouvelle ère, en cette nouvelle vie, se trouvaient là ce soir, à ses côtés, pour participer avec elle à la plus belle fête de l'année. Elle n'aurait pas pu imaginer meilleur cadeau pour le Gra'R'No. Émue, Erilys sentit ses yeux la brûler.
Quelque chose la frôla et l'ôta de sa rêverie.
« Bien vu, les gants, le masque noir… déclara une voix chantante à son oreille. Ça vous donne des airs d'indomptable petite panthère. Grr…!
Erilys eut juste le temps de voir son interlocutrice griffer l'air de ses doigts. L'instant d'après, elle avait disparu.
Confuse, la demi-elfe promena son regard tout autour d'elle.
Je suis là, fit la voix.
L'humaine lui fit un clin d'oeil et sourit gentiment.
Le visage d'Erilys s'illumina.
C'est gentil, merci ! Et permettez-moi de vous dire que vous êtes vraiment ravissante !
C'est vous qui êtes une véritable femme de goût. Vous êtes si inspirante ! »
La demi-elfe lui rendit un sourire tendre et plein de gratitude.

Colombe ralentit la marche sans quitter sa proie des yeux, les lèvres et le visage figés dans cette expression douceureuse. C'est son masque à elle. Puis elle se mit à siffler en jonglant avec la bourse dodue qu'elle venait de pêcher dans le sac de cette poule de luxe aux airs d'indomptable petite panthère.
Revenir en haut Aller en bas
Nirfäel
Nirfäel
Barde Seigneurial
Messages : 874
Date d'inscription : 20/08/2012
Age : 28
Localisation : En train de composer, que diable !
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitimeVen 28 Fév 2020 - 0:27



Le barde ne pouvait rêver plus somptueuse soirée. Tout juste, si un cortège était venu surgir devant son nez avec cymbales et clairons, aurait-il eu quelques étoiles de plus dans les yeux. Mais très peu, vraiment très peu. Non, par la Musique, il pouvait difficilement rêver mieux. Il était dans une cité constellée de magnificence, belle à en pleurer des paillettes papillotées de papillons pas piqués des hannetons, d’où résonnait milles chansons qui élargissait l’imaginaire et le devenir, tantôt vers l’allégresse, tantôt vers la mélancolie, tantôt vers l’abîme, tantôt vers la folie, tantôt vers la démence. Et même, oui même tantôt vers la sauvagerie lyrique : Une envie folle de tâter de la sérénade à en dissoudre ses cordes vocales, à en fracasser ses poumons, de l’ordre de la chanson qui bat aux oreilles comme le sang bat aux tempes, rythmique, riche du parfum de la vigueur et de la vie, du renouvellement de ses espérances et d’accomplir à nouveau quelque chose dans son existence. Foi de barde, ce que c’était bon de sentir tout cela agresser ses os et son être !

Et puis il était avec la plus merveilleuse des compagnies, sa coterie de héros, sa clique d’amis, qui faisait besace de ses souvenirs et orchestre de ses sentiments. Ils suivaient derrière lui alors que Nirfäel s’agitait naïvement avec son luth, en bringuebalant adroitement ses doigts sur le manche : Il y avait d’abord Danalhéa, la Walkyrie de la montagne, ouvrant la marche, fière et guerrière, portant sa robe qui flattait ses formes et rassasiait son caractère de petites irritations passagères à se mouvoir dans ce vêtement si atypique pour elle, parfumant l’air de rose et jasmin, oh oui ça lui allait bien, et marchant avec la grâce de la noblesse, la vraie, de celle qui se vit dans l’acte et pas dans le geste et la parole mal amenée.

Derrière elle, il fallait le regarder tranquillement, en prenant son temps, en s’imprégnant de son image de puissance… Derrière elle, il y avait quelqu’un dont les elfes des mers avaient tant entendu parler qu’ils leur arrivaient de ne plus y croire, tant sa légende paraissait plus vraie que réalité jusqu’à douter de son existence. Celui-là qui n’était pas humain, forgé avec d’autres fibres que la chair, peut-être de l’acier qui sait, car il restait assurément debout là où les chênes tombent, ne souriait jamais et pourtant était toujours d’humeur badine. Derrière elle donc, allait Ted Edwinktus, le Diable fait neige qui n’avait pas d’obstacle car il se contentait toujours de les briser.

A ses côtés, se mouvant telle la nymphe universelle, la Grâce gracieuse, Ô Saint-Graal gracile, marchait l’elfe de la lignée des plus beaux astres qui soit, qui même scintillait lorsque plus de lumière ne brillait. Elle faisait partie de l’élite de la beauté, lui avait évité la mort des dizaines de fois. Elle était l’élégance, la fierté, l’intuition et le tempérament qui sidérait et ravissait, ainsi aurait-il présenté Erilys, « Elelna Hëlle », L’étoile qui danse dans le ciel.

Et enfin, allait la capitaine de la garde d’Abyre, l’elfe guerrière qui battait la cendre avec l’enclume de la vengeance : Syobhan la Tranche-Ténèbres, agile et terrible. Ladite capitaine semblait en revanche dans une posture bien peu avantageuse et cela coupa le barde dans son élan lyrique. Mais ils étaient tous là, en face de lui. Et c’était le plus important.

Cela lui donna envie de replonger dans sa propre mélopée et, se délestant du luth de fortune qu’il avait récupéré, voulut s’emparer de sa flûte au bois de saule pour jouer un air plus élégant et mystique. Mais en plongeant sa main dans la poche de son manteau d’arlequin, son visage se changea en déconfiture. Elle était plus vide que sa dernière chope d’hydromel. Diable ! Au meurtre ! Au secours ! Au galop l’aide ! A lui ! Où se trouvait-elle, qu’en avait-il fait ? Une boule d’angoisse serra sa gorge et Nirfäel se mit à regarder partout sur les pavés, dans ses autres poches, jusqu’à en rebrousser chemin. Puis il sentit soudain un petit appel d’air dans sa poche à vide, et comprit qu’elle avait été trouée par une fine lame.

Le demi-elfe se retourna à la volée et leva la tête avec beaucoup de colère. Il vit soudain une silhouette enroulée dans une cape qui fuyait la scène de crime avec une gestuelle qui lui parut si suspecte qu’il ne put s’empêcher de la héler de loin. Elle s’élança alors dans une ruelle, comme si elle venait de s’animer. Soudain, Nirfäel détesta ce pays rempli de vils félons et de bandits ! Malheur ! En plein Gra’R’No ! Il se lança à la poursuite du voleur sans prévenir, tout requinqué par l’adrénaline du vol qui venait de subir. Foutre non il n’allait pas laisser sa musique, en la présence de son merveilleux instrument, être bafoué de la sorte !

-Halte-là, sacripant ! Que la peste te conchie ! Reviens ici !

Mais le filou n’était pas très coopératif. Il traversa deux quartiers en passant habilement par de larges pontons en hauteur soutenant les passerelles de bois. En le suivant, Nirfäel détourna le regard une seconde et vit, en dessous de la passerelle le ressac tumultueux des eaux d’Abyre. Le barde eut un haut-le-cœur mais se reprit au bout d’une seconde et repartit de plus belle, hélant à tout va. Si personne ne savait qu’il y avait eu vol, la moitié de la cité était maintenant au courant. Cependant, le voleur filait vite et sa victime était quelque peu ivre. Les lanternes à huiles qui avaient été accrochées aux mâts des bâtiments-navires du quartier renvoyaient à Nirfäel des couleurs et des images floues. Bien qu’il se définisse comme athlétique, certes vérité devait être faite qu’il ne s’est point souvent exercé, l’effort requis pour le suivre était considérable.

Lorsqu’il arriva finalement dans une petite ruelle où le chemin se terminait par un cul de sac, il se trouvait trempé de sueur et bien moins agité qu’à l’accoutumée. Soudain, le truand prit appui sur un muret de bois, s’élança sur la palissade à l’opposé pour se réceptionner sur un balcon. Tel un écureuil, il se mit ensuite à grimper jusqu’en haut d’une maison-voile et ne s’arrêta qu’en ayant atteint son toit. Le demi-elfe observa ce spectacle avec un air qui tenait plus de la consternation que du profond désespoir. Il continua à haranguer le sujet de tous ses maux, jusqu’à ce que Corneille ne se retourne et relève sa capuche. Le demi-elfe se tut en ouvrant de grands yeux et elle lui répondit par un sourire narquois :

–Allons donc ! Plus assez de force pour pousser la chansonnette ? On n’a perdu sa voix, troubadour ?

-Troubadour ? s’indigna-t-il. Je suis Nirfäel le barde seigneurial, Farceuse de minuit ! Quant à la chansonnette, il t’en cuira d’en persifler l’air ! J’appellerai la garde et sache qu’ils t’en feront pousser une belle, de chansonnette !

-Pour ce jouet ? (elle montra la flûte et en joua de ses mains). Mmh, permets-moi d’en douter, troub’. Si encore tu avais eu de l’argent. C’est bien ma veine ça, de tomber sur un « barde seigneurial », (fit-elle avec de grands gestes) de le délester plus facilement qu’un philanthrope camé et de ne trouver qu’une flûte tout ce qu’il y a de plus simple.

-Elle a une valeur sentimentale ! Elle a été faite dans un bois du jardin de ma mère et vaut plus que tout pour moi.

Corneille eut alors un regard intéressé. Très intéressé :

-Plus que tout, mon mignon ? demanda-t-elle.

-Oh ! Vilaine peste ! Que la peste te conchie !

-Ca, tu l’as déjà dit. Y a-t-il autre chose ?

-Oui ! Rends-moi cette flûte !

-Ce que tu peux être barbant, troub’. Bon et bien je suis d’humeur lyrique et enjouée alors je suis disposée à te la rendre. Mais, comme c’est le Gra’R’No, je ne le ferai qu’à une seule condition. Fais-moi un cadeau de la valeur de mon présent : Immortalise-moi dans une de tes chansons, comme Corneille, la plus célèbre voleur d’Abyre.

-Peuh…

-Qu’entends-je ? De l’indécision ? Serait-ce même de la défiance ? Bon et bien dans ce cas…

-Non, attends !

-Ah, j’aime mieux ça. Avec un petit palindrome si possible ?

Le demi-elfe se mordilla les lèvres. Il fit deux pas à gauche, sautilla sur deux pas à droite en marmonnant dans sa barbiche. Vite que diable ! Trouver des vers rapidement, ce n’était quand même pas si compliqué. Ah ! Mais il fallait connaître pour contenter, ce qui n’était pas son cas. Corneille quant à elle était toute à sa joie, se prélassant sous les feux d’artifice chatoyant de couleurs comme un chat au soleil. Elle sentait le bonheur frais. Nirfäel entama :

-Ci-vole, attrape-fumée, Enleveuse de trésors,
Passe l’écureuil à travers le filet, de prime à bord
Je vous présente Corneille la cueilleuse de cœur,
Chasseuse mais pas gloutonne, point elle ne dévore

Attention car elle ne laisse pas de traces
Sale miss rira, rarissime hélas !
Elle pique tout vite, squick, vos possessions,
En échange d’un sourire, c’est bien peu voyons !

Là où les mouches demeurent, elle se glisse,
Au seuil des étoiles, tapie dans les abysses
Palais, châteaux et forteresses, Corneille jamais reculera
Ainsi donc commence sa saga.

-Eh bien je crains d’être déçue… fit Corneille après quelques secondes de réflexion. Ce n’est pas très élogieux.

-Tu ne m’as pas demandé d’être élogieux, rapiate des îles, mais de t’immortaliser. C’est maintenant chose faite ! Remplis ta part du marché et rends-moi mon bien.

La voleuse se fit attendre. Elle fit mine de recoiffer ses cheveux courts et noirs, arrangea plutôt deux fois qu’une la ceinture qui serrait son pantalon en cuir. Seulement après, elle jeta la flûte dans les airs. Le barde leva les deux mains en l’air et la reprit d’un geste désespéré avant qu’elle ne se brise sur le sol.

-Vilaine ! Gourgandine ! Tu as failli me l’esquinter !

-Ta flûte ? Oh, j’aurais pu faire plus. Enfin bon, à la revoyure !

Le barde fit un geste de la main :

-A mon bon déplaisir ! Je ne pense pas te revoir de sitôt, et si je te revois, prends garde à ce que des soldats en armure ne viennent pas avec leurs piques !

-Tu crois ça ? (Elle ouvrit de grands yeux surpris) Il apparaît que j’aurais quand même un jour besoin de ton aide, parce que voilà, il se trouve que j’ai trouvé un manteau violet dans un cabaret et que son propriétaire l’a perdu. Tu ne saurais pas de qui il s’agit ?

La silhouette de la voleuse disparut dans un rire.
Revenir en haut Aller en bas
Syobhan
Syobhan
Capitaine de la Garde d'Abyre
Messages : 271
Date d'inscription : 28/03/2019
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitimeJeu 5 Mar 2020 - 16:32


Assise sur son banc, le monde tournoyait tout autour d’elle. On l’y avait installée de force et même sur cette planche de bois stable elle avait l’impression de tanguer sur une barque, embarquée sur les eaux tumultueuses d’une rivière capricieuse qui coulait à toute vitesse, virait à gauche, puis à droite, puis à gauche encore et poursuivait sa course toujours plus vite. Syobhan avait mal au cœur et il fallait qu’elle laisse échapper un gémissement de temps à autres, pour l’aider à faire passer le mal.
Les yeux fermés, elle écoutait l’écho des festivités qui se répercutait infiniment à l’intérieur de son crâne déjà surchargé de mille pensées et pouvait entendre les voix des autres, à la fois proches et lointaines mais incompréhensibles. Elle avait seulement conscience qu’ils discutaient d’elle, de la fête, et s’adressaient parfois à la Capitaine qui n’était pas en mesure de répondre.
Les sons formaient des taches de lumière jaunes et orangées sur la paroi de ses paupières closes, ce qui n’arrangeait pas sa nausée. Ses sens à la fois altérés et décuplés la rendaient hypersensible à la moindre perception. C’était le Gra’R’No dans sa tête, l’agréable en moins.
Sans qu’on lui demande la permission, on la hissa sur l’ours blanc qu’elle avait déjà aperçu dans l’Aurvangar durant l’attaque des Nepprandirs. Ciel, un ours qui parle ? Puis elle se souvint que c’était LE ours. L’ours unique. Une multitude de questions se bousculèrent dans sa tête à commencer par comment se faisait-il que tous se soient retrouvés ici au même moment, mais tout ce qu’elle réussit fut de se baver dessus. Ses mains cherchaient à s’agripper tandis qu’on poussait son bassin sur le dos de l’ours dont elle avait n’avait pas retenu le nom. Sentir sa fourrure propre et lustrée contre ses paumes eut un effet réconfortant et guérisseur, même si la tôle forgée qui rapa ses phalanges quelques secondes la désenchanta quelque peu.
Elle grogna quelques mots inintelligibles que personne n’écouta, de toute façon elle ne s’en rendit pas compte. L’armure de l’ours blanc lui rentrait dans le ventre et provoquait une sensation très inconfortable qui l’obligeait à se tortiller sur elle, en plus de cela il fallait qu’elle garde l’équilibre, un exercice compliqué quand le monde se dérobait à chaque pas du grand carnivore et qu’on avait en plus l’esprit alcoolisé. L’ours était encore plus instable que le blanc et l’envie de vomir s’intensifia.

“Monsieur Ours, Monsieur Ours, ah oui Ted, c’est bien ça. J’ai peur de souiller votre beau pelage. Je ne voudrais pas vous déshonorer.”
“Faites simplement attention, et si vous sentez que ça monte, faites donc votre affaire sur le côté.”

Syobhan fit donc son affaire sur le côté et, la bouche sèche mais l’estomac soulagé pour un temps, rajusta sa position sur le dos de l’ours.

“Voilà, c’est fait. Il se pourrait qu’il y ait quelques restes de crème séchée dans les poils de votre nuque.”

L’ours soupira, grogna. Elle jura qu’il avait levé les yeux au ciel.
Le sommeil eut vite fait de gagner Syobhan dont le corps entier avait été vidé de son énergie, mais Ted faisait tout pour l’empêcher de s’endormir, dansant comme un pacha, élégant comme un cygne, au rythme des mélodies et du zouave qui jouait de la flûte et du luth sans jamais cesser de gigoter.
À mi-chemin de la chambre de Ningal -ça, Syobhan avait compris où ils se rendaient- la procession s’arrêta et elle les entendit se mettre à discuter vivement entre eux, captant quelques intonations par-ci par-là mais sans comprendre un traître mot de la conversation. Elle se pencha tout doucement en avant vers les oreilles de Ted.

“Qu’est-ce qu’ils racontent ?”
“Ils parlent de déguisement. Il faut être déguisé pour le bal.”
“Ah ! Alors c’est ça votre armure ?”

L’ours parut vexé.
Soudain elle sentit quelque chose glisser de son mollet. Elle se pencha de l’autre côté cette fois, et Ô surprise, que vit-elle ? Non, ce n’était pas une illusion, une main ! Dont la poigne s’était insolemment refermée sur la garde de sa rapière, qu’on était discrètement en train de retirer de son fourreau.
Syobhan n’ayant plus tous ses réflexes, la seule idée qui lui traversa la tête pour ne pas se faire chouraver la rapière fut de se laisser glisser sur le voleur qui ne s’attendait sûrement pas à se faire avoir de la sorte. Il -c’était un il- poussa un petit cri de détresse qui sonna presque féminin.

“Hé là oh ! Le vilain chapardeur ! Mal dressé tout ça ! Oh par tous les Dieux” articula Syobhan, motivée par une vive montée d’adrénaline, et ses yeux repérèrent son arme de service qui gisait par terre et dont elle s’empara instantanément (l’urgence de la situation fit qu’elle avait retrouvé la vélocité perdue de son bras). La rapière fermement empoignée, elle l’attira vers elle.
En-dessous, le goujat essayait tant bien que mal de se dégager mais le poids de Syobhan additionné à celui de son armure rendait l’initiative impossible et heureusement, car c’était le seul moyen pour la Capitaine de l’immobiliser, ce qui permettrait de lui filer une bonne correction. Quoique l’échec de son entreprise était déjà une leçon qu’il ne serait pas prêt d’oublier, il s’était humilié tout seul.
Ted leva ses grosses pattes, ne sachant où les placer, et demanda de sa grosse voix :

“Eh, que se passe-t-il là-dessous ?”
“Ce pauvre boug a voulu prendre la poudre d’escampette avec ma rapiette… ma rapière.”
Ted se contorsionna et constata la présence du mesquin. “Ça alors. Vous n’avez pas embêté la bonne personne, cher ami.” Il n’avait pas l’air plus surpris que ça.

Le visage du bougre se décomposa, car il savait très bien à qui il avait affaire.

“Alors Capitaine, qu’allez-vous faire de lui ?”
“Il est plutôt mignon.”
“Pardon ?”
“Hein, quoi ?” bredouilla le voleur, et ses joues se tintèrent de rouge.
“Vous avez de très belles bouclettes.”
“D’accord…” grogna Ted.
“Voler est puni par la loi.”
“Je ne voulais pas…”
“Avoir d’aussi belles bouclettes également. Vous devriez passer chez moi.”
“Ça suffit” gronda Ted, et il baissa son museau sur Syobhan pour la faire rouler par terre. Le voleur rampa sur le côté et se redressa.
“Eh oh il s’enfuit là !” s’exclama Syobhan, mais Ted ne l’écoutait pas.
“Soit, qu’il se fasse la malle, je ne peux pas vous laisser à terre dans cet état. Relevez-vous et remontez sur mon dos.”
“Non merci Monsieur le rabat-joie, je peux très bien le faire seule. Voyez, ça va mieux. Allez, tous ensemble au bal masqué ! Ohé !”
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitimeVen 10 Avr 2020 - 7:42




Les voleurs s’étaient dispersés aux quatre coins de la place à la recherche de victimes faciles et fortunées. Ô ben sûr les possessions de ces petites gens ne pourraient jamais égaler les richesses qu’arboraient les grands de la cité bien à l’abri dans la Chambre de Ningal mais nos modestes fripons sauraient s’en contenter.

«- Ben c’est pas cette nuit qu’on va faire fortune ! Se plaignit Pivert.

- Tu serais trop ivre pour faire quoi que ce soit de toute façon. Répondit Ydil moqueusement. Tu tiens à peine debout !

- C’est faux, regarde ! Il se détacha de la table en s'emmêlant les pieds mais finit par tenir debout seul après quelques rattrapages. Tu vois ! Toi en revanche je suis sûr que tu serais incapable de piquer la moindre bourse.

-C’est un défi ?

- Absolument.»

Ils rirent de nouveau, décidément l’alcool les rendait plutôt idiots mais ils se prirent au jeu et se mirent à chercher dans la foule un malheureux à dépouiller. Se faisant, la jeune femme finit sa poire. Malheureusement les bourses étaient rares les soirs de Gra’R’No car personne n’avait besoin d’y dépensez sa fortune, enfin, sauf les grandes maisons bien sûr. Non, ce qui courait les rues cette nuit c’étaient les bijoux et c’est cela qu’ils recherchaient dans la lumière des feux de joie et des lanternes. L’éclat brillant du métal et de la pierre comme deux pies à l'afflux.

«- Celui-là, finit-il par dire.»

Ydilianda regarda dans la direction. Dans la foule, un jeune elfe plutôt éméché aux cheveux parsemés d’algues allait de danseuse en danseuse à coup de grand sourire et de rire enivré. A son cou pendait un large médaillon argenté aux armoiries d’une maison mineure. Sans doute s’était-il échappé en douce du grand bal pour fleurter librement avec quelques filles de basse condition facilement impressionnables.

«- Tu me dis incapable d’attraper ce médaillon ? Ricana-t-elle. Tu as donc si peu d’estime pour ta confrère ?

- Si tu y arrives je dépouille un garde, surenchérit-il

- Marché conclu. Mais j’ai besoin d’un couteau.»

Sans rien ajouter il lui tendit son rassoir, celui dont il se servait régulièrement pour éventrer les sacs et les bourses, c’était parfait. La voleuse saisit l’objet et le coinça sous son bracelet de cuivre avant de se frayer un chemin, aussi bien que le lui permettait son équilibre chancelant, à travers la foule pour atteindre sa victime.
Il ne fut pas bien difficile, même dans son état, de devenir la cavalière de l’abruti aux longues oreilles. Il ne fut pas très difficile non plus de diminuer progressivement l’espace entre les deux danseurs. Le fait que le jeune noble soit déjà bien plus ivre qu’elle y était pour beaucoup. Non, le plus difficile était de ne pas perdre son objectif de vue alors que l’alcool passait progressivement de son estomac à son sang. Pendant quelques secondes, ou peut être plus elle n’avait plus les idées très claires à ce moment là, l’ivresse amnésique eut raison de la portangeoise et elle se demanda sincèrement ce qu’elle faisant dans les bras de cet elfe. Puis un regard en direction de son complice lui rappela son objectif et alors, sans attendre une nouvelle bouffée d’oubli, elle embrassa sa victime à pleine bouche. L’elfe déjà ivre fut tellement surpris qu’il ne sentit même pas que les mains de la jeune femme sur son torse venait de trancher l’épais fil de cuir qui reliait son précieux médaillon à son cou. Puis, telle jouvencelle honteuse de son moment de faiblesse, la voleuse s’enfuit des bras de son cavalier où une autre danseuse vint rapidement se loger.

Ydilianda dut se rattraper de justesse à la table pour ne pas s’effondrer, elle avait marché vite pour décrire une ligne droite malgré son défunt sens de l’équilibre. Si sa fuite avait été un succès, son arrêt l’était beaucoup moins. Triomphante, elle brandit le bijou à l’abri du regard de l’elfe, qui était déjà de nouveau bien occupé.

«- Ben t’en as mis du temps ! Se moqua-t-il.

- Il était de meilleure compagnie que toi, répondit-elle en retenant difficilement un nouveau rire nerveux.»

Elle glissa le pendentif dans son bustier et se retourna vers son compagnon. A présent elle serait bien incapable de recommencer, ce vin épicé avait un sacré contre-coup.

«- A toi ! Tu disais pouvoir faire les poches à un garde ?

- Bien sûr ! Et même à un capitaine ! Se venta-t-il.

- Mais oui c’est ça, répondit-elle sceptique.

- Je t’assure, regarde derrière moi.»

Ce qu’elle fit, la voleuse dut cependant faire preuve d’une énorme concentration pour faire coïncider les images que lui renvoyaient son oeil droit et son oeil gauche. Bordel que ce vin était fort ! Au bout d’un moment elle finit par discerner à quelques pas derrière lui une armure... l’armure d’un capitaine terrassé par l’alcool.

«- Mais heuuuu ! C’est de la triche ! Il est même pas réveillé !

- Et alors ? Ça reste un capitaine ! » Répliqua-t-il victorieux.

D’un pas conquérant (ou plutôt qui se voulait conquérant malgré quelques zig-zags) Pivert s’avança de quelques pas vers le banc où gisait la pauvre Syobhan. Ce fut malheureusement ce moment là que choisirent les amis de la pauvre soldate pour se soucier de son existence et la transférer de son banc pourtant si accommodant au dos d’un immense ours blanc. Le voleur blêmit quelque peu avant de lancer un regard à sa compagne. «Un pari est un pari.» Lui répondit-elle amusée.

Le temps d’une seconde, Ydilianda crut qu’il allait renoncer. Après tout ce n’était pas commun de voir sa futur victime se réfugier au sommet d’une montagne de muscle et de griffe. Mais c’était mal connaître le plus fier le voleur de la guilde qui, après un court temps de réflexion (sans doute rendu peu constructif par les litres de bière) emboita le pas de la foule vers les hauts quartiers de la capitale.
La Pie grogna en se séparant de l’appui salutaire que lui offrait la table. Elle aussi allait devoir les suivre ? Elle avait déjà du mal à rester concentrer sur l’avancée de son collègue ! Avait-elle déjà soulevé à quel point le contrecoup de ce vin épicé était important ?

Il y eut comme un vide dans ses souvenirs, un étrange repli dans la toile de sa mémoire car elle ne put jamais se souvenir de se qui se passa entre la mise en route et le grand bruit de métallique qui résonna une trentaine de pas devant elle.

Son épaule heurta un mur lui offrant suffisamment de stabilité pour se concentrer sur la scène. Pivert c’était foiré, magistralement foiré. Sa victime était effondrée sur lui et il se débattait comme un forcené pour échapper à cette masse de fer qui l’écrasait. Ydil de son côté s’effondra à genoux sur le sol en pouffant. Il en entendrait parler de ce coup là ! Elle essaya de rester concentrée sur le délit. Si seulement sa tête voulait bien arrêter de bouger ! Heureusement le pauvre brun réussit on ne sut comment à échapper à l’emprise métallique. Elle ne put plus retenir son rire, c’était un de ses rires absolument silencieux qui jaillissent des bouches pourtant grandes ouvertes en vous étouffant à grand coup de spasmes douloureux.

Ce ne fut qu’au dernier moment qu’elle vit le petit groupe de garde fendre la foule pour se diriger droit vers leur capitaine. Bien entendu ils avaient fini par s’inquiété de sa disparition et été partis à sa recherche, arrivant juste à temps pour assister au larcin manqué et à la tentative un peu moins manquée d’immobilisation.
Ydilianda voulut prévenir son compagnon mais il était déjà trop tard.

«- Halte ! Que faites vous là ?»

Si le jeune homme brun aux yeux verts avait eu tous ses moyens il aurait sans doute pu prétendre avoir agi selon une impulsion certes folle et précipitée mais parfaitement honnête: celle de délester temporairement d’une arme dangereuse (pour elle et pour les autres) une représentante de l’autorité qui ne semblait pas en état d’assumer ses fonctions et ses responsabilité pour le reste de la soirée. Malheureusement la panique le poussa à fuir, et l’alcool l’en empêcha. Il s’étala par terre après seulement quelques foulées.

La chef de la Confrérie voulut se relever, distraire les gardes, baragouiner quelque chose, l’aider à fuir... Mais elle en fut incapable. Elle n’avait même plus assez d’équilibre pour tenir sa tête droite, elle n’arrivait même pas à suivre le déroulement des évènements correctement au milieu de cette foule trop pleine de sons et de couleurs. Et ce fut sans doute mieux pour elle, les gardes ne la remarquèrent même pas, n-ième silhouette ivre sur les pavés de la ville. Ils repartirent, emmenant le fugitif avec eux et peut être même leur capitaine elle n’en savait rien.

«- Et merde », souffla-t-elle.

Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ - Page 2 Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 2 sur 2Aller à la page : Précédent  1, 2

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
L'Âge de Feu :: Baie d'Astal :: Abyre-
Sauter vers: