Forum de RPG basé sur l'univers de l'Âge du Feu par E.E. Knight
 
Bienvenue sur la Saison 2 de l'Âge de Feu !
-40%
Le deal à ne pas rater :
-40% sur le Pack Gaming Mario PDP Manette filaire + Casque filaire ...
29.99 € 49.99 €
Voir le deal

Partagez
 

 [Terminé] Le vent du changement (Dana)

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : Précédent  1, 2
AuteurMessage
Percebrise
Percebrise
Réfugié(e)
Messages : 1041
Date d'inscription : 05/02/2014
Age : 27
Localisation : Limousin
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeVen 5 Oct 2018 - 15:28

Percebrise observait, inquiet, la pauvre Dana se tordre de douleur sur le sol en gémissant. Il y avait quelque chose de malsain à la voir dans cet état-là mais même s’il en avait envie, il était incapable de détourner les yeux. L’humaine se recroquevilla sur elle-même, à tel point qu’elle paraissait minuscule maintenant, de la taille d’une petite enfant. Ses muscles étaient contractés pour lutter contre la douleur qui l’avait envahie.
Elle se serra un peu plus fort contre le museau d’un Percebrise, pris au dépourvu, mais qui ne recula pas pour autant. Simplement, il ouvrit de grands yeux bleus et les posa sur Danalhéa, en guerre contre le mal dans son corps et son esprit.
L’elfe s’approcha d’eux d’un pas déterminé. Percebrise étouffa un doux grondement : il savait qu’elle n’était pas une mauvaise personne, mais après cette terrible séance, il n’était pas très enthousiaste à l’idée de la laisser continuer ses expériences désastreuses sur Danalhéa. Elle brandit un petit calice en terre cuite contenant une drôle de liquide d’un vert pâteux que Percebrise ne se serait jamais aventuré à goûter. D’un geste brutal, elle retourna Dana afin de la placer dos au sol et déversa le contenu du récipient dans la bouche de l’humaine -ce n’était certainement pas la meilleur position pour avaler quelque chose, or le temps pressait. Méfiant, Percebrise recula sa grosse tête cornue et laissa l’elfe faire son travail, scrutant le moindre de ses mouvements. Il n’avait jamais eu confiance en ces gens qui utilisaient la magie et les sortilèges, et cela ne fit qu’accentuer sa suspicion.
Le calice en main, l’elfe recula et tous les deux attendirent que la potion fasse effet. Pour Percebrise, c’était simple : soit l’état de Danalhéa empirait, et il n’hésiterait pas à montrer les crocs ; soit Dana se rétablissait, auquel cas il quitterait cet endroit sur le champ, et Dana avec lui. Il attendit, sur le qui-vive. L’humaine à la chevelure immaculée remuait de moins en moins, et Percebrise ne savait pas comment l’interpréter : était-elle en train de sombrer dans l’inconscience, ou la douleur commençait juste à s’estomper et elle reprenait ses esprits petit à petit ? Il la renifla : une odeur étrange et indescriptible, qui lui était inconnue, caressa ses narines. Il avait également cette propre odeur sur lui. Il était confus, car tout ce qu’il pouvait associer à cette odeur n’était qu’une couleur, un doré très doux, chaleureux, un peu pâle. Les avait-on drogué ?
Il revint sur ses pensées précédentes et les images qu’il avait vues pendant sa transe. Non, ce n’était pas anodin : dans ces visions étonnamment familières, il avait l’impression d’avoir retrouvé des souvenirs, des souvenirs qui  de prime abord paraissaient dérisoires mais qui en réalité ne l’étaient pas tant que ça.

Dana était en train de reprendre ses forces, très lentement. Elle s’était ramassée sur elle-même, un peu comme un hérisson, et maintenant voilà qu’elle cherchait à prendre appuis sur le sol, résolue à se mettre debout. Elle posa ses mains par terre et se redressa, un processus long et éprouvant, toujours repliée sur elle-même. Elle se cramponnait à ses propres bras, mais elle était toujours agitée de spasmes certes moins violents que ceux qui l’avaient secouée plusieurs minutes plus tôt, mais tout aussi incommodants. Des gouttes de sueur perlaient sur son front plissé et elle dû s’appuyer contre l’encadrement de la porte pour ne pas s’effondrer à nouveau. Il crut qu’elle allait vomir. Une haine profonde brûlait dans ses yeux, et elle dévisagea Percebrise un court instant, avant de planter son regard hostile sur l’elfe qui se tenait à une distance respectable. Cette dernière se doutait bien que même si elle n’avait pas voulu leur nuire, ses invités risquaient de se montrer agressifs. Elle s’était retranchée derrière le comptoir, se fondant parfaitement avec le décor.

« Tu nous as fait quoi, salope ? »
« Je… Vous… Des… Euh. Visions ? Hrm. Je vous ai donné des visions. Vous avez tous les deux vu la vérité sur… Tes origines. »

Percebrise pouvait sentir la rage déborder tout autour de Dana. Il crut qu’elle allait lui sauter à la gorge et lui arracher les boyaux.
Attend ! Arrête, ne fais rien !
Cela lui fit bizarre, de communiquer par la pensée. Il avait tellement perdu l’habitude. Malheureusement, l’état d’esprit de Dana ne lui permettait pas de se faire comprendre ni entendre et son entreprise ne servit à rien. L’humaine épanchait d’une pure colère et un sourire tordait son visage, sourire qui se défit très vite lorsque la silhouette de l’humaine s’affaissa un peu. Une onde de choc avait chassé toute cette fureur en laissant place au vide. Un vide las. Percebrise attendit quelques secondes.

« Allons-nous en. » décida-t-il en poussant doucement une Dana oisive contre son poitrail. Nous ne devons pas rester ici Dana. Il se surprit à se montrer aussi familier avec elle -mais justement, qu’est-ce qui pouvait bien l’en empêcher... Il la guida gentiment à l’extérieur du bâtiment et les rayons du soleil vinrent caresser sa peau d’albâtre mais elle n’y fit pas attention, perdue qu’elle était dans les recoins les plus reculés de ses pensées. Percebrise s’adressa une dernière fois à l’elfe et la gratifia d’un « Au revoir » qui relevait plus du « À jamais », avant de quitter définitivement les lieux. L’elfe, gênée, les suivit du regard jusqu’à-ce que la dernière écaille de Percebrise disparaisse de son champ de vision.
Dehors, rien n’avait changé et la foule poursuivait ses occupations. Dana n’avançait plus toute seule ; visiblement, elle n’était plus de ce monde et Percebrise devait la pousser du museau pour la faire avancer. Ils ne firent que quelques mètres, histoire de s’éloigner du peuple pour avoir un peu plus d’espace.
Grimpe sur mon dos s'il-te-plaît. Nous allons trouver un coin plus tranquille.
Percebrise lui présenta une sii et son aile pour l’aider à grimper. Elle coopéra sans broncher et se laissa hisser, docile, sur le creux entre la nuque et les épaules de Percebrise.
Ce dernier se faufila parmi les hominidés et redescendit le long de la rue qu’ils avaient empruntée en sens inverse. Il passa sous les innombrables arches fleuries, traversa la cité jusqu’à arriver à la rivière où il avait rencontré Dana une fois sur les ponts, et regarda autour de lui pour trouver un endroit un peu plus sympathique -non pas que cette ville avait l’air désagréable, à première vue, elle était réellement splendide- mais il fallait un lieu plus calme pour que l’humaine puisse se reposer, se ressourcer.
Il aperçut un pont en pierre un peu plus loin qui menait de l’autre côté de la rivière dans la forêt avoisinante, et l’emprunta. Une fois de l’autre côté, il se mit en quête du petit recoin parfait. Ce ne fut pas long : ces bois étaient remplis de petites clairières agréables et baignées d’une douce lumière. Il en trouva une à son goût, tapissée de mousse réchauffée par le soleil, avec deux petits rochers sur lesquels il ne pouvait certainement pas se percher car il y avait tout juste de la place pour son corps entier -et encore, il devait replier la queue ou la laisser traîner parmi les arbres tout autour afin de s’installer. Il fit attention à ne pas piétiner toute la mousse, et déposa délicatement Danalhéa tout près des rochers. Pas très loin d’eux, un groupe d’enfants était en train de s’amuser : on ne les voyait pas, mais leurs cris excités résonnaient à travers la forêt. Rien de trop dérangeant cependant, car ils se trouvaient relativement loin.
Dana regardait toujours dans le vide. Percebrise s’allongea comme il le put : se coucher sur la mousse était agréable, et le soleil réchauffait ses écailles blanches -un plaisir bienvenu, après ce qu’il venait de vivre. Il se sentait encore tout retourné, mais pas autant que l’humaine. Il ne la quittait pas du regard, et il repensait à toutes ces visions. Peu à peu, certaines choses se faisaient plus claires. D’autres en revanche… Il soupira, un certain malaise toujours présent chez lui. Effectivement, il était certain qu’une partie des images qu’il avait vues concernait Dana. Mais d’autres… Il s’agissait d’endroits qu’il ne connaissait pas. D’endroits où il ne s’était jamais rendu mais qui existaient car il en avait entendu parler. Y avait-il une part d’hallucination dans ce qu’il avait vu ? Ou bien avait-il vraiment eu une vision du désert d’Anklamère ?
Soudain, Dana esquissa un mouvement. Percebrise redressa la tête.
« Dana ! Tu es bien là ? Comment te sens-tu ? »


Dernière édition par Percebrise le Mer 16 Jan 2019 - 1:03, édité 2 fois
Revenir en haut Aller en bas
Ted
Ted
Réfugié(e)
Messages : 869
Date d'inscription : 02/09/2011
Age : 24
Localisation : ¯\_(ツ)_/¯
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeJeu 11 Oct 2018 - 23:05




« Allons-nous-en. »

C’était une très bonne idée. Toute son énergie avait disparue. Dana se sentais las, prête à tomber au moindre mouvement. Elle sentait ses jambes bouger toutes seules. Comment tenait-elle debout ? Elle ne savait pas. Et l’idée de questionner ce fait lui paraissait bien trop épuisant. Ses jambes fonctionnaient seules. Mais elle n’avançait pas. Avançait-elle ? elle sentait le soleil sur son visage. Tout paraissait flou. Quelque chose poussait dans son dos pour qu’elle avance. La foule lui paraissait lourde. Lourde ? Peut-être relevait-elle plus de l’amer ? Ou simplement faisait-elle un brouhaha assourdissant. Elle ne savait pas. Ses yeux étaient si bien quand ils étaient fermés. Elle rêvait d’un lit douillet, sous une grosse couverture de laine et de peaux, et de son homme. Où était-il, d’ailleurs ? Son Tybalt.
Une idée lui suggéra de monter sur le dragon derrière elle. Pourquoi un dragon la laisserait-elle monter sur lui ? RaÏnvir n’aurait jamais accepté. Il trouvait que l’odeur des humains était fétide, de toute façon. Il était toujours de mauvaise humeur. Elle le comprenait. Elle aussi serait de mauvaise humeur si elle devait toujours partager sa chambre… sa tête, avec son frère. Même si elle n’avait pas de frère. L’idée de partager quelque chose toutes les heures du jour et de la nuit avec une personne que l’on appréciait sans vraiment avoir eu le choix de l’aimer n’était sincèrement pas réjouissant.

Néanmoins, Danalhéa grimpa sur le dos sur dragon. Il était douillet. Elle aurait pu s’endormir. Ses yeux étaient toujours aussi lourds, comme si un petit lutin s’amusait à tirer sur ses paupières. Au loin, elle entendait la ville s’agiter. Ou était-ce les fourmillements dans ses doigts qui faisaient autant de bruit ? Elle ne vit rien de la ville, même si les odeurs étaient magnifiquement colorées. Les couleurs se calmaient quand ils arrivèrent dans un petit bois. Ses yeux s’ouvraient, et toutes les odeurs lui montaient à la tête. Le parfum des pins et de la mousse la calmait. Elle avait l’impression de se réapproprier son corps. Elle glissait jusqu’à terre, assise contre une pierre lissée ; et sa tête roula contre cette dernière. Dana fixait le ciel. Ses mains étaient profondément enfouies sous la mousse du sol. Le soleil réchauffait tout son corps. Ses sensations retrouvaient leurs états normaux. Ses yeux voyaient enfin des couleurs, sa langue goûtait une saveur acre presque acide comme de la bile, ses mains fourmillaient toujours, mais le bruit de ce fourmillement n’était plus, et ses oreilles entendaient au loin des enfants, mais aussi la respiration du dragon, et le bruit des oiseaux autours d’eux. Elle se sentait engourdie, mais elle revenait à elle. Si la décoction avait réussi à faire halluciner un dragon, imaginez un peu les conséquences que ça avait sur une humaine lambda. Enfin, lambda…

La jeune femme se redressait dans un effort monstre, avant de s’allonger de tout son long dans la mousse, ses bras au-dessus d’elle. Il faisait si bon. Les arbres étaient si haut. Le soleil si chaud. Tout paraissait doux, d’un coup. Elle prit une grande inspiration. L’air était humide, salé. Elle fermait ses grands yeux bleus. Tout allait bien. Elle n’avait plus à s’inquiéter de rien. C’était comme si tous ses problèmes et angoisses étaient partis. Il n’y avait plus de peur à savoir où ils allaient dormir. Plus d’angoisse par rapport à l’argent, à son ours, a Œilfantôme. Il y avait juste la mousse sous son corps, et le soleil au-dessus, embrassant sa peau de mille baisers réconfortants.

« Dana ! Tu es bien là ? Comment te sens-tu ?
- Bien, Percebrise. Si bien. » Un long soupir passait ses lèvres. « Ma mère n’a pu avoir qu’un enfant. C’était moi. Elle a eu recourt a tellement de choses pour m’avoir. Elle m’a donné les cheveux blancs. Et elle me déteste tellement. »

Aucune émotion n’affectait Dana quand elle avouait que sa mère la détestait. C’était un fait qu’elle avait accepté. Elle disait cela comme elle pouvait dire que l’herbe était verte. C’était factuel. Elle se demandait pourquoi elle avait dévoilé ce détail au dragon. Elle n’avait plus de filtre pour le moment. C’était peut-être une aubaine pour le dragon. Il pourrait en apprendre plus. En comprendre plus.

« Ou est-on ? Tybalt est-il ici ? Krakenoor est-il loin ? »

Elle était convaincue qu’il était là. Qu’elle était dans une forêt, sur l’ancien continent, non loin de chez elle. Elle avait toujours sa chevalière à son annulaire. Qu’avait-il pu arriver de si grave ? Dana avait de vagues souvenirs d’une fuite et d’un long voyage en bateau… Un rêve certainement.
La jeune femme ferma les yeux un moment pour se concentrer. Ted… Ted, Ted, Ted… Ce nom lui disait quelque chose. Il lui donnait une étrange sensation de chaleur dans le torse. Ce nom lui rappelait un câlin, une caresse dans les cheveux. Ce nom lui faisait également penser à un ours ? Elle connaissait un ours ? Oui, oui ! Ça lui revenait. Elle connaissait bien un ours. Il parlait même ! C’était son meilleur ami. Dana l’avait rencontré à Portangue, pour sûr ! Ils avaient voyagé ensemble… Pourquoi avaient-ils voyagé ensemble alors qu’elle allait se marier ? Et pourquoi était-elle allée à Portangue sans Tybalt… Confuse, elle fronça les sourcils, continuant son petit questionnement solitaire. Elle connaissait aussi une elfe, Œilfantôme avec qui… avec qui… elle avait… traversé l’océan… Peut-être avait-elle réfléchi à voix haute, et le dragon avait entendu tout son monologue intérieur.

« Pourquoi est-ce qu’on est ici, Percebrise ? Que s’est-il passé ? »

Ce n’était pas le moment de paniquer, mais Dana paniquait. Son cerveau se remettait en marche.
Revenir en haut Aller en bas
Percebrise
Percebrise
Réfugié(e)
Messages : 1041
Date d'inscription : 05/02/2014
Age : 27
Localisation : Limousin
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeMer 24 Oct 2018 - 23:00

« Elle m’a donné les cheveux blancs. Et elle me déteste tellement. »

Le blanc, le blanc, la couleur blanc : des liens commençaient peu à peu à se tisser entre les nombreuses pièces du puzzle. Les fragments de visions dont il avait été le témoin, il les revoyait, les revivait et les assemblaient dans son palais mental. Malgré le flou qui demeurait sur certaines de ces images et le fait qu’il était incapable de mettre des mots sur ce qu’il avait vu, il sentait que le mystère qui les concernait tous les deux était en train de se résoudre. Son regard n’avait pas quitté la jeune femme qui sortait peu à peu de sa torpeur.

« Où est-on ? Tybalt est-il ici ? Krakenoor est-il loin ? Pourquoi est-ce qu’on est ici Percebrise ? Que s’est-il passé ? »

Krakenoor ?
Percebrise cligna plusieurs fois des yeux, interloqué. Est-ce que j’ai rêvé ? Non, bien sûr que non. Krakenoor était une province humaine dont il avait déjà entendu parler à défaut de ne jamais y avoir mis les pattes : c’était autrefois une châtellerie verdoyante et prospère, à présent sous le joug de Leth et son champion Mortiferus, le Sans- me… dans l’ancien royaume. Le dragon blanc comprit que les visions avaient chamboulé la pauvre fille à tel point que celle-ci mélangeait des éléments du passé et du présent.
Dana était seulement en train de reprendre ses esprits : la confusion se lisait toujours sur son visage d’opale et le stress commençait à la faire paniquer. Sa respiration était rapide et saccadée, sa poitrine se soulevant et s’abaissant à un rythme alarmant. Percebrise devait agir vite car elle risquait de s’affoler et lui allait probablement perdre ses moyens si cela venait à se produire. Il était impératif qu’elle reste calme : sa première pensée fut de s’enrouler autour d’elle, ou du moins faire barrière avec son corps pour l’isoler de la forêt et être sûr qu’elle ne bougerait pas d’ici -les humains avaient des réactions surprenantes, Percebrise le savait, et il craignait qu’elle prenne la fuite sans jamais retourner en arrière. Trop de questions l’encombraient et il fallait que Dana reste avec lui.
Cependant en faisant cela il risquait d’empirer la situation et obtenir l’inverse de l’effet escompté. Il prit rapidement sa décision et choisit de rester stoïque.
L’albinos était toujours allongé en demi-cercle. Il se redressa légèrement en ramenant ses sii sous sa poitrine, rajusta la position de ses ailes dans son dos et jaugea la jeune femme.

« Tu ne te rappelles de rien ?»

Elle l’observa d’un air interdit. Il aurait plutôt dû lui demander de quoi elle se rappelait exactement. Le concernant, la mémoire lui revenait de mieux en mieux et le casse-tête était en train de se démêler. La femme et cette… Sorcière, le dragon blanc e l’enfant à la chevelure d’ivoire. Tout fait sens ! Des souvenirs qui n’étaient pas les siens s’abattaient sur lui comme des révélations et il avait l’impression d’avoir vécu plusieurs vies. L’excitation prit le dessus de son trouble et des dizaines d’hypothèses emergeaient aux quatre coins de son cerveau reptilien. Il fallut qu’il prenne sur lui afin de concentrer son attention sur Danalhéa. Cette dernière semblait plus perdue que jamais et elle fixait un point invisible sur le dragon avec une expression indéchiffrable. Percebrise espéra que la magie de l’elfe n’avait pas endommagé l’esprit de Dana. Il pesta intérieurement contre tous les sortilèges du monde avant de se reprendre lui-même. La magie fait partie de ce monde. Elle n’est ni bonne ni mauvaise. Il faut l’accepter, Percebrise...

« Dana… Nous sommes toujours là, à Abyre. Krakenoor n’est plus… et je ne sais pas qui est ce Tybalt. »

Son père, un frère ? Un ami?
Il ne savait pas comment lui expliquer qu’elle confondait le passé et le présent. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était la rassurer du mieux qu’il pouvait. Pour le moment, ça ne se passait pas trop mal.

« Mais n’aie crainte. Je nous ai éloigné de la foule pour être plus tranquilles. Tout va bien, je te l’assure. »

Il lui sembla que Danalhéa commençait à reprendre le contrôle de ses émotions. Après s’être assuré que tout se passait bien et qu’elle n’allait pas s’enfuir ou l’attaquer -avec quoi, il n’en avait aucune idée, mais elle avait un tempérament si farouche que tout était possible- il se laissa guider par une curiosité grandissante et éleva sa queue, en approchant la pointe sinueuse tout près du visage de la jeune femme et sans pour autant la toucher. Cette phrase est putain de connotée. Le blanc entreprit ensuite de racler le sol de la clairière pour ramener une couche d’herbes douces sous son corps, en délogeant une multitude de cloportes de leur nid douillet -il était si lourd que le matelas de mousse s’était très vite aplati, et il sentait l’humidité remonter sur ses écailles ventrales. Puis il pencha sa grande tête cornue sur le côté en dévisageant sans réserve la face blanche de Danalhéa. Ses prunelles d’azur inspectèrent chaque trait de son visage, à la recherche de similitudes entre elle et lui.

« Ainsi… Nous sommes liés... » marmonna-t-il.

Il n’en revenait pas : elle devait son existence à ses écailles. Des dizaines de questions l’assaillaient et il ne savait plus où donner de la tête. Y avait-t-il véritablement quelque chose qui les unissait ? Est-ce qu’on pouvait considérer qu’il faisait partie de la même famille ?
Est-ce que Danalhéa était vraiment humaine ?

HRP:


Dernière édition par Percebrise le Mer 16 Jan 2019 - 1:06, édité 3 fois
Revenir en haut Aller en bas
Ted
Ted
Réfugié(e)
Messages : 869
Date d'inscription : 02/09/2011
Age : 24
Localisation : ¯\_(ツ)_/¯
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeJeu 27 Déc 2018 - 0:38

Lullaby of Woe




Bien sûr qu’elle se rappelait tout.
L’ordre dans lequel elle se rappelait « tout » était simplement légèrement mélangé. Tellement mélangé qu’elle se mit à chercher frénétiquement sa chevalière. Dana posa sa main sur son thorax, et finalement, elle la sentait. Elle était là, lourde, chaude contre sa peau.
Elle comprenait. Se rappelait. Sentait sa respiration s’étrangler dans sa gorge.

« Dana… Nous … toujours … Abyre. Krakenoor n’est… je ne… pas qui … ce Tybalt. Mais… crainte. Je nous ai… de la foule… plus tranquilles… va bien… l’assure. »

Va bien. Va. Bien. Ses poumons se décontractaient, elle prenait une grande inspiration. Elle se noyait dans les souvenirs. Elle ne savait pas différencier ce qu’elle avait vu de ce qu’elle avait vécu ; ce qu’elle avait rêvé de ce qu’elle avait enduré. Sur son visage, elle sentait l’ombre d’une chose frôler sa peau, la faisant frissonner et baisser les yeux.
Sa main tenait toujours sa chevalière, accrochée par une magnifique chaine en or. Elle l’enleva, passa sa bague a sa main. Elle avait tant minci depuis le décès de son fiancé que l’alliance ne tenait pas. Elle la passa sur son index et remit sa chaine. Son idée était de revendre cette dernière pour beaucoup d’argent, même si elle savait que cette action allait la rendre malade pendant plusieurs jours. Ses mains se serraient, juste pour sentir le poids du métal précieux dans sa main, et la douce douleur de sa peau qui s’aplatissant contre le bijou.  Elle inspirait plus calmement, caressant la tête du lion qui trônait sur son doigt. Elle le regardait, et une aura bleue l’entourait. La bague était si lourde d’un coup… puis elle revenait à la normale. Ses yeux lui jouaient encore des tours. Son esprit aussi, elle était épuisée.

« Ainsi… Nous sommes liés... »

Danalhéa relevait la tête.
Elle avait presque oublié qu’elle était dans les bras, les ailes, contre… enfin, pas loin d’un dragon. Ses yeux étaient lourds. Elle se sentait fatiguée et se laissait aller contre le corps du reptile. Sa tête fixait le ciel, les rayons du soleil caressaient sa peau laiteuse, elle inspirait. Tout était plus paisible. Comme si elle avait retrouvé une partie d’elle-même.
Après de très longues secondes de silence, elle inspira un grand coup. Le dragon lui avait en effet posé une… plusieurs questions.

« Ty…Tybalt ! Mon fiancé ! Mon… » Elle serrait sa bague entre ses doigts alors que le souvenir douloureux lui remontait dans la gorge. « Mon ancien fiancé. Il est mort dans un accident de chasse. » Le craquement sinistre des côtes de son promis résonnait dans sa tête. « Une semaine avant notre mariage. C’est triste, n’est-ce pas ? On m’avait prévenu quand j’étais jeune. Ma vie a été forcée sur le destin, ou quelque chose dans cette idée-là, alors je ne pourrais jamais être heureuse. Ca sonnait très pathos à l’époque. Je me rends compte que ma vie est une tragédie ancienne. Tu sais, celle jouée dans les théâtres de plein air, en vieux Parl. Ah les chansons que j’entendais sur moi avant que je ne parte… « Lionne de Krakenoor, fiancée à un mort. » Doux et délicat, n’est-ce pas ? Dans chaque taverne visitée, j’avais le droit de l’entendre. Ça commençait comme ça…


« Lionne, égare son Loup dans la mélasse.
Lionne, perd son Loup à la chasse.
Lionne, voit son Loup en passe.
Lionne, mais le Loup trépasse.
»

Un long soupir s'envola et elle laissa sa main vagabonder sur la patte du dragon, délogeant une petite écaille en train de tomber. Elle observait la lumière qui s'y reflétait en continuant son histoire.
Puis la chanson engageait sur le sujet de mes cheveux, sur mon ours, sur mon départ après Hypat mais surtout sur mes exploits aux combat après la mort de mon fiancé; car un vaurien de noble avait eu le malheur de cracher sur son nom. Et cette putain de chanson a même voyagé jusqu’ici. Ah, les bardes se sont bien débrouillés pour raconter quelques sombres histoires d’une jeune damoiselle méprisée par le Destin, ils en raffolent. « L’oursonne blanche » est aussi une jolie chanson sur les déboires de ma mère pour m’avoir. Certaines langues trop pendues à la Cour avait ébruité tout ce que ma mère avait fait, et qu’il était sorti d’elle un monstre, mi enfant mi ours, Albinos, maudite par tous les dieux. Mes nourrices mortes n’ont fait qu’aggraver les bruits. Apparemment, je les avais toutes tuées, parce que « l’esprit du mal » s’emparait de moi. « Rouge immaculé » avait suivit ces bruits. Ma première Nonna s’était sacrifiée alors qu’un chien nous avait sauté dessus. Je me rappelle. Nous allions aux écuries. J’avais peut-être cinq ans. Elle m’avait poussé dans les foins, la bête lui avait sauté à la gorge, il m’avait ensuite attrapé au mollet, la gueule encore pleine de sang chaud. Il me reste une cicatrice. Il s’était fait abattre d’une flèche d’arbalète. Mon père avait toujours soupçonné que ce n’était pas qu’un simple accident. Ma deuxième Nonna s’est fracassée le crâne alors qu’elle venait de m’avoir couché. J’avais dix ans. Les bruits ont fait courir que je l’avais poussé. Ma troisième Nonna avait été empoisonnée en goûtant un de mes plats. J’avais douze ans, c’était encore une fois moi qui l’avais tué, d’après tous les nobliaux. Quelques-uns d’entre eux furent bannis de notre entourage par mon père, il était fou de rage. La quatrième est morte en me surveillant. Je me souviens de son regard fixé sur moi au matin. J’avais quatorze ans. Je n’ai plus eu de Nonna après ça, plus personne ne voulait s’approcher de moi. Je savais bien pourquoi. Les bruits me préoccupaient. Je n’avais jamais tué personne, surtout pas mes Nonnas… Les rares amis que j’avais étaient les orphelins dont ma mère s’occupait. Ils se fichaient de ce qu’il se disait, tant que je savais jouer aux billes, que je pouvais leur apprendre à tirer a l’arc et à manier une épée en bois… Je me rappelle Rose, elle avait de longs cheveux blond vénitien, un peu ondulés quand le temps devenait humide, elle était féroce comme moi, nous avions fini avec quelques bleus et cocards après avoir bataillé avec nos épées en bois… On avait bientôt seize ans. Mais... Je parle, je parle, tout ça doit te sembler si creux.
»

Elle avait beaucoup parlé, pour ne pas dire grand-chose finalement. Elle ne savait pas si elle avait répondu a sa question. Elle ne savait pas s’ils étaient liés. Dans tous les cas, le destin n’avait pas aimé qu’on lui force la main, et elle en payait le prix fort.
Revenir en haut Aller en bas
Percebrise
Percebrise
Réfugié(e)
Messages : 1041
Date d'inscription : 05/02/2014
Age : 27
Localisation : Limousin
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeMar 8 Jan 2019 - 3:20

Cela ne lui semblait pas “creux” mais il voyait où Dana voulait en venir. Percebrise ne se sentait pas particulièrement concerné par les histoires des hominidés, aussi tragiques soient-elle ; et s’il ne ressentait aucune tristesse à l’égard de ce pauvre Tybalt qu’il n’avait jamais rencontré, il éprouvait de la sympathie envers de la jeune femme et sa malheureuse histoire car elle n’était pas sans lui rappeler les sombres plaisanteries tenues à son encontre lorsqu’il n’était qu’un dragonnet banni.

“Non, pas vraiment…” marmonna-t-il. Il s’allongea sur le côté et ramena ses sii contre son poitrail, à la manière d’un félin. “Je ne sais pas si quelques liens magiques unissent nos âmes, en tout cas je nous trouve beaucoup de points communs. J’ai toujours été le sujet de moqueries après de mes confrères dragons et ce depuis mon plus jeune âge car je ne vais pas te le cacher, je suis un banni. Un moins que rien, comme on aimait me le rappeler. Ma couleur blanche m’a souvent nui. Trop petit, trop faible, trop bête... On a même longtemps cru que j’étais un albinos et même moi je me posais la question, alors qu’en vérité je suis juste un Blanc ; même s’il s’avère je me fatigue assez vite pendant certaines périodes.
J’ai été traqué et pourchassé sans relâche par les dragons du Lavadôme pour m’être retrouvé à plusieurs reprises au mauvais endroit, au mauvais moment, accusé de crimes que je n’ai jamais commis. J’imagine que nous sommes en quelque sorte tous les deux maudits. Dragons sauvages, protecteurs, guerriers, montures ou Soeurs du Feu, ils n’ont jamais cessé de me tourner au ridicule, de me narguer, tout ça parce que je suis un tantinet différent. Et j’ai mis du temps, beaucoup de temps pour apprendre à ignorer leurs regards dédaigneux mais j’ai fini par m’y faire -plus ou moins, et c’est en partie ce qui m’a permit d’avancer dans la vie. C’est une question de maîtrise de soi et d’habitude. Mais eux, ils leur a fallu une apocalypse pour se détourner vers d’autres préoccupations que celle de me houspiller. Et ce n’est que maintenant qu’ils réalisent que nous sommes tous dans le même bâteau. Du moins, ceux qui sont encore vivants pour le penser. Cela doit te paraître étrange venant d’un dragon, mais malgré les nombreuses différences qui séparent nos deux espèces, les enjeux restent souvent les mêmes… Je veux dire, les histoires de familles et autres tragédies. C’était une spécialité du Lavadôme, d’ailleurs.”


Il suspendit son crâne volumineux juste au-dessus de la tête de Dana pour la fixer intensément. Sans la prévenir, il lui donna un coup de museau peut-être un peu trop fougueux sur l’épaule.

“Je ne dis pas qu’ignorer toutes ces fables et chansonnettes que l’on chante à ton sujet va forcément t’aider à dépasser ce… ce… ce traumatisme. Je dois t’avouer que parfois, j’entends encore leurs moqueries et elles me blessent toujours autant. Il est possible qu’avec l’âge et le temps elles ne te fassent plus rien du tout, et si tu y arrives, je te félicite. Mais je ne doute pas que tu feras d’autres rencontres et vivras d’autres expériences qui t’aideront à avancer sur ton chemin. C’est aussi cela qui m’a beaucoup aidé.”

Il serra les crocs. S’il y avait bien quelque chose qui lui avait permis de se décomplexer -du moins pendant un temps- c’était ll’esprit sensible et ouvert de la Grise. Une fois de plus, il ne pu s’empêcher de penser à elle et à ce qu'elle pouvait bien être devenue.

“Chère Danalhéa, ne te laisse pas abattre par leurs vulgaires comptines. Si ces gens ont un tant soit peu de bon sens, ils ont dû apprendre qu’il est très périlleux de provoquer la lionne. Tu en as la force et le caractère, et je suis persuadé que tu en as également le courage et le coeur, alors montre-leur ce que tu vaux vraiment. Je pense qu’ils seront moins prompt à fredonner sur ton compte une fois que tu leur aura fait une petite démonstration -de force, si nécessaire.”

Le Blanc poussa gentiment Dana pour se relever et étirer ses quatre membres. Il vérifia l’état de son aile et s’aperçut avec une immense satisfaction que cette-dernière avait déjà l’air d’aller mieux -même s’il sentait encore que l’articulation restait fragile. La raison voulait qu’il reste quelques temps en ville pour se reposer et laisser le temps à sa blessure de guérir, mais le besoin irrépressible de décoller pour découvrir de nouveaux horizons le titillait. Abyre avait beau être une ville charmante et agréable, il en savait assez pour deviner que les Elfes des mers ne lui permettraient jamais d’obtenir une audience auprès de leurs dirigeants. Le seul moyen était de trouver une grande cité naine ou humaine et il savait qu’on pouvait trouver cela au Tyshar, notamment Gullvirki dont Aldar lui avait tant parlé. Tout d’un coup, il sentit comme le poids du monde reposer sur ses épaules et il se souvint de la raison pour laquelle il s’était rendu ici. Un nuage d’obscures pensée s’abattit sur son esprit et un voile opaque se déroula sur ses yeux.
Percebrise se pencha vers la jeune femme aux cheveux opalins et la fit se relever.

“Dana, peut-être que nous sommes liés, peut-être pas. Je n’ai pas tout compris à cette vision que nous avons partagé, mais ce que je sais, c’est que nous devons être courageux. Les temps sont durs et cela ne fait que commencer. De sombres complots se trâment de l’autre côté de la mer et nous devrons être prêts quand le moment sera venu…”

Il avait prononcé ces mots d’une voix lointaine, absorbé par ses propres songes.

“Je te remercie pour les bons soins que tu m’as apporté. Cette… sorcière, il se peut qu’elle ai été un peu trop curieuse, mais son onguent fonctionne à merveille et je dois dire que je suis satisfait. Je dois me rendre sans plus tarder au Tyshar. Quant à toi, n’as-tu nulle part où aller ?”
Revenir en haut Aller en bas
Ted
Ted
Réfugié(e)
Messages : 869
Date d'inscription : 02/09/2011
Age : 24
Localisation : ¯\_(ツ)_/¯
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeMer 20 Fév 2019 - 14:41

Well, goodbye.




La jeune femme écoutait le dragon sans le regarder. Ses yeux se perdaient dans la forêt qui s’étendait à côté d’eux. La voix caverneuse de Percebrise faisait presque trembler sa cage thoracique, son ton était bas, quelque peu chaleureux. Compréhensif, dans tous les cas. Il était bon d’entendre quelqu’un partager son histoire. Son grand museau bousculait son épaule, elle relevait la tête pour l’écouter plus attentivement.
Le dragon avait bien raison mais le message que véhiculait les fables continuait de lui faire du mal et de lui remémorer des souvenirs douloureux. Elle avait espéré que les histoires meurent sur l’autre continent et qu’elle vivrait libre de son passé jusqu’à la fin de ses jours.
Ce n’était pas sans surprise qu’un soir, alors qu’elle rentrait de la caserne épuisée et affamée, qu’elle entendait un barde narrer un conte à propos d’une petite fille possédée par un esprit, tuant ses nourrices d’une façon ou d’une autre. Avec, bien sûr, un soupçon d’horreur en plus, comme si le public avait besoin de choses plus glauque qu’un enfant assassin. Danalhéa apprenait alors qu’elle s’était amusée a découper une femme, enfermer l’autre dans les cage des chiens affamés, et empoisonner la dernière a grand coup de venin. La jeune femme avait déguerpi, un mal de tête l’avait assailli sous le coup de la colère —ou de la tristesse, elle ne savait pas trop.

Elle revenait à la réalité, barbouillée de ressasser ces événements peu plaisants. Ses doigts glissaient sur la mousse froide entre ses jambes et le mouvement répété la calmait peu à peu. Le dragon avait raison. Elle apprendrait à s’y faire, après tout, elle s’était déjà adaptée à beaucoup de choses. Dana se relevait en même temps que le dragon et s’étirait. Son corps était courbaturé comme si elle avait passé sa journée a cheval.

« Dana, peut-être que nous sommes liés, peut-être pas. Je n’ai pas tout compris à cette vision que nous avons partagé, mais ce que je sais, c’est que nous devons être courageux. Les temps sont durs et cela ne fait que commencer. De sombres complots se trament de l’autre côté de la mer et nous devrons être prêts quand le moment sera venu… Je te remercie pour les bons soins que tu m’as apportés. Cette… sorcière, il se peut qu’elle ait été un peu trop curieuse, mais son onguent fonctionne à merveille et je dois dire que je suis satisfait. Je dois me rendre sans plus tarder au Tyshar. Quant à toi, n’as-tu nulle part où aller ?
- Penses-tu que nous allons devoir nous battre ? Elle l’espérait presque. Le Tyshar ? C’est si loin… Et trop proche de l’ancien continent, je n’y mettrais pas les pieds si j’étais toi. N’as-tu pas peur que tout ce que l’on a fui se propage ? Prends garde à toi pour ton voyage, ce serait dommage que tu te blesse de nouveau… Je ne serais pas là pour te trainer chez une elfe droguée cette fois. Un rire lui échappait. Non, je n’ai pas nulle part où aller. Je suis bien occupée ici, je vis avec des amis dans une auberge, j’ai même trouvé un travail dans la caserne de la ville. Je pense la quitter d’ici quelques temps, essayer de trouver mes parents. Ils auraient réussi a fuir, encore faudrait-il qu’ils soient bien arrivés. Je vais commencer par chercher ici, puis je ferais le tour des villes côtières et des îles alentours. J’espère bien les trouver... Ou au moins trouver une tombe sur laquelle se recueillir. »

Un soupir passait ses lèvres qui se pinçaient à l’idée d’affronter, encore, la mort d’un proche. L’idée ne la rendait même plus triste. Elle avait plus un goût de déjà-vu. C’était comme une chanson trop chantée ou un plat que l’on avait mangé maintes et maintes fois : on s’en lassait. Danalhéa était lasse de toutes ces morts. Elle était lasse d’être démunie face à cette Puissance supérieure qui prenait tout ce qu’elle désirait en toute impunité. La mort était une Impératrice capricieuse et injuste. Dana s’y était faite.

« Peut être que je finirais au Tyshar, qui sait. Peut-être que l’on se reverra. »



Spoiler:
Revenir en haut Aller en bas
Percebrise
Percebrise
Réfugié(e)
Messages : 1041
Date d'inscription : 05/02/2014
Age : 27
Localisation : Limousin
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitimeDim 24 Fév 2019 - 19:12

Ses yeux, ses cheveux immaculés, les paillettes de lumière sur sa peau claire… Il était fasciné par ce qu’il commençait à considérer comme son “équivalent humain”. Il ne trouvait pas de meilleure appellation : même si elle était en partie issue de lui, ce n’était pas sa fille ; elle ne faisait pas non plus partie de sa lignée -encore heureux, songeait-il- mais ils se ressemblaient beaucoup trop et de toute façon, il était clair qu’ils étaient liées d’une manière ou d’une autre.
Il lui faudrait éclaircir ce mystère, un jour ; mais pour l’instant il avait d’autres chats à fouetter. Des affaires plus pressantes, urgentes, et il devait impérativement se rendre dans le Tyshar.

“J’ai passé mon existence à me battre, et je crois que ce n’est pas près de s’arrêter. Si je suis venu ici Dana, c’est pour une seule et unique raison : trouver une solution face à la menace qui nous guette. Certes, nous sommes plus ou moins en sécurité sur cet archipel, mais plus pour longtemps -je peux le sentir dans mes cœurs, et je fais confiance à mes intuitions. Celles-ci ne sont pas bonnes. Ce n’est qu’une question de temps avant que les forces de Leth, Falion et Naezgar ne se décident à envahir un nouveau territoire. Nous avons déjà de la chance qu’ils se querellent entre eux, mais ce ne sera bientôt plus suffisant. Je refuse de voir leurs serviteurs débarquer à Abyre, corrompre les plus forts et abattre les plus faibles… Pas une fois de plus. Il faut faire quelque chose, et comme j’ai l’impression que personne ici ne semble sensible à notre cause à nous, réfugiés, je ressens en moi le… Le devoir d’agir.”

Ils quittèrent le couvert des arbres pour retourner aux abords de la cité. En traversant le pont, Percebrise repensa à tout ce qu’il avait vécu jusqu’ici et tout ce qu’il lui restait à faire : de nombreuses péripéties l’attendaient, il en était tout à fait conscient ; mais une détermination sans faille l’habitait depuis qu’il avait été contraint d’abandonner son escadrille et ses devoirs, persécuté jusqu’au bout par les serviteurs de Leth, que rien sauf la mort ne pouvait arrêter.
La tâche était lourde et complexe, il était probable qu’elle soit même impossible à accomplir. Il n’avait aucune idée de comment procéder. Y avait-il seulement un moyen plus efficace que la mise à mort pour stopper les forces de cette terrible malédiction ? Quels étaient les plans de Falion ? Et qu’en était-il de Naezgar, le plus méconnu et silencieux des trois fléaux ? Ce-dernier n’avait pas donné de signe de vie ces derniers temps, mais Percebrise savait que Solazur continuait de survoler la frontière des Montagnes Rouges, prêt à avertir son serviteur en cas d’intrusion.
En ce moment, il ne pouvait compter que sur lui-même. Cependant, il ne doutait pas que d’autres comme lui cherchaient à tout prix une solution. Il réservait cela aux grands stratèges et érudits de renommée ; mais s’il pouvait aider à élever les consciences d’une manière ou d’une autre, il était prêt à tout.

De l’autre côté du pont, ils marchèrent encore quelques mètres sans s’adresser la parole. Ce n’était pas un silence empli de gêne mais plutôt une promenade réflective le long des pauvres quais d’Abyre. Une compréhension mutuelle s’était établie entre eux et il trouvait cela tout simplement agréable de se promener en compagnie de Danalhéa sans éprouver le besoin de briser la glace ; leur vision commune l’avait déjà fait. C’était comme s’il se baladait en compagnie d’une bonne connaissance.
Ils s’arrêtèrent là où tout avait commencé : sur un ponton de bois surplombant la surface de l’eau recouverte de nénuphars aux fleurs tendrement rosées, sous lesquelles on apercevait des dizaines de poissons bariolées de couleurs orangées, et de temps à autre une grenouille pressée.

“Peut-être… Peut-être que nous nous reverrons. Fais attention à toi, Danalhéa… Je suis sûr que tu n’oublies pas la menace de l’ouest, et que tu n’es pas du genre à te fier aux apparences. Tout n’est pas si calme à Abyre : le bruit court qu’un groupe d’adorateurs rôde dans la ville. J’ai entendu dire qu’ils vénèrent des divinités déchues. Je ne suis pas du genre à croire en ces sornettes, mais prend garde, car ce sont des fanatiques, et de ce qu’on m’a raconté avant mon arrivée, ils n’ont pas hésité à voler les vies de plusieurs habitants des quartiers sud-ouest. Quant à moi… Il est temps pour moi de continuer mon voyage. Je suis désolée de te paraître si pressé, j’aurais apprécié que nous fassions un peu plus connaissance, mais comme je le répète sans arrêt, et je suppose que tu commences peut-être à en avoir marre de ça, le temps est compté. Je ne te remercierai jamais assez pour ton aide. J’espère du plus profond de mes cœurs que nous nous retrouverons, si le destin le veut bien…”

Il se jucha sur le bord du ponton et hésita un peu avant de se retourner. Il lui donna un gentil coup de museau sur l’épaule puis la salua d’un hochement de tête.

“Adieu, Danalhéa. Puisse la lumière des étoiles éclairer chacun de tes pas, même dans les instants les plus sombres.”

Il s’immergea lentement dans l’eau pour ne pas faire de vague, et fit fuir toute la faune en-dessous de lui : les amphibiens partirent se cacher dans la vase et les poissons s’écartèrent autour, affolés. Il plongea alors complètement, ouvrit le bec et réussit à attraper une grosse carpe qu’il goba aussitôt ; ses épais barbillons lui chatouillèrent l’œsophage. Il décida qu’il emprunterait la voie de l’eau jusqu’au coucher du soleil.

Alors, et sans se retourner, il quitta Abyre et ses quais, en direction de l’inconnu.



(Fin du RP)
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: [Terminé] Le vent du changement (Dana)   [Terminé] Le vent du changement (Dana) - Page 2 Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
[Terminé] Le vent du changement (Dana)
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 2 sur 2Aller à la page : Précédent  1, 2

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
L'Âge de Feu :: Baie d'Astal :: Abyre-
Sauter vers: