Forum de RPG basé sur l'univers de l'Âge du Feu par E.E. Knight
 
Bienvenue sur la Saison 2 de l'Âge de Feu !
Le Deal du moment : -45%
WHIRLPOOL OWFC3C26X – Lave-vaisselle pose libre ...
Voir le deal
339 €

Partagez
 

 ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : 1, 2  Suivant
AuteurMessage
Esprit Solaire
Esprit Solaire
Divin
Messages : 2083
Date d'inscription : 17/12/2010
MessageSujet: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeJeu 26 Déc 2019 - 22:04



l'Audi Gra’R’No


Aucun humain, ni elfe, dragon ou nain n’aurait pu ignorer de quoi il en retournait.

Derrière cette profusion de musique et de chants, de parfums d’épices et de tartes chaudes qui inondaient les rues, derrière ces costumes et ces robes aux couleurs éclatantes qui tournoyaient comme une pluie de fleurs au rythme des musettes. Personne, pas même un étranger, n’aurait pu ignorer la raison de ces odes, récits, ni de ces nuées de lanternes qui s’élevaient dans la nuit.

Ce que les dragons avaient appelé l’Audi Gra’R’No se déroulait la nuit du solstice d’hiver. Autrefois hymne à l’Ère de gloire des dragons, dans la lointaine époque de la Cime d’Argent, c’était également une fête qui exaltait à la fois le passé et l’avenir : on contait les exploits des héros de naguère et les histoires du temps jadis. On se souvenait des morts et on célébrait la vie à travers l’échange, la sociabilité et l’amour dont la chaleur devait chasser la nuit et rappeler le soleil. Et en ce jour où l’altruisme devenait tradition, la violence était plus que jamais prohibée et considérée comme une véritable honte pour tout dragon, et nul ne se serait risqué à faire dans le vilain, au détour d’une cérémonie si mémorable.

Aujourd’hui, le souvenir de cette fête est de retour ! Les elfes des mers ont choisi de retrouver les chants, les fêtes, les lumières, le feu et la boisson pour s’enivrer. Il est également coutume d’offrir des cadeaux aux proches ou de se montrer généreux envers les plus démunis : Il s’agit d’un hommage des plus délicats à une vieille comptine narrant la vie d’un homme, de blanc et de rouge vêtu, qui ayant trop bu durant un soir passait de maison en palais pour offrir un présent à ses hôtes, en échange de leur convivialité.

En cet hiver de 2166, l’Audi Gra’R’No donné à Abyre promet ainsi d’être grandiose !
Comme tous les ans, les maisons Cadwenir, Halitu et Sabal qui se partagent la direction de la ville se sont attribuées les trois rôles clefs pour organiser la fête.
Les Cadwenir sont cette année chargés de la décoration de la ville : partout dans les rues et sur les places publiques ont été dressés des guirlandes de lanternes et d’étoffes colorées, des chapelets de fleurs de toutes les couleurs recouvrent les murs d’Abyre, notamment sur la place du marché et dans les halles qui ont été débarrassées et aménagées spécialement pour l’occasion. Des magiciens habillent les maisons d’illusions lumineuses et tissent une spectaculaire météorologie qui fait pleuvoir des pétales et des confettis dans le ciel de minuit, noyé par l’éclat de la lune. L’aura ouatée des lumières orangées fait resplendir la cité elfique qui se prépare à accueillir mythes et contes, souvenirs et mystères, l’étrange et le prodigieux !.
La maison Halitu, elle, s’est occupée d’approvisionner la ville en nourriture et boisson, de distribuer les vivres et d’organiser les plus somptueux banquets.
Enfin, les Sabal ont programmé les oeuvres de charité qui doivent être menées dans la ville basse ainsi que les différents divertissements, en particulier dans la Chambre de Ningal, une gigantesque prouesse architecturale et technologique servant de théâtre, d’opéra et de salle de réception et qui est accessible par tous, à condition de disposer d’une invitation ou d’une pièce ayant la valeur d’un laisser-passer : en général, il s’agit surtout du peuple bourgeois, des invités de marque et des membres des grandes maisons elles-même. Cette année, une grande mascarade a été proposée par la maison Sabal : au bal qui se prépare à la Chambre de Ningal, il faudra venir masqué...

Au sein de l’Audi Gra’R’No, vous aussi avez votre place ! Voici le moment pour vous d’offrir votre propre Audi Gra'R'No à ceux qui en cette nuit vous entendent ! Fêtez-le à votre manière, en offrant un chant, une histoire ou un spectacle qui émerveillera le regard des passants ! Tout le monde a le droit de participer autant qu’il le souhaite !

Faites preuve d’imagination ! Il ne s’agit pas d’un RP, mais d’un cadeau de votre part au membre du forum, par un texte ou une fiction, par un chant, un poème ou un dessin. Faites-nous rêver ! Sachez également qu’après quelques petites semaines, vous serez invités à participer à d’autres réjouissances que le staff aura préparé pour les persos participants ! (Rien de bien dangereux vous devinez bien… quoique ?)

Bonne chance à tous ! Et qu'en cette fin d'année gronde l’Audi Gra’R’No !


⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ 9o1q


Dernière édition par Esprit Solaire le Sam 4 Jan 2020 - 20:23, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeJeu 2 Jan 2020 - 9:41




«- J’dis simplement que les cambriolages c’est une valeur sûre ! L’un de vous s’est déjà fait prendre dans une maison peut-être ? Non, on est d’accord. Si on est pas suffisamment bête pour se faire voir en entrant alors le tour est joué ! Y a toujours des trucs à prendre dans une maison !

- Ça c’est parce que t’es pas assez rapide pour fuir les gardes avoue.

- Ou simplement le petit vieux qui te coure après

- Oh mais fermez-la !» Râla-t-il en plongeant son nez dans sa choppe dans l’espoir de garder un minimum de contenance.

Autour de la table ses compagnons éclatèrent de rire et tous l’imitèrent en finissant leur bière. Il ne fallu attendre que quelques secondes pour qu’on leur serve une nouvelle boisson, de l’hydromel semblait-il mais peu importait. Ce soir c’était beuverie et comme disait le proverbe: «on ne regarde pas les dents d’un cheval qu’on offre» (ou du moins qu’on vous vend très très peu cher). Ils étaient six accoudés à la table d’une taverne pleine de couleur, de musique et d’alcool et eux même n’avaient rien à envier aux nombreuses parures de la salle et des autres clients: une razzia collective chez différents tailleurs et riches particuliers avait fait l’affaire. Ils s’étaient tous entendus sur un point: rien de mieux qu’une sortie «en famille» pour préparer la grande fête de fin d’année !

«- Bon ! Et si on parlait d’autre chose que de boulot ?

- Mais de quoi d’autre veux-tu qu’on parle ? Répondit la jolie brunette aux yeux doux qui lui faisait face.

- Je n’en sais rien ma chère Colombe... Quoi que... Passe moi cette bouteille tu veux ?» Elle était encore à moitié pleine. «Notre nouveau poussin va nous faire une joie de la finir ! N’est-ce pas ?»

Les voleurs ricanèrent face au visage déconfit du jeune recru. C’était un très jeune garne, encore un gamin, qui avait réussi à s’enfuir d’un bateau pour survivre dans la rue, et sa tête chancelante indiquait clairement qu’il avait déjà largement eu droit à son lot d’alcool. Mais ainsi était la loi pour les poussins: tu obéis ou tu dégages. Malheureusement pour lui les membres confirmés ne se privaient pas d’abuser légèrement de se pouvoir pour s’amuser.
D’un geste hasardeux il saisit la bouteille pour porter le goulot à ses lèvres et entama la descente sous les encouragements de la guilde. A peine eut-il reposé la bouteille qu’il tomba à la renverse en entrainant son tabouret avec lui. La soirée était terminée pour le poussin.

Une longue minute s’écoula avant que le fou rire collectif ne se calme. Personne ne fit un geste pour relever le petit, de toute façon il se serait écroulé de nouveau. On le fit simplement rouler sous la table pour lui éviter d’être piétiné. Il fallait bien préserver quelque peu les apprentis.

«- Ok très bien voilà les règles: on fait tourner la bouteille sur la table, celui qui est désigné doit soit obéir à une action soit boire. Si sa choppe est vide il doit obligatoirement faire ses actions jusqu’à ce que toutes les choppes soient vides. Ça marche ? Parfait c’est parti !»

D’un mouvement souple du poignet qui laissait sous entendre qu’il avait déjà pratiqué ce geste à de nombreuses reprise il mit la bouteille en rotation. Elle tourna sur elle même de longues secondes, passant à de multiples reprises devant chacun des cinq voleurs encore debout avant de ralentir peu à peu pour s’immobiliser devant...

«- Notre chef bien aimée ! Comme par hasard !

- Qu’est ce qu’on va bien pouvoir te faire ?

- Une chanson !

- Bonne idée ! Une chanson pour commencer !

- Haut et fort !»

Ydilianda se claqua le front d’une main. Bien sûr ça devait tomber sur elle dès le premier tour ! Elle jeta un coup d’oeil à sa choppe pleine. Ils l’avaient tous deviné, le but du jeu serait d’économiser l’alcool au maximum pour échapper aux actions les plus humiliantes qui viendraient à la fin. Soit ! Ils avaient voulu commencer par elle ? Elle le leur ferait payer pour les prochains tours !
Elle se leva de son siège, la tête haute, pour dominer sa tablée. Il fallait dire qu’elle se trouvait fière allure dans ses vêtements flambant neufs. Elle portait un bustier vif par dessus une fine chemise blanche aux manches longues et bouffantes le tout bien entendu décoré de multiples rubans colorés qu’elle avait accroché à ses cheveux, à sa ceinture et à ses poignets. C’était une tenue bigarrée mais dans le ton de la fête et, de son propre avis, elle lui faisait ressembler à un pirate. D’ailleurs, cela lui donna une idée de chanson:

«- J'ai quitté ma terre, et cette vie ingrate
Pour partir vers la mer,
Et devenir pirate.

J'ai laissé chez nous, pleurant, notre mère,
Elle séchera ses larmes
Moi je vais changer d'air.

Car je suis parti pour la Grande Aventure
Et à bord d'une frégate
Je m'en vais faire fortune.

Je pillerai des navires comme se doit un pirate,
Je punirai les lâches,
Les pendrai aux cordages.

Je visiterai mille terres sans
attaches,
Je m'y ferai un nom,
Et une image sans tâche.

Pour toi j'affronterai les plus féroces dragons,
Cachés dans les nuages,
Tapis sous les hauts-fonds,

Et quand on chantera mes célèbres carnages
Avec un oeil fané
Et mon air de mirage.

Parti au loin sur les flots déchaînés,
Je voyagerai longtemps,
Puis je te reviendrai.»


Ses compagnons l'applaudirent ainsi que quelques pèquenauds des tables voisines déjà trop ivres pour agir autrement que par réflexe ou imitation. Emportée par son succès (et son début d’ivresse) elle saisit sa choppe et, pour faire bonne mesure, avala une gorgée.

«- He ! C’était pas un chant de Gra’R’No !

- Fallait préciser mon vieux, maintenant fait tourner cette bouteille !» Dit elle en reprenant sa place sur son tabouret.

Le voleur s’exécuta. L’aiguille de verre décrivit de nouveau plusieurs tours avant de désigner de son goulot maudit celui qui avait proposé le jeu.

«- Et merde !

- Ta chance a tourné, elle va se venger.»

Ydilianda, la Pie Voleuse, celle qui avait lancée le pari fou de ramener à la vie la puissante Confrérie des Ombres se permit un large sourire en coin.

«-Tu dois finir ta choppe. Cul-sec.

- Eh ! C’est de la triche !»


Revenir en haut Aller en bas
Erilys
Erilys
Ambassadrice de l'Amour
Messages : 1047
Date d'inscription : 07/01/2018
Age : 22
Localisation : Abyre
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeVen 3 Jan 2020 - 0:14


Ces dernières années de d’indigence vestimentaire avaient fini par creuser en Erilys un furieux appétit de luxe qui se traduisait par le besoin urgent de dépenser son argent en munitions pour sa garde-robe. Si les moyens ne s’étaient pas montrés dès son arrivée à Abyre, les importants services qu’elle avait rendu à la ville avaient plus que considérablement amélioré sa situation, et un tel achat, à condition qu’il soit unique, lui était désormais permis.
La fête du solstice d’hiver était l’occasion la plus sensée de sublimer ses pulsions dispendieuses chez un jeune couturier visionnaire du nom de Basil Logroth. Le jeune elfe, un individu dont le panache aurait fait succomber même les mouches, était aussi papotier que doué dans son art. Lorsque la demi-elfe était venue lui demander conseil pour une tenue de soirée, il avait pris moins d'une minute pour poser ce qu'il appelait un diagnostic avant de demander à son assistante de sortir “l’Amanda” pour un essayage.
« Sachez mon chou que dans le domaine de la mode, je suis un véritable prophète, et je le vous dis : il va y avoir des départs de feu. Cette robe, c’est comme l’épée du prince Arzh. Elle attendait l’élue. Et l’élue, c’est vous.
Basil était le créateur avant-gardiste de nombreuses pièces élégantes, modernes et chères. La tenue qu’il proposait à la demi-elfe était de toute beauté : souple et assez près du corps, couleur ivoire principalement, d’une simplicité étudiée et efficace. D'après lui, les deux tiers des femmes qui l’enfilaient ressemblaient à des gâteaux débordant de crème, un jugement que la demi-elfe trouvait bien sévère.
Alors ? Ne me dites pas que vous hésitez !
Vous êtes sûr que ce n’est pas un peu... audacieux ? demanda Erilys en scrutant son derrière dans la psyché.
Mais bien sûr que c’est audacieux ! s’écria-t-il. Il le faut ! Croyez-en mon expérience, elles vont toutes ressortir leurs robes rouges. C’est tactique, ça va avec la lumière et ça fait du bien au teint. Évidemment, le rouge est une couleur de caractère et ça fait mouche la plupart du temps mais… Ce n’est pas réellement une prise de risque lorsqu’il s’agit d’une tenue de soirée. Vous ne voudriez pas paraître aussi… prévisible ? lâcha-t-il comme s’il s’agissait de la pire des insultes.
Erilys fit lentement glisser ses doigts de sa cuisse à sa taille, dmirant son reflet comme si elle voulait se dessiner. Audacieux, mais pas vulgaire. Et cette robe lui plaisait.
Je la prends, décida-t-elle.
M. Logroth sauta de sa chaise et applaudit.
Ah ! En voilà une décision raisonnable ! Réglons cela sans tarder… Nilnan, défaites-la et emballez-la. Je vous attends dans la boutique.
Entendu.
   L’assistante obéit et mena Erilys derrière le paravent pour l’aider à se déshabiller. Lorsqu’elle fut changée, la demi-elfe fut reconduite vers le comptoir ou patientait le maître des lieux.
Je vous la fais un tiers moins cher, juste pour votre beau sourire, dit-il en lui adressant un clin d'oeil.
C’est gentil de votre part, monsieur Logroth.
Appelez-moi Basil, nous ne sommes plus deux inconnus. Regardez plutôt, j’ai un cadeau pour vous. Celui-là, il est pour vos beaux yeux.
Il se tourna et saisit une boîte en bois qu’il avait sortie au préalable.
Voici, ma Dame, les accessoires ultimes pour aiguiser vos charmes, dit-il en l’ouvrant devant elle.
Le coffret contenait une paire de longs gants en satin noir ainsi qu'un masque couvert du même tissu décoré de perles et de fils d’or.
Vous n’êtes pas allergique au pollen ? Le masque va fleurir dans vos cheveux quand vous le porterez. Et ça, dans un mois, vous en verrez partout. C’est la mode qui vivent.
Fleurir ?
Oui mon chou, des fleurs de vanille.
C'est absolument charmant ! Mais… Vous ne pensez pas que je devrais assortir avec du blanc ou de l’or, plutôt ?
Le couturier la dévisagea sévèrement.
Vous voulez ressembler à quoi ? À une jeune vierge prête à connaître sa première grande déception matrimoniale ou à une femme chic, indépendante et plus sensuelle que les flans transpirants de caramel de Chez Jasmine ? tempêta-t-il.
Le… Les flans, bredouilla la demi-elfe.
Alors prenez-les noirs.
Erilys prit timidement la boîte entre ses mains.
...Comment puis-je vous remercier Basil ? C’est magnifique…. Et c’est beaucoup.
Ses lèvres s’étirèrent en un succulent sourire. Il prit sa main et déposa un baiser sur ses phalanges.
Soyez la plus belle. »

* * *

Le ciel se fardait de la pénombre crépusculaire quand Erilys quitta sa maison.
La ville envoûtée de couleurs résonnait de rires et de chants. Les lueurs follettes qu’abritaient des guirlandes de lampions ornés inondaient les rues de lumière tantôt rouge, orange, rose ou bien violette, diffusant une atmosphère agréable et adverse à toute forme d’hostilité. D’imposants bouquets de fleurs glissaient le long des murs et bordaient les fontaines en se répandant partout dans un désordre sauvage et magnifique, donnant à la ville toute la splendeur d’un jardin babylonien. De temps à autres, des averses de pétales tombaient du ciel sans jamais atteindre le sol.
Mais en admirant ce décor à travers le reflet d’un miroir ou celui de l’eau, on s’apercevait très vite que la plupart de tous ces ornements n’était que des illusions que l’aube brûlerait à son retour. Cela avait néanmoins nécessité des mois de travail de la part de la maison Cadwenir, et il fallait admettre que le résultat était absolument remarquable.

Erilys avait très hâte de sortir. C'était le premier Gra'R'No qu'elle fêtait depuis six ans. Elle mourrait d’envie d’assister aux spectacles qui allaient être donnés à la Chambre de Ningal, d’écouter les récits et les chants aux halles, de croquer dans une pomme au caramel et de goûter aux vins luxueux qu’on avait spécialement importé d’Abylo pour l’occasion. Mais d’entre tous les divertissements, celui que la demi-elfe attendait avec le plus d’impatience était la danse.
La danse faisait partie des activités qu’elle affectionnait le plus, avec la musique et la lecture. De la gigue paysanne aux valses de bal, la demi-elfe était initiée à tout, héritage des différents milieux dans lesquels elle avait vécu durant sa longue jeunesse. Lorsqu’elle vivait encore à Skerlida, danser avec des inconnus était une autre maigre source de revenu pour elle – bien qu’un nombre incalculable de goujats et autres diplômés en muflerie se fusse plutôt fait inspecteur de la rondeur de son derrière que danseur hors pair. Ce soir cependant, la piste sur laquelle elle allait évoluer était bien différente des petits cabarets et des tavernes miteuses dans lesquelles elle avait l’habitude de se produire.
Selon le programme, le Grand Concert qui précédait le bal accueillaient des artistes de grande renommée mais aussi quelques talents locaux dont Erilys faisait partie. Si la demi-elfe avait été très excitée à l'idée de se produire sur une si haute scène, elle avait en revanche été très déçue de se faire imposer un titre aussi mièvre sans qu’elle eût pu avoir son mot à dire, à croire qu’on la réduisait encore à l’état de princesse exemplaire à la fadeur générique.

   De loin, la Chambre de Ningal ressemblait à une basilique de verre et de lumière d’où s’évadaient des rayons d’or et des éclats de couleurs fugitives que renvoyaient les robes des Dames à l’intérieur. Quand Erilys pénétra dans le hall, elle sentit instantanément le poids d’une dizaine de regards peser sur elle. Elle faillit se laisser rougir d’embarras et, pendant un court instant, se trouva provocante et détestable dans cette robe d’une couleur qui se fondait dans son teint et la faisait paraître nue au milieu de cette Versailles d’or et de glaces.
Respire, ma chérie. C’est le plafond haut qui te donne le vertige. Tu n’es ni une aguicheuse, ni une putain. Tu es un modèle de classe, de modernité et de distinction, pas un gâteau à la crème. Et puis une petite piqûre de narcissisme ne te fera pas de mal. Fais confiance à Basil Logroth. Tu n’es pas un gâteau à la crème.
La demi-elfe compta jusqu’à trois en inspirant et en expirant, puis fit fleurir un sourire printanier sur son visage.

* * *

« La maison Sabal a le plaisir d’accueillir une demoiselle, une étrangère dont la conduite exemplaire et les immenses services rendus à la ville lui ont valu d'être reconnue citoyenne d'Abyre par notre grande maison elle-même. En effet, son aide précieuse a permis d’arrêter Hybria Halitu, Iaranlei Cadwenir ainsi que leurs semblables sur ces sordides affaires de disparitions et de cannibalisme qui ont souillé notre noble cité et mis en péril la vie de tous ses habitants. Nous pleurons encore les victimes de cette tragédie, et c’est en leurs noms que la maison Sabal lui renouvelle ses remerciments pour avoir dévoilé à Abiumummat ces crimes infâmes... »

Ce fut à ce moment qu’Erilys comprit la raison de son invitation par les Sabal à la Chambre de Ningal, et elle en fut réellement blessée : sa présence n'était qu'un prétexte pour rabaisser les maisons Cadwenir et Halitu en ressuscitant cette histoire de meurtres qu’elle aurait elle-même préféré oublier à tout jamais. Mais au fond, n’aurait-elle pas dû s’en douter ? Les mondes des gens pourris par la richesse et les titres étaient toujours bâtis sur des mensonges et des cimetières.

«...Mais si cette elfe brille par ses exploits et son attitude distinguée, elle brille également par sa musique qui fait le joyau de l'établissement de la Feuille d'Argent. Un talent dont s'est épris Aezhenn Anavel Sabal, le mélomane et spécialiste en musique de notre noble famille, dont il loue la simplicité, la pureté et la clarté de la voix. Applaudissez mademoiselle Erilys, qui va nous jouer une très célèbre et indémodable chanson d’amour : La Muse ! »

Erilys salua l’assemblée en cachant superbement ses tremblements au prix d’un déchirant effort. Elle s’installa à la harpe et respira plusieurs fois en fermant les yeux, mais même après plusieurs secondes, elle ne se sentait toujours pas prête. Elle décida d’abord d’improviser à la harpe sur la mélodie initiale et d’y ajouter quelques vocalises avant d’entonner cette chanson dégoulinante de sucre et qui dissonait parfaitement avec le discours précédent.

Il était un étang au creux vert d’une sylve
Et un elfe poète, dont l’encre était de sève
Mais sans muse sa plume n’enchantait pas un mot
Et chaque soir résonnaient ses soupirs vespéraux

La mémoire engourdie par ses rêves dissipés
Il descendit au lac, comme à chaque matinée
une source si claire, si tranquille et fragile
Qu’un simple courant d’air suffisait à troubler

De ce sanctuaire secret, abri de ses trésors
Il était le gardien, comme le dragon et l’or
Quand soudain il perçut un mouvement sur l’ondée
Le poète incrédule, scruta les yeux plissés

Un bourgeon éclata la coquille de langueur
Qui s’était formée tout autour de son coeur
Lorsqu’il découvrit dans le miroir de l’eau
Le reflet d’une nymphe qui fit trembler ses os

La Dame sans nom avait une peau d’ivoire
Des cheveux de soie roux, et la grâce d’un renard
Des lèvres et des sourcils au pinceau dessinés
Et ses yeux opalins occultaient des secrets

La nymphe qui était elfe lui demanda son nom
Il répondit du sien, fit la conversation
Le poète appris lors qu’elle était juste née
Du saule centenaire que le lac abreuvait

Le bourgeon en son coeur grandit en une fleur
Dans son nectar il trempa la plume
au bout de laquelle il fit germer
Des gouttes de poésie.

Après s’être grâcieusement inclinée devant des spectateurs qui semblaient la regarder avec des yeux de poissons, Erilys s’enfuit de la scène.
Revenir en haut Aller en bas
Nirfäel
Nirfäel
Barde Seigneurial
Messages : 874
Date d'inscription : 20/08/2012
Age : 28
Localisation : En train de composer, que diable !
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeSam 4 Jan 2020 - 20:43



Il fut conté au lendemain de cette soirée que le Cabaret de l’« Hirondelle du Vent » n’avait jamais accueilli un tel cortège, un tel monde, un tel grouillement, une telle popularité en ses grands et élégants murs couverts d’hellébores, de jasmin, de mahonia et de viorne. La nuit du Gra’R’No avait transformé Abyre en un bouquet de récits dans lequel des roses de légendes, des daphnés de mythes et des camélias de contes virevoltaient avec l’assurance d’un roitelet huppé, qui jamais ne souffre la fatigue, pas même la nuit, promis, lorsque de gais arabesques dans le ciel il lui fallait tracer. Ainsi, le pinceau des chants rencontrait les milles et une couleur de la cité des eaux, ses tavernes ambrées par les flambeaux chaleureux des torches, par l’opulence lustrée de l’efflorescence, d’un ciel de minuit bleu céruléen s’accaparant l’émerveillement des yeux, tandis que les oreilles convoitaient le murmure d’une voix. Les quartiers chérissaient cette soirée avec entrain et on pouvait entendre dans les avenues des hautes sphères les éclats de rire des gens, le sifflement strident des feux d’artifice tout de couleur vêtus, et l’opéra des conversations, riches et endiablées. Comme si l’écho d’un cœur-monde battait le rythme d’une musique entêtante à travers les palais et les tavernes de rues.

Mais comme de juste, c’était bel et bien l’Hirondelle du Vent qui attirait la foule dans le coin. Bien loin des cabarets traditionnels, elle prenait plutôt des airs de villa avec deux grands jardins symétriques face à un portail faisant la longueur d’un draque quasiment adulte, et dont le blason de métal fièrement tamponné sur les deux battants formait la-dite créature, dans une posture pleine de gloire, exigeant l’admiration, la gueule ouverte et menaçante alors que sa longue langue serpentine en formait la serrure. Ils étaient des centaines du haut-monde, humain comme elfe, à pénétrer dans son enceinte : des courtisans, des chefs de maison, des combattants, des barons, comtes et comtesses, flagorneurs et flagorneuses, flirteurs, cavaleurs, coureur, adorateur, jurés et juges. Ils étaient tous là à faire des bras et des jambes pour se frayer un passage et atteindre la scène que tous rêvaient d’atteindre, sinon par la présence, par l’ouïe. Là-bas, les devantures de plusieurs étals et les façades en bois d’œuvre couleur bordeaux du cabaret étaient tapissés de lierres et de guirlandes de grigri et d’effigies de marbres. Des lucioles d’or et d’argent dessinaient des volutes dans l’air, s’agitant au gré des illusionnistes, se déridant, se gondolant, se tordant dans tous les sens, luisant pour la plaisanterie quotidienne d’une soirée exceptionnelle. Des enfants couraient autour tâchant de les attraper de leurs petites mains, et des ombres ouatées surgissaient en de vives silhouettes sur le sol pavé impeccable.

Ce dernier également n’était propre que par, ô étonnement, un peu d’illusion :

-Pensez-vous qu’il va venir ? était une phrase qui émouvait bien des lèvres et occupait bien des esprits.
-Va-t-il veniiiiiiiiiiiiiiiiiir ? Ouiiiiiiiiiiiiiiiii ?! se demandèrent en cœur un groupe de courtisane assise devant une belle table de cérémonie où se vidaient quelques victuailles.
-Mais enfin c’est évident ! s’exclama la voix d’un nain en armure lourde, manifestement fantassin de Gullvirki. Ils ne rateraient cette occasion pour rien au monde de s’afficher.
-Mais les dernières nouvelles indiquaient pourtant sa mort à Skerlida. Un massacre y a eu lieu, un pogrom contre les elfes et les nains !
-Racontars de sudistes que cela ! fit un homme de haute stature et dont la cape richement parée indiquait son appartenance à la noblesse. Je l’ai vu à Ceannad il n’y a pas deux semaines et il se portait comme un charme. Sa chanson des « Frères farfadets de nations en goguette » ne m’a pas paru sortir d’une pâle copie de son génie.
-Eh bien peut-être que vos oreilles n’étaient plus ce qu’elles étaient mon bon ami, répliqua un elfe des mers dont les yeux couleur de l’ocre ne masquait point son mépris. Peut-être que les racontars de Sudistes les ont endommagés pour sûr. Peut-être faudrait-il consulter ?
-Et peut-être que je m’en tamponne le coquillard des sottises d’un coquet de Sabal ! Vous y avez pensé ?
-Allons allons ! héla un bouffon en costume qui venait vers eux, des lucioles éclaircissant les rangs derrière lui. Calmez-vous donc ! Aujourd’hui est un jour particulier, messires, l’auriez-vous oublié ?
-Notre mémoire est bonne, maître railleur, fit l’elfe aux yeux d’ocre. Notre mémoire est excellente même. Elle se souvient que tous les peuples sont aujourd’hui en paix, que cette fête est importante. Elle se souvient aussi du sang. Du sang des elfes, versé en offrande à la folie de Skerlida. Cela aussi, nous nous en rappelons.

Une elfe près de lui, sa compagne sans doute, prit sa main pour la joindre à la sienne. Elle s’accrochait à lui tel le voilier d’un mât, lui indiquant la direction du calme qu’au fond, lui aussi voulait retrouver. Des couleurs, un clignement des yeux, et les deux elfes s’embrassèrent. La dispute s’arrêta là, car le nobliau, certes homme à vouloir chercher querelle, détourna aussitôt la tête lorsque sur la scène, le spectacle de quatre danseuses musiciennes elfe survint sans prévenir. Une chorégraphie de mouvement commença, au plus grand plaisir de la foule agglutiné sur les gradins et dans la cour. Le son des ouds, cellos et tamburas s’éleva dans le cabaret, dans la nuit folle. Les gens rirent, dansèrent à son rythme. Puis à la fin de la danse, l’une des elfes se jeta vers l’avant, leva le bras vers le ciel, psalmodia et écrivit en lettre de feu : « Que gronde l’Audi Gra’R’No ».

Quelques minutes seulement et d’immenses ailes de chauves-souris vrombirent dans le ciel, bousculant les nuages, la brise du soir, la transformant en un raz-de-marée d’air frais qui ébouriffa les cheveux et renversa des chaises. Des humains peu connaisseurs de cet évènement crièrent, s’énervèrent, se questionnèrent. Car ils étaient là, ils grandissaient à vue d’œil, leurs écailles d’obsidienne comme d’or et de rouge scintillant, ou passant par des camaïeux de jade et d’azur : Les dragons grondèrent. Quelques sœurs du feu effectuèrent un ballet dans le ciel avant d’agripper leurs griffes aux statues de marbre du cabaret répondant à l’appel. Ils étaient venus nombreux sur la place. Certains elfes des mers s’inclinèrent à leur approche :

-Va-t-il veniiiiiiiiiiiiiiiiiir ? Ouiiiiiiiiiiiiiiiii ?! se demandèrent en cœur le groupe de courtisane désespérée.
-Cela ne devrait plus tarder ! s’exclama le nain. Attention mesdames faites place à un joyau de la musique. Ce brave a affronté les Nepprandirs et éveillé d’antiques puissances à la simple aura de son luth.
-J’espère qu’il ne va pas passer par les cabrioles habituelles pour se présenter, ne pas multiplier les barbaries estourbissantes ! Il s’agit du Gra’R’No tout de même, il faudrait un peu de solennité.
-Oooooooh je ne serais pas de cet avis. Sa seigneurie apprécie de décevoir par son insolence…
-Regardez ! Le voilà !
-Le barde seigneurial !
-Oh oui je crois que c’est lui, mais… Comment ?
-Il vieeeeeeeeeeeeeeeeeeent ! Ouiiiiiiiiiiiiiiiiii !

Et il vint effectivement.
Toute la crème d’Abyre applaudit l’arrivée du barde. A peine apparu, le demi-elfe dégrafa son manteau couleur violine et le jeta dans un geste théâtral. Le pied posé sur le parquet de la scène, il se jeta au devant de la foule et fit ce que l’on attendait de lui : cabrioles et glissades s’enchaînèrent de manière loufoque et ridicule, imitant un coq jamais n’ayant partagé son couic avec une poule, pondérant ses mouvements de saluts plein d’emphases grandiloquentes. Les dragons eux-mêmes cessèrent de rugir, se demandant ce qui ici-bas sur terre pouvait provoquer une telle folie chez quelqu’un. Cet audi Gra’R’No commençait bien étrangement :

-Salut à vous ! Oui, salut à vous, mes ouailles et mes seigneurs ! Epargnons-nous le tintamarre des violons, trompettes et sonneurs ! Accueillons-nous tous comme de grands amis, car aujourd’hui, oui aujourd’hui, gronde la Féroce cérémonie !

La foule rugit comme un seul être. Le tintamarre, en effet, n’aurait su s’accorder d’instruments plus bruyants. Nirfäel tendit l’oreille dans leur direction avec espièglerie :

-J’entends
Ma foi
Trépignant
En joie
Que de beauté
Ca se voit
Que d’affabilité !
Tout en émoi
Je suis,
Que tous soient là
En ami
Pour m’entendre moi !

Il s’inclina, puis salua encore avec de grands gestes. Les membres des maisons, les elfes des mers et les humains, hilares, applaudirent. Le barde déclara ensuite :

-Et maintenant, mes bonnes gens ! Je m’en vais vous conter une ballade. Pas une sur des héros d’antan ou des légendes, bien non ! Il s’agit d’une ballade ni plus ni moins que sur nos grands invités ailés de ce soir, les dragons ! Nonobstant, malgré tout, toutefois, cependant, je dois vous avouer que mon histoire parle bien d’un héros aux belles ailes de blanc ! Il s’agit d’un grand de ce monde, d’un guerrier qui inspire, d’un héros que des dragonnelles feraient rugir. Oh oui, il serait bien ronchon d’entendre tout cela, il rognonnerait même, ce petit barbon ! Mais il est un orage inspirant, une foudre marcheur ! Et je m’en vais vous conter ce soir nos aventures d’antan.

Les dragons crachèrent leurs flammes au-dessus du cabaret, plus d’impatience que d’excitation, attendant la chansonnette, car ils avaient hâte de retourner à leur vol dans la nuit. Mais la simple curiosité les avait captés et ils attendirent malgré tout que les applaudissements s’achèvent. Alors le barde devint plus cérémonieux, son expression plus grave. Il prit son luth, le tint bien contre lui, commença à jouer quelques accords. Un rythme vif et entraînant s’ensuivit qui répondait à une brise fugace. Puis il chanta :

«Dans les lointaines contrées d’Aurvangar
Composait, votre serviteur, son art
Lové dans une clairière fort animée
Au milieu de ses résidents entichés

Vint alors vils coquins bien vilains,
Me voulant douleur, se prenant bien malins
Mal leur en fut pris, Destin perdant
Fut ma surprise, l’éminent dragon blanc

Percebrise, Percetonnerre, Percenuage
Papillonnait son nom, ses ailes, son courage
D’argent était ses griffes, d’or était son cœur
Lié déjà à une dulcinée, Ô, battant tapageur

Son âme toute entière tendait à retourner
Vers les montagnes du Haut Nord, où elle l’attendait
Gracieuse dragonnelle de brume, l’amour, elle aussi portait,
A regarder dans les nuages, elle cherchait son bien-aimée

Rose légère, Princesse d’un instant envoûtant
Douceur d’un papillon flamboyant
Bleu d’azur, est son regard amouraché
De désir, son vol en a charmé

Alors le Blanc partit de cette terre pleine de vie
S’en allant avec son barde et fier ami
Au devant du danger, combattre les démons
Suppôt de Leth, la maîtresse des lapidations

Ils passèrent au-dessus des cités civilisés
Trésors, pierreries et joyaux, ils ont laissé
Car sentier, chemin, route, pistes et layons
Les amenaient chaque jour plus près de leur destination

Ainsi, ils arrivèrent en les noires frontières
Au seuil du Royaume où chassaient des dragons amers
Là, le Roi Blanc, glorieux et bellissime, affrontait
Les rivaux qui, sur son chemin, se dressaient

Des cieux furent leur réunion
Heureux de se retrouver, les deux dragons
Qui s’en allèrent au-delà, dans le désert
Pour y établir leur royaume, d’une Vie prospère. »



Sa voix se tut et il n'y eut plus rien. On entendait à peine le vol de quelques cormorans dans le lointain. Nirfäel leva les deux bras au-dessus de sa tête, les fit se croiser, descendre lentement tandis que son pied gauche se reculait pour effectuer la révérence. Puis le barde se retira de la scène.
Revenir en haut Aller en bas
Syobhan
Syobhan
Capitaine de la Garde d'Abyre
Messages : 271
Date d'inscription : 28/03/2019
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeSam 11 Jan 2020 - 18:00

Cela faisait combien de temps que les Elfes des Mers s’étaient mis à fêter le Gra’R’No ? cinq, six ans ? Jusque là, Syobhan avait toujours l’honneur et le privilège de célébrer le Gra’R’No mais cette fois la chance avait tourné et voilà qu’elle se retrouvait de garde. Il faut dire que ce genre de festivités impliquait de devoir prendre quelques précautions, car c’était le moment idéal de passer à l’acte pour les fripouilles en tous genres. Nombreux étaient les litiges, souvent causés par des individus trop alcoolisés pour être capables de raisonner. Les autorités de la ville avaient donc cette fois encore pris des mesures de sécurité afin de conserver un semblant d’ordre dans l’atmosphère festive qui planait sur Abyre. Pas trop non plus, car le but n’était pas d’inquiéter les habitants mais bien de relâcher la tension qui s’était abattue sur eux depuis que la nouvelle sur les Nepprandirs s’étaient répandue. Des groupes de gardes - une simple paire dans les endroits peu fréquentés, mais jusqu’à six ou sept dans lieux de passage - avaient été postés aux quatre coin de la cité et même en dehors des murs. Des rondes avaient également lieu dans les rues et partout là où le peuple célébrait le Gra’R’No, en particulier la Chambre de Ningal, et sur les plus grandes places où des estrades avaient été installées.

Ce soir donc, elle ne portait pas de belle robe de soie filée de broderies raffinées ; pas de gants en lin épais ni de beaux chaussons et encore moins de bijoux. Elle était juste affublée de son armure et, aux côtés d’Iranir, gardait l’une des entrées ouest de la ville, qui donnait sur un embranchement du fleuve relativement calme, avec un long ponton qui longeait les remparts et une ribambelle de nénuphars flottant sur l’eau, immobiles. Sa présence ici n’était pas due au hasard. À l’origine, elle s’occupait de garder l’entrée de la Grande Bibliothèque quand un de ses officiers était venu la prévenir qu’un groupe d’humains aux allures suspectes avait tenté de pénétrer de force dans l’enceinte de la ville en voulant s’affranchir des règles de sécurité, à savoir la fouille de leurs sacs. L’un d’entre eux visiblement assez atteint avait alors tenté d’agresser un garde et ce-dernier, après être parvenu à maîtriser la situation, avait fait parvenir un message à sa supérieure. Iranir et Syobhan avaient alors décidé de laisser leur groupe de quatre en charge de la bibliothèque - de toute façon le coin était calme et l’on pouvait largement se passer d’eux - et de prendre la situation en main. Ils s’étaient rendus sur place et Syobhan avait forcé la fouille de tous les sacs pour mettre la main sur ce que les trafiquants avaient voulu cacher : du laudanum, et pas qu’un peu puisqu’ils avaient saisi pas moins de dix-huit flacons éparpillés dans les affaires des margoulins. Syobhan s’était fait un plaisir de les mener jusqu’aux baraques où ils seraient mis en geôle pour cette nuit jusqu’à-ce qu’on se charge d’eux dans les jours qui suivraient. En voilà quelques-uns qui ne passeraient pas un bon Gra’R’No.

Cette intervention n’avait nullement gâché le plaisir de Syobhan. Au contraire, elle était ravie de s’être déplacée en bordure des quais, certes pas les plus salubres, mais ravissants et calmes. La compagnie d’Iranir et des deux autres gardes lui apportaient un certain réconfort car, même au milieu de toutes ces belles couleurs et de la bonne humeur que dégageait la ville, un voile de nostalgie planait sur son coeur. Elle pensait à Tyre, son île natale, et à sa mère devenue presque muette qui végétait dans la demeure familiale avec pour seule compagnie les domestiques et un personnel de cuisine laconiques. Son premier Gra’R’No, Syobhan l’avait passé là-bas. Pour l’occasion, Tyre s’était parée des couleurs du pavillon Eskiagès. Syobhan revoyait encore les petits fanions rouges et argentés suspendus aux toitures ardoisées dans la ville. Cette année-là, elle avait obtenu une permission pour passer trois jours chez sa mère et pour une fois la visite n’avait pas été désagréable puisqu’elles avaient pu échanger quelques mots, à croire que le Gra’R’No lui avait temporairement rendu sa joie de vivre.
Oui, c’était là-bas qu’elle aurait préféré être en cet instant, même si elle ne se sentait pas non plus mal à l’aise ici.

“Et vous du coup, il s’est passé quoi en haut ?” demanda le premier garde, qui avait contacté Syobhan pour l’informer sur les trafiquants.
“En haut ?” Iranir regarda dans le vide un instant. “Pas grand chose. Ça a bien commencé dans la Chambre de Ningal. À l’auditorium aussi. Sinon, il y en a partout dans les bars et les rues. Ça foisonne encore plus que l’année dernière et celle d’avant.”
“Pour une fois que les dragons nous apportent quelque chose de bon.” siffla le deuxième garde en fumant sa pipe. Il n’était pas censé avoir le droit de fumer mais pour cette fois elle ne dit rien - elle savait de toute façon que bon nombre de ses soldats transgressait ce genre de règles et elle ne pouvait pas toujours leur en vouloir.
“Oh tu pourrais arrêter d’être ronchon deux minutes” le rabroua le premier garde. “Il n’y a pas que ça de bien qu’il ont apporté. Ils commercent avec la ville, partagent leur savoir avec nos savants les plus éminents et en plus de ça ils en jettent tellement que ça a même apporté un peu plus d’ordre dans les rues.”
“Je suis de cet avis aussi” ajouta Syobhan qui s’amusait à plonger la pointe de sa rapière dans l’eau pour attirer les carpes les plus curieuses. Les poissons suivaient le tracé aléatoire de la lame et la Capitaine s’amusait à les faire tourner en rond au risque de les écorcher.
“Alors Capitaine, vous allez nous faire l’honneur d’une petite chansonnette pour l’occasion ?” plaisanta le premier garde.
“Respecte-moi, Azraïl.” répondit Syobhan avec un sourire en coin, sans cesser de tourmenter ses poissons.
“Oh allez, faites pas genre ! Vous avez déjà fait la démonstration de votre voix y’a quelques années. Paraît que c’était pas si mal en plus !”

En effet, c’était le cas. C’était même au troisième festival du Gra’R’No et l’expérience ne s’était pas avérée aussi désastreuse qu’elle l’avait envisagée, même si clairement, on avait entendu mieux. Elle avait été prise de court puisque les invités avaient exigé d’elle une chanson alors qu’elle n’avait pas l’étoffe d’une artiste, encore moins d’une chanteuse. Elle les soupçonnait aussi d’avoir voulu l’humilier elle pour leur propre divertissement mais elle s’en était étonnamment bien tirée.
“Disons que je chante juste.”
“C’est déjà ça” grogna le deuxième garde, qui manqua de s’étouffer avec la fumée de son cigare.
“Bah alors ? Vous devez connaître une petite ballade Tyrienne ou quelque chose dans le genre non ?” insista Azraïl.
Iranir lança un regard en coin à Syobhan, l’air de dire “Pas la peine de les écouter.” Mais Syobhan, dans un élan de témérité, voulut jouer le jeu. Alors elle se racla la gorge et, sous le regard satisfait et expectatif des gardes et l’air intrigué de son compagnons, les premiers vers d’une étrange chanson s’échappèrent d’entre ses lèvres.

Nous sommes si vieux, aussi vieux que la lune
Sortis de l’océan, qui fut notre demeure
Un jour nous reprendrons ce qui nous revient
S’wae Asaï Siladin, le grand dôme céleste

Nous, Enfants de la Lune
Notre voyage vient de commencer
Nous sommes les Enfants de La lune
Le temps est venu pour nous de s’en aller

A travers les âges, des rêves, des roues, des rois ailés
Nous avons contemplé le ciel nocturne, et même par-delà
Prié, brûlé et sacrifié
Pour l’amour et la paix, Asaö’dre Mirumarbor

Nous, Enfants de la Lune
Notre voyage nous emmène là-bas
Nous sommes les Enfants de la Lune
Un jour notre ère renaîtra

Notre voyage a commencé
L’heure est venue pour nous de rejoindre le ciel
Alors aux cieux, nous monterons.
Et nous deviendrons les enfants du Soleil

Nous, Enfants de la Lune
Notre voyage vient de commencer
Nous sommes les Enfants de la Lune
Le temps est venu pour nous de s’en aller

Elle avait terminé, mais sa bouche était restée entrouverte. Son regard s’était perdu sur les nénuphars.

“D’accord…” dit Azraïl avec hésitation. “Je dois avouer que je ne m’attendais pas à ça. D’où est-ce que ça vient ?”

En réalité, Syobhan n’avait jamais su d’où venait cette chanson. C’était son père qui l’a lui avait apprise. Elle se souvenait que sa mère n’avait pas forcément apprécié cette initiative. Il fallait dire que la chanson, plutôt courte, avait de drôle de sonorité. Syobhan l’avait trouvé presque dérangeante la première fois qu’on la lui avait faite écouter, puis elle avait fini par apprécier le côté mystérieux qui s’en dégageait. Elle fit la moue pour lui signifier qu'elle n'avait aucune idée de l'origine de ce chant.

“C’est quoi cette langue ? Du vieil elfique ?” demanda Iranir, qui fronçait les sourcils.
“En fait, je ne l’ai jamais su. C’est mon père qui me l’a apprise quand j’étais très jeune. Une fois il a laissé sous-entendre que c’était de... de l’eynir.”

Cette déclaration sembla étonner tout le monde sauf Syobhan.

“Après, je n’en sais rien. Tout ce que je connais de cette chanson, ce sont les paroles.”
“C’est étrange que tu aies pensé à ça. Ça ressemble à une prophétie.”

La Capitaine haussa nonchalamment les épaules.
Revenir en haut Aller en bas
Esprit Solaire
Esprit Solaire
Divin
Messages : 2083
Date d'inscription : 17/12/2010
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeDim 12 Jan 2020 - 19:09



⊰ Dragons et débauches ⊱

⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Vhqu

Dans leur vieille enfance, les elfes des mers ont souvent entendu conter cette histoire ; L’histoire d’une place magique dans les hauts-quartiers de la cité, d’un lieu avec des spectacles somptueux où des rayons de couleurs illuminent le ciel, clignote, scintille, passe du clair à l’obscur, de vitraux brillants tel des cascades de diamants, de statues d’or et d’argent baignant de leur ombre l’allégresse des convives.
Dans leur enfance, jamais aucun elfe des mers ne crut à cette histoire.

Puis ils trouvèrent la Place du Dragon Farceur.

En ce Gra’R’No, la soirée y bat son plein ! Les festivités enchantent les rues et leurs passants. Les dragons volent et crachent des flammes crépitantes dans le ciel qui couvrent la nuit de longs draps rougeoyants. La ville n’est pas en reste et le son des musiques et verres qui s’entrechoquent résonnent dans les quartiers. Mais peu à peu, les gens quittent les tavernes et les cabarets, les navires s’amarrent et les quais se vident. Car bientôt, minuit va sonner et oui bientôt, le grand bal de la Chambre de Ningal allait commencer. Mais pas tout de suite ! Tout vient à point à qui sait attendre. Toutefois, attendre est un bien grand mot, car la Place du Dragon farceur est dans une telle effervescence que nul ne peut souffrir de la faim ou rester solitaire. Encore moins rester sobre, car personne ne va jamais nul part sans un verre à la main.

Le dragon farceur s’en charge pour vous !

⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ G0mg

Du nom d’elfe qu’il s’est lui-même approprié, TeRcáïl, le « héraut de l’ivresse », il s’agit d’un dragon de petite taille, svelte et à la silhouettes de long serpent, festoyeur, bien malin, très joueur, pas trompeur, quoique peut-être, qui ne va jamais sans porter des pintes au travers de la foule pour égayer les sens. Ecarlate, incarnadin, cramoisi, d’une incandescence érubescente sont ses écailles, dont on ne sait si leur couleur vient d’une pigmentation naturelle ou d’un aveu bien voyant de son appétit d’ébriété. Mais gare à celui qui refuse un verre à ses côtés, car TeRcáïl est un être capricieux qui vous fera passer au-dessus du bar pour vous faire essayer de force des bouteilles au contenu bien inconnu à l’ensemble des habitants de la ville !

Alors, chers amis, qui que vous soyez, rois, mendiant, duc, brigand, marchand, servant ou chevalier, vous ne pourrez y échapper ! Allons, jetez-vous à la mousse. Dansez, riez, buvez et amusez-vous ! Mais dans quel état serez-vous ?

Jet de dés:

Résultat du jet d’Ydilianda = 25 : « L’ébriété n’est pas un chemin ardu.»
Le premier verre est passé très vite, sûrement dû à la présence des compagnons d’Ydilianda qui l’encouragent à faire la fête. Mais le second lui a été apporté par TeRcáïl lui-même, une étrange mimique apparaissant sur la jointure écailleuse de son museau : un sourire ? Sûrement pas, les dragons ne sourient jamais n’est-ce pas… ? Pourtant, ce verre-là est fait avec un alcool que la voleuse ne connaît pas. Eh ! Si les gens boivent cette mixture, il est peut-être temps de partir en chasse de leurs petits trésors, non ?

Résultat du jet d’Erilys = 29 : « Être sobre ou ne pas être sobre, tel n’est point la vertu. »
La tête tourne à la demi-elfe. Le petit dragon serpentin s’est glissé derrière elle et fait apparaître devant ses yeux non pas une pinte, quelle noble dame tomberait dans une telle débauche, mais une petite tasse en porcelaine dans laquelle un liquide couleur lie-de-vin brille de milles joyaux. La demi-elfe le boit sans hésitation. Mais qu’est-ce donc ? Pas d’importance ! Il est de temps de chanter et de rire !

Résultat du jet de Nirfäel = 21 : « Euphorie-Gaga »
Occupé à se repoudrer et à se couvrir le visage d’un masque maquillant le rendant plus blanc que crème, le barde est sorti bien en retard du cabaret de l’Hirondelle du vent, honte à ce sacripant ! Qu’à cela ne tienne, TeRcáïl l’a repéré de loin avec sa barbiche de bouc et ses cheveux blancs. Il descend élégamment de son perchoir, une lance de marbre d’une statue de cavalier, et lui tend de sa patte griffue deux pintes remplies de bières d’Aurvangar. Rien de mieux qu’un peu de nostalgie, non ?

Résultat du jet de Syobhan = 44 : « Qu’il est beau l’éléphant dans le ciel ! »
Aïe ! Voilà qui n’est pas de chance pour la capitaine d’Abyre. Est-ce que les verres étaient trop grands ? Ou peut-être TeRcáïl a un faible pour les elfes en uniformes ? Quoiqu’il en soit, les verres descendent, parfaitement, incroyablement bien vidé, et l’alcool frappe fort, montant à la tête, dévoilant des images dans l’esprit de Syobhan. Il y a de grandes chances que les prochaines danses inventent une nouvelle mode !
Revenir en haut Aller en bas
Erilys
Erilys
Ambassadrice de l'Amour
Messages : 1047
Date d'inscription : 07/01/2018
Age : 22
Localisation : Abyre
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeDim 19 Jan 2020 - 0:31


   Erilys quitta la scène les poings serrés. C'était loin d’être le spectacle qu'elle s'était imaginée, et pourtant, quelque part au fond d'elle-même, elle savait que cette mauvaise surprise n'en était pas vraiment une. Sa présence à la chambre de Ningal n’avait été qu’un prétexte pour alimenter la concurrence entre les trois maisons qui se disputaient la préférence et la confiance des citoyens. Les gens se fichaient bien qu’elle ait eu du talent ou non, et il était probable, pour ne pas dire évident, que le critique Aezhenn Anavel Sabal n’ait jamais eu l’intention de l’inviter au Grand Concert en tant qu'interprète.
   Personne ne la retint lorsque, passablement vexée, la demi-elfe décida de quitter les lieux pour prendre prendre l’air loin de ces charognards cousus d’or et des blasons trop éclatants. Elle ne reviendrait que pour le bal de minuit, décida-t-elle.
   La demi-elfe se glissa sur le côté, longea les rideaux et avança lentement vers la sortie, esquivant ainsi invités et banalités. Sa progression la conduisit fatalement jusqu’au buffet. Viandes rôties, pintades au four, brochettes de calamars, filets de daurades grillés et même du poisson perroquet : des mets luxueux aux mille et une saveurs trônaient sur les tables en obéissant à une architecture qui contredisait les lois physiques établies par les savants des siècles passés. Parmi eux, Erilys reconnut des oeufs d’Ysiomas, ceux que Dame Hybria appréciait tant. Elle réprima un frisson et détourna le regard. Non loin, un invité vêtu d'une tunique blanc cassé bouffante et d’une bedaine impeccablement ronde s’offrait un tête-à-tête avec un gigot plus large que ses propres cuisses. La vision de cette pulsion carnassière acheva de couper l’appétit à la demi-elfe.
   En revanche, la soif commençait à l’assaillir. Ses yeux s’égarèrent sur un plateau d’argent où étaient disposés des tasses en porcelaine remplies d’une liqueur violette et brillante dont elle ne s’interrogea même pas sur la chimie avant d'en saisir une et d’en ingurgiter le contenu cul-sec. Quoi que ce fut, pensa-t-elle, ça l’aiderait à avaler l’offense qu’elle venait de subir. Elle grimaça au passage du liquide dans sa gorge, mais le feu que le breuvage laissa le long de son œsophage lui fit du bien.

   La demi-elfe quitta la Chambre de Ningal en marchant tête haute et l’humeur fraîche. Alors, inexplicablement, ses pas la conduisirent jusqu’à cette miraculeuse Place du Dragon farceur : le cœur battant de la fête où pleuvaient les couleurs.
Un groupe d’enfants la frôla en courant en direction de la place, vers ce qui devait être un marchand de confiseries. L’un d’eux s’excusa.
« Pardon madame ! »
   Elle lui rendit un sourire tendre.

   Sur la place, une quantité de foule se livrait à la danse. Les saccades des pas et les choeurs de rires résonnèrent agréablement à ses oreilles. Beaucoup ne savaient pas danser, mais ce qu’elle trouva beau, ce fut que la plupart ne se préoccupaient pas d’avoir ce talent.
   Elle s’intégra facilement au groupe où son sourire fit contagion. Il s’agissait d’une sorte bourrée assez simple, une mise en bouche valsée à la hauteur du plus piètre débutant. Elle changea plusieurs fois de partenaires et finit par tomber nez-à-nez avec un humain. Grand et fort ; à vue de nez quatre-vingt pourcents de muscle et le reste d'os. Il avait les yeux clair et la tête surmontée d’une chevelure blonde coiffée dans le plus nordique des styles : Athéas, l’élève de Danalhéa à la caserne. Il se reconnurent immédiatement et échangèrent un grand sourire un peu niais.
« Athéas ! s’exclama la demi-elfe. Je ne pensais pas que ces divertissements étaient votre genre. Je vous imaginais plutôt à la taverne, en train de satisfaire les impératifs de votre estomac de mâle encore en pleine croissance.
   Le jeune homme lui renvoya une expression pleine d’étonnement.
Comme vous parlez, Erilys..! Et moi, je croyais que vous resteriez à la Chambre de Ningal toute la nuit. Vous ne deviez pas participer au Grand Concert ?
Si. C’était décevant. Mais dites moi plutôt, Athéas, vous me semblez infiniment plus adroit que la fois où nous nous sommes rencontrés… Auriez-vous repris les cours de danse ?
   Athéas hocha négativement la tête.
Avec le travail à la caserne, vous croyez que j’ai le temps ? Notre mentor nous fait travailler comme des forçats !
   Erilys arqua les sourcils.
Vingt-deux ans et vous ne savez toujours pas mentir correctement. En auriez-vous honte ?
Je viens d’une bonne famille. Cela fait partie de mon éducation. Ça vous étonne ? protesta-t-il.
Venant de vous, oui. Je vous connais Athéas. Je sais que vous ne faites jamais rien qui ne serve pas dans l’accomplissement de vos objectifs, et il me semble que les acquisitions des gentilshommes n'ont jamais constitué une véritable préoccupation pour vous.
Je ne vois pas ce que vous insinuez.
   La demi-elfe se tut un instant pour l'observer, énigmatique.
Je suis fatiguée de danser. Un verre, ça vous tente ?
   Athéas acquiesça sans dire un mot.
Erilys ne savait pas si c’était la danse qui lui avait fait tourner la tête, mais elle ressentait le besoin de s’asseoir un moment. Ils s’installèrent tous deux à une table, face à face. Athéas l’observa retirer ses gants de satin noir tandis qu’elle commandait de l’eau.
Je devais justement vous voir, petit. Il faut que nous… discutions.
   Elle se ménagea un silence nonchalant, juste le temps de faire infuser la curiosité dans l’esprit du jeune homme.
Que savez-vous des femmes, Athéas ?
Pardon ?
Vous êtes bien un homme à femmes ?

Allons, ne soyez pas timide. Nous sommes entre amis ! Avez-vous déjà été avec une femme, oui ou non ?
   Le jeune homme réfléchit, profondément confus. Comme il était coutume dans les hautes familles comme la sienne, son père lui avait payé l’initiation pratique à la vie nuptiale avec une professionnelle dès qu’il était devenu un homme. Du reste, il avait bien eu quelques aventures floues avec des filles de modestes conditions, mais peu d’entres elles avaient dépassé de beaucoup le baiser volé sous un rameau fleuri.
Oui… Enfin, pas vraiment, mais…
Non. Très bien. Comment va Sildi ?
   Athéas recula sur sa chaise et il fronça les sourcils. Elle s’était penchée vers lui et il avait senti dans son souffle une très légère odeur d’alcool.
Erilys, vous sentez-vous bien ? Vous...
Moi, oui. C’est l’affaire d’une lampée de vin. Vous, par contre, vous avez la tête de quelqu’un de sévèrement atteint, et ce que je viens de voir confirme le diagnostic.
Et qu’est-ce que vous venez de voir ?
Vos pupilles.
Mes quoi ?
Pour l’amour du ciel, Athéas ! Vous l’aimez !
   Le jeune homme inspecta rapidement les alentours, comme s’il cherchait les complices coupables de cette mauvaise farce.
Je parle de Sildi, reprit la demi-elfe en portant la chopine à ses lèvres.
   Athéas explosa.
Vous voulez rire ? Elle me prend pour une brute sans cervelle ! Ce sont ses mots. Et puis je...
Justement. Et d’ailleurs, elle a raison. Je me demande parfois s’il ne faudrait pas vous décerner tout de suite le titre de Gros Benêt. La vérité, c’est que cette jeune femme vous aime et qu’elle est très en colère après vous parce qu’elle pense que vous ne le remarquez pas.
   Athéas se ravança prudemment. Il se pencha vers Erilys et baissa la voix.
Comment ça ? Vous en êtes sûre ?
Soixante-trois ans d’expertise en la matière. Faites confiance au maître : il est temps pour vous de vous jeter à l’eau, affirma-t-elle en plantant ses yeux dans les siens comme deux couteaux, un sourire matois au coin des lèvres.
De me jeter à l’eau ?
La courtiser.
Mais…
Pas de mais.
   Elle se redressa et prit un air de docteur et maître de conférence.
Quoi qu’en disent les poètes, l’amour est pure biologie. La première constante scientifique que vous devez retenir est que c’est la femelle seule qui décide quel sera le géniteur de sa descendance. C’est en tout cas ce que nous rapportent Silja Solënmer et Grimel Dhorn, nos héros de la zoologie. Parmi les différentes étapes qui constituent tout le processus de perpétuation de l’espèce, l’une des premières consiste en ce que nos braves scientifiques appellent depuis la nuit des temps “la parade nuptiale”. Exécutée par le mâle, elle est destinée à convaincre la femelle que celui-ci est un procréateur de choix et que si elle le veut bien, il lui fera une montagne de garnements bien robustes qui iront eux-mêmes repeupler le monde avec au moins autant de vigueur. Chez l’hominidé, on appelle ça courtiser, séduire, galantiser, ou encore mugueter. Les linguistes ont inventé plein de mots pour qualifier le phénomène, et j’ignore encore si c’est par pudeur qu’on invente autant de synonymes ou si c’est parce qu’au fond, on adore s’attarder sur le sujet.
Sauf que l’homme n’est pas un animal, objecta Athéas.
Ma main à couper que vous tenez ça des bouffonneries que vous a fait lire cet antique croûton que vous appeliez monsieur votre précepteur ! Je sais que vous ne lisez pas beaucoup Athéas, surtout depuis que vous avez décidé de vous consacrer à la caserne, mais si vous voulez vous prévenir de la bêtise et rester jeune jusqu’à cent ans, il va falloir garnir votre bibliothèque avec autre chose que des traités sur l’art de manier les lames.
Il baissa la tête, pris de honte. Parfois, il se demandait si la place qu’avait pris sa masse musculaire dans son corps n’avait pas fini par empiéter sur celle réservée au développement de son propre cerveau, et s’il n’était pas condamné à être considéré comme la brute sans cervelle qu’avait décrite Sildi la dernière fois qu’ils s’étaient vus.
Vous l’aurez remarqué, chez les hominidés, la “parade nuptiale” prend un certain temps et les rites exécutés en vue de séduire la belle sont protéiformes. Tout cela trouve son explication dans le fait qu’au niveau de la combustion les hommes et les femmes fonctionnent différemment. Le premier est comme un résineux : il s’enflamme et se consume très vite. La seconde, à l’inverse, est plutôt comme l’orme, ou le hêtre, ça vient lentement, mais une fois bien en feu, sa chaleur est telle qu’il devient difficile de l’éteindre. C’est pour cela qu’il faut vous armer de patience. Une femme ne se prend ni par la force, ni par les fesses : elle se prend par le coeur. Et pour cela, il faut vous en montrer en digne. Alors seulement vous pourrez espérer vous ouvrir un chemin jusqu’à son coeur.
Et comment dois-je m’y prendre ? Je me connais, Erilys... Je vais encore trouver le moyen de tout gâcher. Je le sais. Je suis comme ça.
Décidément, vous avez du sang de navet Athéas ! s’exclama-t-elle. Évidemment, tout ne se passera pas comme prévu, mais inutiles de faire des plans sur la comète. Faites de votre mieux. Ça, elle le verra. Maintenant excusez-moi, je dois y aller.
Déjà ? Mais...
Écoutez, il y a ces beignets qui me lancent des signaux érotiques depuis le fond de la salle et il est grand temps que j’aille leur régler leur compte.

   Erilys se leva et dut s’appuyer à la table. Elle lui fit un clin d’oeil en faisant saillir son petit biceps et, après avoir fini sa chopine d’eau, elle s’éclipsa telle la chic femme qu’elle était en direction de ces aguicheuses de pâtisseries, laissant un Athéas presque tremblant sur son siège.
In vino veritas” supposa-t-il en la regardant s’éloigner, sans savoir s’il devait finalement rire ou être impressionné.
   La demi-elfe était sur le chemin du péché quand elle aperçut Danalhéa et Sildi approcher. Elle ouvrit de grands yeux et chercha l’aumônière où elle avait rangé ses accessoires et son argent. Quand, paniquée, elle voulut retourner à la table où elle supposât avoir laissé ses affaires, elle manqua de percuter Athéas de plein fouet.

Vous avez oublié ça…
Ah ! Que ferais-je sans vous, mon héros !
Elle flatta vigoureusement son épaule, comme on fait à un cheval.
Dana, Sildi ! Je suis si contente de vous voir ! Et regardez-vous, comme vous êtes sublimes !

   Danalhéa releva la tête des petits fours une seconde après Sildi, prise la main dans le sac alors qu’elle était en quête de sucreries. Quelle entrée. L’elfe avait négligemment lâché ses victuailles pour se pendre au cou de son amie, piaillant comme rarement elle ne l’avait vu piailler. C’était peut être la robe. C’était certainement l’alcool.

Riri ! Oh quel plaisir de te voir! Vous êtes si belle. Tu es si belle ! Oh là là, et cette robe… Vous êtes si délicate ! On vous mangerait !
J’espère que vous ne mangerez pas ! Je ne suis pas un gâteau à la crème ! protesta la demi-elfe.
Non ! Vous êtes le plus beau chou que j’ai eu l’occasion de voir !
   En d’autres circonstances Dana aurait questionné les affirmations de son élève, mais elle laissa la remarque passer. L’alcool ne tarderait pas à lui mettre la misère à elle aussi. La jeune femme essuya sa bouche avant de s’avancer vers son amie.
Erilys! Vous ne deviez pas performer sur scène ce soir?
L’ambiance était trop oppressante. J’ai fait ce que j’avais à faire, et je suis partie. Mais je compte revenir à minuit pour le bal masqué.
Parfait ! Nous pourrions y aller ensemble ? Peut être que nous croiserons Nirfäel, qui sait. Je me demande comment il s’est accoutré… Il est si…. Nirfäel.
   Le sourire d’Erilys trembla légèrement sous l’effet de la surprise.
Il est en ville ?
Bien sûr ! Il y a des affiches sur le panneau de la grand place, et partout, d'ailleurs ! J’ai trouvé ça très épique tout de même “Nirfäel, Barde Seigneurial, Théophanie de la Musique, en exclusivité pour les fêtes du Gra’R’No.”. À la mesure de l’homme ! Tu le connais mieux que moi après tout…
Il ne m’a rien dit.
Réjouis toi ! Nous pourrons le retrouver s’il ne croule pas sous des montagnes d’adulateurs. Ted sera surement très heureux de le revoir. N’est ce pas ?
   L’ours leva son blanc museau vers elles.
Oh ça, pour sur ! Je pourrais prendre quelques notes de ses performances…
La tienne était très bien, tu es un bon conteur.
J’aurais pu être meilleur, mais j’avais bien trop bu. Ce n’était pas aussi bien que quand nous avions répété.
   La demi-elfe battit des paupières. Décidément...
Ted ? Ted a chanté ?
Chanter serait un bien grand mot, mais j’ai raconté une histoire. Cela a du bien plaire : les gens s’arrêtaient pour écouter.
Et dire que j’ai perdu mon temps à la Chambre de Ningal, avec leur… hypocrisie.
Les maisons ne sont jamais synonyme d'honnêteté, vous deviez le savoir... Meh, je ne suis pas ici pour te faire la morale. Vous… tu es bien accompagné ce soir, je vois.
   Danalhéa se pencha pour lancer un regard à Athéas, qui n’avait pas bougé d’un cheveu depuis que les trois femmes et l’ours s’étaient rencontrés. Le pauvre avait l’air paniqué, ses joues étaient roses et un sourire niais se cramponnait à son visage comme une patelle à son rocher. Il avait regardé sa professeure quelques secondes avant que, fatalement, ses yeux ne tombent sur Sildi. Défiant toute loi de la physique, il ne s’était pas transformé en flaque, chose que la jeune femme avait trouvé surprenant en voyant l’état dans lequel il était. Dana passa son bras autour de son amie elfe et la fit un peu se bouger pour avancer vers Athéas, qui paniquait de plus en plus à mesure que Sildi s’avançait vers lui. Dana s’en délectait, sadique qu’elle était. L’elfe lui avait confié ses sentiments envers l’humain, au détour d’un énième essayage de robe, alors la professeure allait tout faire pour qu’ils concluent. Elle espérait qu’Erylis avait une information sur l’affaire. Cette dernière donna un coup de coude dans les côtes du concerné et lui souffla, de façon à ce qu’il ne soit entendu que d’elle :
Retenez vos fluides, jeune homme. Si vous continuez à transpirer comme ça, votre raie des fesses va se transformer en gouttière.
   Athéas éclata de rire et Sildi s’arrêta.
Excès de muscat. C’est la pression sanguine. Rien de grave.
Pardon, Sildi. Hum... J’allais te demander si tu voulais bien être ma cavalière.
   La jeune elfe observa un silence, indécise. Athéas commençait se résigner quand elle accepta enfin sa main. Tandis qu’ils s’éloignaient, l’humain jeta un dernier regard derrière lui en direction de ses mentors. Erilys lui fit signe d’essuyer sa bave.
Ils sont vraiment… Eh, disons qu’ils sont complexes. Allons nous asseoir.
   Les deux jeunes femmes s’installèrent à la même table que celle où la demi-elfe et son apprenti séducteur s’étaient entretenus. Erilys regarda Danalhéa et lui sourit.
J’ai quelque chose à te donner.
Quelque chose? Une passion trouvée pour le maniement de ton épée, peut être ?
J’ai peur que non, rit-elle. C’est plus petit. Mais effectivement, ça a été fait avec passion.
   Erilys fouilla dans son aumônière un instant. Elle en sortit deux paquets soigneusement emballés par ses soins et les poussa vers son ami.  
Le second paquet est pour Œilfantôme. Joyeux Gra’R’No, Danalhéa, dit-elle doucement
   Dana fronça les sourcils. Qu’est ce que c’était que ça encore.
...Merci ?
   Elle posa ses mains sur le paquet et défit le petit noeud qui retenait l’emballage, les sourcils toujours froncés dans une expression confuse. Elle n’avait pas de cadeau à offrir à son amie, et elle s’en sentait bien embarrassée. La petite poche de cuir s’ouvrit et l’humaine prit le petit objet dans ses mains, les yeux un peu embués. C’était une barette en bois, délicieusement sculptée et ornementé. Un très bel ouvrage.
M-...Mais Erilys… Comment… Merci ! Beaucoup! Beaucoup !
J’ai pensé que cela te ferait plaisir. Je les ai fait moi-même. Pourras-tu transmettre le sien à Œilfantôme de ma part, s’il te plaît ?
Oui oui oui ! Dès que je la verrais. Oh, Erilys…
   Dana se redressa de sa chaise et vint enlacer son amie, essayant de ne pas faire couler le maquillage qu’une des servantes de Sildi avait passé tant de temps à faire. La demi-elfe accepta son étreinte et la serra affectueusement contre elle en calant son menton sur son épaule.
Mais… Je… n’ai rien pour toi ?
   Danalhéa affichait une mine toute défaite par l’émotion.
Tu ne le sais pas, mais tu m’as déjà beaucoup donné. Merci à toi. Pour être ce que tu es. Qui tu es.
Continues et je vais me moucher dans ta robe.
C’est une menace ? répondit Erilys en délaçant ses bras. Viens, plutôt. Profitons de la fête. »


Dernière édition par Erilys le Jeu 21 Mai 2020 - 23:25, édité 3 fois
Revenir en haut Aller en bas
Syobhan
Syobhan
Capitaine de la Garde d'Abyre
Messages : 271
Date d'inscription : 28/03/2019
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeMer 22 Jan 2020 - 17:44

Par tous les Dieux… mais que… fous-je…
Quand elle ouvrit les yeux, elle se trouvait dans un lit très confortable avec de véritables draps et pas de vilaines peaux animales irritantes et toutes fripées. C’était d’autant plus étonnant qu’elle se trouvait dans une auberge et à sa connaissance, aucune auberge à Abyre, à part celle de la Tête Blanche, ne fournissait de literie d’aussi bonne qualité. Or elle ne serait trouvait pas à la Tête Blanche, établissement d’ailleurs réservé aux plus riches bourgeois de passage dans la cité. L’endroit où elle se trouvait n’avait d’ailleurs rien en commun avec l’autre. Cette auberge ne respirait pas la pédanterie. Néanmoins, la situation n’était pas normale.
Elle n’avait aucune idée d’où elle se trouvait ni de comment elle était arrivée jusqu’ici. Elle ne se souvenait pas non plus de ce qui s’était passé avant, c’était comme si un brouillard l’empêchait de remonter dans ses souvenirs. Le plus étrange était qu’elle avait même du mal à savoir… qui elle était.
Syobhan, Capitaine de la Garde d’Abyre. Oui, mais qu’est-ce que cela signifiait exactement ? Une chose était sûre, elle n’était pas, à la base, censée se trouver là.
Elle prit le temps d’inspecter l’endroit où elle se trouvait avant de se lever. Elle était dans une chambre seule avec de beaux meubles en ébène presque dignes de ceux qu’on pouvait trouver dans le Palais de la Cité si l’on faisait fi des quelques marques qui griffaient le bois ça et là. Ses draps étaient d’un rouge qui n’était pas tant agressif que ça pour les yeux Ces lieux avaient quelque chose de chaleureux et réconfortant. Pourquoi se sentait-elle si à l’aise, alors qu’elle était… perdue ?
Syobhan s’assit lentement sur le lit, se frotta les yeux. Elle était dans son armure. Elle avait dormi dans son armure… Quel était ce drôle de manège ?. Une fois debout, elle sortit de la pièce, puis y ré-entra après s’être rendue compte qu’elle avait oublié sa rapière. Quelques secondes plus tard elle descendait un escalier qui menait à un rez-de-chaussée très animé. La pièce principale était bondée et une odeur d’alcool fort imprégnait l’air. Syobhan se fraya un chemin parmi les clients : des gens de toutes les couleurs et de toutes les formes. Il y avait des elfes et des nains, des riches et des pauvres, des blonds et des bruns, des hommes et des femmes, même des draques, des nains et pire encore, des garnes. Elle fit la moue lorsque l’un d’entre eux osa poser sur sa hanche une main velue pour la prier de le laisser passer mais elle ne fit pas d’histoire et sortit de ce drôle d’établissement pour déboucher sur… la Place du Dragon Farceur.
Diantre. Comment était-elle arrivée ici ? C’était presque comme un rêve sans en être un. Il y avait des tables couverte de mets appétissants absolument partout, Syobhan n’avait jamais vu autant de nourriture réunie en un seul lieu, pas même dans les banquets les plus prestigieux. On trouvait de tout, y compris des denrées d’une rareté presque légendaire. Un véritable artifice de couleurs s’étalait sous ses yeux comme dans le ciel où les dragons virevoltaient et participaient à un ballet aérien au milieu de leurs propres flammes. Éblouie par ce spectacle, Syobhan s’assit sur un banc qui longeait une longue table en vieux bois flotté et observa les reptiles volants se pourchasser joyeusement au-dessus de sa tête.
C’était étrange d’être ici sans être accompagnée. Malgré l’agitation du peuple elle ne put réprimer un terrible sentiment de solitude. Elle se fit la réflexion qu’au bout du compte, elle finissait invariablement par se retrouver seule. Qu’elle l’était de plus en plus.

Mue par une soif surgie des tréfonds de son âme couplée à une profonde mélancolie, Syobhan s’arracha subitement à sa contemplation pour se tourner vers la table où elle était installée et se mit à en sonder le contenu à la recherche de quoi s’abreuver. Il y avait des dizaines de cruches remplies de liqueurs toutes plus fortes les unes que les autres et qui lui montaient à la tête. Elle ne pouvait pas bien voir la couleur de ce qu’elles contenaient, si bien qu’elle décida de se fier à ses sensibles narines d’elfe des mers et choisit un alcool aux vapeurs amères mais très enivrantes. Elle trouva une chope abandonnée entre deux plats de viande - tant pis si quelqu’un l’avait utilisée juste avant - et se servit. Le liquide qui s’en déversa était d’une drôle de couleur ambrée - était-ce un vin de Bröce ? Une fois sa chope remplie, elle la porta à ses lèvres, avant de se stopper net.

Ses yeux se plissèrent. Mais qu’est-ce que je fais, là ? Soudain, elle savait très bien qui elle était, quels étaient ses devoirs et ses occupations, qui étaient ses amis et ses ennemis. Et oui, voilà : elle avait laissé Iranir et les autres sur les quais et était censée retourner à la Chambre de Ningal pour y retrouver le Général Abicus qui l’avait fait mander, et puis en chemin elle s’était sentie vaseuse, alors elle était passée par une petite ruelle oubliée de tous en pensant que c’était peut-être toute cette énergie qui l’avait fatiguée en plus de ses récentes aventures. Puis elle avait eu très froid et s’était mise à trembler, flageoler, jusqu’à-ce que ses jambes ne soient plus capables de supporter son poids. Elle avait fait un malaise et s’était écroulée dans la rue, à mi chemin entre la conscience et l’inconscience.
Comment s’était-elle retrouvée ici ? Quelqu’un avait dû la trouver et la porter jusqu’à l’auberge, elle ne voyait pas d’autre explication. Mais qui ?
Elle n’était pas censée se trouver là et pourtant elle y était. Elle avait le devoir de quitter les lieux et se rendre à la Chambre de Ningal sur le champ. Pourtant, son sentiment de solitude l’avait comme enracinée sur place et une étincelle de rébellion la traversait de part et d’autre de son esprit. Et si elle s’octroyait un moment de répit, que personne d’autre à part elle n’avait envie de lui offrir ? Enfin, il y avait bien Iranir, mais elle avait besoin d’être tranquille, loin de tout ce monde qui lui était trop familier.
Qu’Abiumummat la pardonne, Général Abicus prendrait son mal en patience.
Elle but cul-sec, consciente d’enfreindre la moitié des règles qu’elle imposait à ses propres elfes.

Passée la première sensation de brûlure qui lui embauma l’estomac, elle s’abandonna complètement à la beuverie et descendit deux autres chopes en moins d’une demi-heure tout en regardant impassiblement la foule s’adonner à des activités grotesques qui devenaient de plus en plus amusantes. Les fêtards riaient, discutaient, échangeaient, jouaient, chantaient et dansaient. Et si elle aussi, essayait de s’amuser ?
Elle se leva d’une traite et le monde se mit à basculer sous elle.
“Oup-là” dit-elle avant d’éructer, et la sensation lui brûla jusque dans les narines. Un pas après l’autre elle se dirigea vers un groupe de bonhommes attroupés autour d’une marmite posée sur un feu à même la Place où cuisait une mystérieuse recette délicieusement épicée qui lui mettait l’eau à la bouche. Au passage, elle attrapa une carafe non pas d’eau mais bien de vin qu’elle se mit à siroter en faisant la queue pour goûter à cette étrange soupe soi-disant magique dont le cuisinier et créateur vendait les vertus. Mais au bout de cinq minutes elle perdit patience ; de plus, elle avait remarqué plusieurs personnes porter un collier de fleurs personnalisés et elle était bien tentée d’en avoir un elle aussi. Elle s’adressa à l’une d’entre elle pour lui demander où est-ce qu’elle pouvait s’en procurer.
“Blrp. Hum vous l’avez eu où ?” demanda-t-elle sans même faire un effort pour améliorer sa prononciation tout en montrant du doigt son cou pour désigner le collier à fleur que portait celle à qui elle s’était adressée, une jeune elfe à la chevelure opaline criblée muscaris.
Constatant l’état de Syobhan, l’elfe en question ne se donna même pas la peine de lui parler et pour toute réponse pointa son index en direction d’un petit enfant qui distribuait ces fameux colliers aux passants.
“Merde.”
L’elfe fit les yeux ronds.
“Je voulais dire merci.” Syobhan s’éloigna sans demander son reste, bien décidée à obtenir son cadeau. Elle traversa la place et apostropha le jeune garçon. “Eh petit !” avant de se rapprocher et se pencher à sa hauteur. “Je peux en avoir une ?” elle hocha le menton en direction des fleurs.
Le garçon, un peu gêné qu’une adulte saoule et pas tout à fait en pleine possession de ses esprits soit penchée au-dessus de son épaule, lui rendit son regard d’un air hésitant. Pourquoi les gens ne voulaient pas lui parler ? En tous cas il s’exécuta et lui proposa plusieurs colliers.
“Oh perd pas ton temps, sonne-moi celui que tu veux. Je peux avoir une couronne aussi ?”
L’enfant lui choisit un assortiment de lys - collier et couronne - et les tendit à la Capitaine qui, en retour, lui fila une pièce. Le garçon la considéra bouche bée. Syobhan comprit, un peu tard, que ses services étaient gratuits. Oh. Tant pis. Elle but une nouvelle gorgée de vin.
“C’est parfait petsit gars. Merrrci.”
Elle enfila son collier, ajusta sa couronne et s’en alla, très satisfaite et l’air plus abruti que jamais, buvant le vin de sa cruche en son honneur, et pour celui de Tyre également. Ses pas maladroits la conduisirent jusqu’à une autre table plus grande encore que la précédente. En voulant s'asseoir sur le banc, elle s’emmêla les pinceaux et manqua de s’écraser sur la dinde grillée disposée juste en face, provoquant les clameurs offensées de ses voisins.
“Oh, ça va, c’est rien ! C’est rien” les rabroua-t-elle. La vue la nourriture lui mit instantanément l’eau à la bouche et elle laissa tomber la soupe magique pour démolir les petits friands fourrés à la crème et aux champignons avec une avidité qui dissuadait tout le monde de s’approcher d’elle. Alors un peu plus loin, elle repéra un visage familier. Celui de la belle et séduisante harpiste à qui elle avait sauvé la vie. Trop imbibée pour se lever et aller à sa rencontre, Syobhan s’avachit un peu plus sur la table et se mit à gesticuler tout en l’appelant, la bouche pleine.
“Erilyfe ! Erilyfe ! Erilyfe !”
Une mousseline de bave et de crème dévala la pente de son menton mais elle était si contente de voir Erilys qu’elle n’y prêta guère attention. Une fois que la harpiste eut remarqué sa présence, Syobhan sourit - un petit champignon profita de l’occasion pour s’échapper entre les dents de la Capitaine qui le regarda s’échouer au pied du banc. Elle voulut lui montrer son collier de lys - à Erilys bien sûr, pas au champignon.
“Regarde ! Mj’ai une baronne de pleurs. Une gouronne de fleurs. Hé.”
Sa joie fut si intense qu’elle finit par tourner de l’œil. Son visage se fracassa contre les vestiges de friands et elle perdit connaissance.
Revenir en haut Aller en bas
Nirfäel
Nirfäel
Barde Seigneurial
Messages : 874
Date d'inscription : 20/08/2012
Age : 28
Localisation : En train de composer, que diable !
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeSam 1 Fév 2020 - 19:42



Fusées ! Fanfares ! Concerto poussé à fond ! Fracas de nuit, aile de souper, feu de théière, quoique très cavalier, un soupçon de finition illuminé au ciel de mer scintillant ! Cette place du dragon farceur brillait de milles couleurs et le barde n’en pouvait plus de cette incroyable soirée. Les habitants de la mer ensoleillée savaient y faire avec la fête. Mais de l’avis de Nirfäel, ils s’étaient cette fois surpassés. C’était comme si la délicieuse représentation qu’il avait faite au cabaret n’avait été que le coup d’envoi, un signe purement formel au préalable, loufoque à souhait, qui avait indiqué aux elfes des mers que le Gra’R’No pouvait maintenant commencer. Les feux d’artifice ! Les étables pétant de chatoiement ! Les coupes d’or et l’argenterie saupoudrée de joyau de lune ! Le bruit de la foule ! Les lucioles et fées voltigeant tels des étoiles ! Youp youp ! Les dragons ! Rien n’avait changé depuis le temps. Les elfes des mers avaient toujours le même goût pour les folies, la même soif, la même détermination à chanter, faire le spectacle, semer la zizanie, mettre à nu les tavernes en pleine ruelle, pour délier la postérité de l’espace, en un mot comme en cent, à déranger le calme plat ! Bigre, cela faussait diablement l’idée des elfes paisibles vivant dans les forêts qu’en avait le monde connu. A moins qu’Abyre soit maintenant le monde connu ! Oui c’était bien possible, et à vrai dire, ce n’était pas pour lui déplaire, car ici circulait une grande élégance mêlée à la débauche, où l’opéra des rugissements partageait le récital des rires. Ca, si ce n’était pas le monde connu, foi de barde, cela se ferait très vite connaître !

Mais le preux Nirfäel n’était pas venu que pour observer, diantre ce que cela serait très mélancolique et sérieux ! Non, le demi-elfe était venu pour s’amuser, chanter et émouvoir. Après sa balade des « Dragons-amants ballant séant », il s’était arrêté dans son alcôve pendant des heures avant de revenir avec la symphonie de maquillage et un gigantesque manteau d’arlequin, le zinzolin joliet qu’il affectionnait tant ayant été arraché par des vilains après son spectacle. Cela ne lui allait peut-être pas parfaitement, mais il y avait en revanche un certain cachet à se mouvoir dans un tel vêtement. A présent, il ne pouvait plus passer inaperçu.

Happé par l’euphorie générale, Nirfäel entra dans la place du Dragon farceur, accueilli par les verres et les boissons qu’il laissa glisser dans son gosier, et aussi par le tintamarre de gros instruments à vent dont la texture du son se nouait aux chants. Lesdits chanteurs s’extasiaient, véloces, leur voix lapait l’air, pas farouche, mordait les oreilles de leur lyrisme. Le demi-elfe en fut charmé. En passant, il entendait parfois des « Nirfäel par-çi ! » des « Nirfäel par-là ! », on le demandait partout, on l’alpaguait, les rustres ! Son nom clochait comme un fervent tintement, demandant des chansons ou des ballades. Les visages se décuplaient dans sa mémoire, des gens pour lesquels il avait joué revenait s’amuser à son contact, l’invitaient à les rejoindre. Sa réputation n’était pas tombée dans l’inconscience, elle avait survécu, s’était même accrue comme un légende alimentée par son absence. Le barde répondait aimablement, refusant toutefois. Il n’était pas encore d’humeur au chant. Lui aussi voulait avoir le privilège d’être spectateur. Car en Abyre, il y avait tant à voir et tant à découvrir qu’il aurait fallu se déchirer en quatre pour goûter à tout !

La vérité était aussi qu’au fur et à mesure de cet amoncellement d’invitation, le demi-elfe se perdait dans leur étrangeté. Tant de gens et de souvenirs se joignaient à lui, alors que le barde ne savait où les retrouver dans sa mémoire. Le temps avait passé et Nirfäel savait qu’il n’était plus tout à fait lié à eux ou à leur cité. Leur beauté, éphémère toutefois car demain qui sait de quoi elle serait fait, ne l’attirait plus pour les années à venir. S’installer ici était hors de question et faire partie de la caste de ces elfes des mers attachés à leur pays, avait perdu pour lui toute séduction. En réalité, le demi-elfe se sentait plus nomade que jamais. Il savait maintenant qu’il ne pouvait plus vraiment être un être figé dans une maison ou un cabaret, qu’il ne pouvait plus être des leurs. Il lui fallait vivre des aventures, toucher des lieux mille fois différents pour captiver ses sens et son intérêt. Il songea soudain :

« Hélà, Nirfäel ?! Que t’admonestes-tu comme cafard ? Tu t’aplatis ou ton caractère plat s’aplat, tombe à plat ? On joue dans le marasme sans sarcasme, foi d’asthme, pléonasme asthmatique ?! Pas bon pour le caractère, mon petit Nirfäel. Allez emballe-toi, repars chanter ! Reprise de note, esquive de fleuret terre de fleur, admoneste toi-même les rires, si tant est qu’il est temps ! »


A ce moment-là, un mouvement le fit dévier de sa lente observation. Une elfe, capitaine de la garde au vu de son armure armoriée, faisait du grabuge sous l’arche d’une taverne à ciel ouvert, les flambeaux illuminaient les visages des conviés interloqués et quels prestigieux visage : Carlath de Halitu, Morina et Foïré de Sabal, le baron Dridmer, Yilaia de Cadwenir, Erilys, le Magister Arpagon, Ka…

Erilys ? ERILYS ?

-Oyo eh oh ! Dame Erilys !

L’arlequin Nirfäel, bien curieux personnage s’il en était un, jaillit de l’attroupement, titubant un tantinet oulà quelle gnôle, avant d’arriver devant la demi-elfe, tremblant comme une voile de bateau sous un fort vent.

-Que mes yeux se percent, que ma voix se bri…

Et alors la capitaine elfe surgit en trébuchant dans son champ de vision :

“Erilyfe ! Erilyfe ! Erilyfe ! Regarde ! Mj’ai une baronne de pleurs. Une gouronne de fleurs. Hé.”

-Ah ! Quelle mouche la pique !

L’elfe gesticula avant de glisser sur la table des friands, juste à côté du barde. Ce dernier essaya de la rattraper, mais le poids de l’armure combiné au poids de l’elfe le renversa, le forçant à l’accompagner dans sa chute avec un cri pour toute protestation. On les releva tant bien que mal alors que le barde s’assurait une excuse :

-Pas de quoi paniquer ! Bien sûr, je vais bien, c’était délibéré je l’ai fait exprès.

On déposa la capitaine sur un banc, celle-ci sans aucune protestation se mettant à un sommeil des plus centrés ! Comme si un roc lui était tombé dessus ! Quant à Nirfäel, il lui fut difficile de reprendre sa conversation avec Erilys, il se mit à parler en vrac très rapidement :

-Quelle tête en l’air ! Olala ! Est-ce ton amie ? Je me confonds en excuse, je ne voulais pas évidemment qu’elle chute. Je voulais la rattraper, enfin, l’attraper, enfin, l’aider, quoique quelle chute la moucher ! (Puis le demi-elfe rit de façon sotte et la serra dans ses bras) Erilys, tu es en beauté ce soir. En fait, je me demande si ce n’est pas la nuit qui te jalouse et qui vient tantôt essayer de se faire belle pour toi. (Il fit soudain un détail et sa bouche prit la forme d’un o). Non, ta tasse s’est cassée… mazette, catastrophe ! Mais où est TeRcáïl quand on a besoin de lui.

Il appela pour qu’on les serve et très vite, deux coupes naquirent dans leur main. A cet instant, le sol trembla et le demi-elfe se retourna avec stupéfaction. Il était difficile de ne pas faire attention à un être comme Edwinktus. Mais l’ombre de l’ours blanc lui fit quand même rater un battement de cœur. Juste un :

-Ted ! (Puis il vit Danalhéa et ses comparses) eh bien quelle compagnie… Si les souvenirs s’invitent à la fête, hé, on ne pourra bientôt plus en ajouter d’autres.

Il parlait avec ironie mais de les voir tous ici le ravissait sincèrement au plus haut point. Quand il repensait à leurs aventures à Gullvirki, son esprit s’excitait comme si un pinceau en dessinait lentement l’histoire. C’était de cela dont il avait besoin, avait toujours eu en lui :

-Nous devrions fêter nos retrouvailles ! Ah, diable j’espère que vous avez vos invitations pour le bal ! Quoique, je crois avoir le souvenir que très peu des trente troupes armées gardant les issues sont encore en état de garder ne serait-ce qu’un verre ! Qu’importe, il ne risque rien d’arriver. Alors mes amis, que chantons-nous ? Quand dansons-nous ? Allez, avec moi !

Il avisa un luth qui trônait sur un siège vide et s’en saisit sans crier gare, l’air guilleret. Avec un grand sourire, il se mit à jouer de petites musiquettes en tournant autour de la troupe. Des feux d’artifice tracèrent alors la silhouette d’un gigantesque serpent de lumière dans le ciel. Des dragons le survolèrent et crachèrent leurs propres flammes. Ô grande joie, cela allait commencer ! Car le serpent indiquait le chemin de la Chambre de Ningal, un édifice aux colonnes de blanc serties d’or et au mur qui avait la teinte de l’ivoire, un amphithéâtre dédié à la danse et à la fête. Enfin. Le temps du bal masqué était venu !

Revenir en haut Aller en bas
Ted
Ted
Réfugié(e)
Messages : 869
Date d'inscription : 02/09/2011
Age : 24
Localisation : ¯\_(ツ)_/¯
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitimeSam 8 Fév 2020 - 20:06


« Danalhéa ! Regardez ! Quel bonheur ! Une douceur ! Oh et cette couleur ! Ces reflets bronze sont exquis ! Vous me ravissez Olvid ! Vous me ravissez ! Dana ! Dana levez vos yeux de ce maudit bouquin et regardez ! Vous êtes insupportable !
- Vous êtes insupportable Sildi, les 4 premières robes vous allaient très bien. Il a fallu que vous en essayez dix de plus, ma patience a des limites. La jeune femme releva tout de même la tête et posa son livre sur le guéridon qui se trouvait à côté d’elle. Celle là vous va très bien, votre peau n’en est que plus belle. Que pensez vous faire avec vos cheveux ? »

Et Sildi prit bien trop de temps à détailler ce qu’elle avait en tête pour ornementer ses longs cheveux bouclés, sans oublier de décrire les accessoires qu’elle pensait acheter pour complimenter sa peau café au lait. Dana regrettait désormais d’avoir laissé l’elfe faire ses essayages en première, toute sa patience avait déguerpit à partir de la 3ème robe, la laissant seule face à l’indécision d’une victime de la mode. Seul le regard passionné de Ted l’avait convaincu d’assister au reste des essayages.

« Bien, maintenant, il est temps de vous déshabiller, ma chère, et de laisser votre amie faire son choix. »
En espérant qu’il sera moins long que celui de l’elfe. Cependant, Dana se savait très fine bouche quant au choix de sa tenue, elle plaignait le pauvre couturier. La jeune femme se levait, habillée de son habituel pantalon et chemise blanche, même si son épée était restée à l’entrée. Elle se présenta à Olvid qui pinçait ses lèvres. Il y avait du pain sur la planche, pour sur.

« A… La suite de ce que vous m’aviez demandé, ehm… J’ai pu faire quelques… choix, mais croyez-moi, le noir et le gris n’ont aucune place au Gra’R’No. Votre rejet du corset me posa également bien des problèmes, car vous en portez un a l’instant et il vous donne une silhouette magnifique, je ne comprends absolument pas pourquoi vous y êtes si formellement opposé. Cependant, je pense y avoir trouvé une alternative pour marquer votre taille. Je me suis ensuite permis de faire quelques fantaisies au niveau de la couleur, en pensant qu’une femme si pale de peau… Enfin, vous seriez parfaite en rouge, voyez-vous ?
- Hmm. Pas de rouge.
- Mais vous…
- Pas de rouge. C’est trop criard.
- Très… très bien. Peut-être un bleu ? Il complimentera vos yeux et…
- Non plus. Une robe bleue de complimente pas les yeux bleus, il les ternit. Vous le savez aussi bien que moi. »
L’expression sur le visage du couturier voulait dire « Vous m’emmerdez » mais le sourire qu’il eut dissipa rapidement l’étincelle d’insolence qui lui avait traversé la figure.
« Bien, bien, bien. Laissez moi vous proposer quelque chose. Mademoiselle, s’il vous plait ? La Rosière s’il vous plait. »

S’il pensait la faire passer dans une robe rose pour qu’elle ressemble à une de ces pâtisseries renommées que le Grand Salon de la rue marchande proposait, il se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’au cul. Dana soupirait et accepta tout de même d’essayer la robe, avec presque un frisson de dégoût quant à l’allure qu’elle avait à l’intérieur. Des fleurs naturelles garnissaient magiquement le bas de la robe et elle se sentait étouffée par la tulle rose dragée et incarnadin qui flottaient autour d’elle. Elle se regardait dans le grand miroir face à elle et ne sut pas quoi penser. C’était vrai que la couleur lui allait très bien, et faisait juste assez ressortir le rose de ses joues, de ses épaules et de ses mains, mais toute cette tulle la rendait claustrophobe. Et puis, c’était bien trop… Féminin et… Désirable. Elle avait l’impression de retourner a sa cour de Krakenoor, quand son père voulait encore la marier. Elle ébroua physiquement ce sentiment.

« Trop de tulle. C’est… Trop de tout. Je n’aime pas ça. »
Le couturier hochait la tête, Ted était à ses côtés et plissait ses petits yeux noirs
« Tu ressembles a une poupée.
- C’est pas le but, Ted.
- Mais c’est joli.
- Mais c’est non, jamais. »

L’ours grognait et se couchait à côté du miroir, alors que la jeune femme enlevait la robe afin d’en essayer une autre… puis une autre… Et encore une autre. Sildi était enthousiaste à chaque essai, car il était vrai que la forme des robes accompagnait parfaitement le corps de Dana, pour ça, le couturier avait eu l’œil pendant les mesures des semaines précédentes. Elles n’étaient d’ailleurs pas à leurs premiers essais, et Dana perdait patience. C’était peut-être un signe qu’elle ne devait pas y aller, que quelque chose allait arriver. On lui enfila une robe crème, qui lui rappelait sa robe de marié… Les larmes lui montaient aux yeux et les assistants n’avaient même pas le temps de finir de zipper la robe qu’elle s’en débarrassait déjà, tel un vulgaire bout de chiffon. Elle avait un mauvais présentiment. Olvid lui fit essayer une robe qu’elle ne regardait même pas, perdue dans ses pensées, ses yeux fixant le plancher de merisier. Dana eut un mouvement de surprise en relevant ses yeux.
Oh. Bah ça alors… C’était joli. Très joli, même. Elle se voyait bien la porter toute une nuit.
La robe était parme et violet d’évêque, avec des cristaux dorés dans le tissu. Les manches, transparentes, étaient longues et à leur bout était cousu des feuilles de vigne dorées, motif qui se répétait sur son torse, aux endroits ou la bienséance obligeait de cacher un morceau de peau trop intime. Le col était en V plongeant jusqu’en bas de son sternum, la ceinture, elle aussi dorée, marquait sa taille sans lui comprimer le ventre, elle pourrait donc quand même bien manger et boire. Le tissu flottait sur ses jambes, trainant à peine par terre. Une grande fente dans la toile permettait qu’on aperçoive sa cuisse. L’étoffe était vraiment magnifique, scintillant à chaque mouvement qu’elle faisait. Dana se sentait belle. Elle se sentait féminine mais forte, car la construction de la robe laissait toutes ses cicatrices se révéler. Elle tourna sur elle-même, les dorures éclairant la pièce.

« Elle me plait.
- Ça se voit. Bien, maintenant, nous allons devoir aller chez le forgeron pour l’armure de Sieur Ted, n’est-ce pas ?
- Oui, oui… »
Dana s’enchantait elle-même. Si avec ça elle ne faisait pas tourner les têtes… Non pas que c’était un objectif qu’elle avait particulièrement en tête, mais son égo était toujours conforté quand quelques yeux traînaient sur elle. Au fond d’elle, Dana aimait être flattée, même si elle n’avouerait certainement jamais cela.

Les semaines passèrent bien vite avant le Gra’R’No. Ted avait eu son costume, disons plutôt sa cote de maille, juste à temps. C’était un alliage de métaux rares, légers mais très résistants, d’une élégance toute particulière. Bien sûr, il c’était assorti à son amie. Le forgeron avait fait un travail d’orfèvre quant à la coloration : l’oxydation du métal doré d’origine avait été maîtrisée et stabilisée pour avoir juste la bonne teinte, oscillant entre le violet et l’or. Ted était resplendissant, Dana était ravie, et tout allait bien.  Mais elle continuait à s’imaginer que quand les évènements se passaient trop bien, quelque chose allait déraper. Elle n’en fit part a personne, surtout pas à ses élèves qui allaient l’accompagner. Il ne servait a rien d’instaurer un climat anxiogène.
Son amie Oeilfantôme était passée rapidement lui dire bonjour à la caserne quelques jours plus tôt, mais elles n’avaient pas eu l’occasion de pouvoir trop discuter, l’humaine étant pressée par le temps ce jour-là. Elle n’avait pas vu Erylis non plus, et cela la peinait un peu, car elles avaient vaguement parlé de la grande fête, sans jamais prendre le temps de se voir avant l’occasion.

Le jour était venu. Dana avait été obligée par la famille de Sildi de loger chez eux pour la nuit. D’après la maîtresse de maison, c’était pour pouvoir passer la journée en leur compagnie ainsi que pouvoir se faire « chouchouter ». La jeune femme n’était pas contre un grand bain et des soins pour ses cheveux, qui apprécieraient de se retrouver dans une position autre que « chignon fait rapidement mais efficace pour ne pas avoir tout ses cheveux dans le visage ». Elle eut donc ses longs cheveux blancs relâchés toute la journée. Ils lui arrivaient désormais en bas du dos, c’était presque agréable, comme une petite révolution. Mais même si la mère de l’elfe avait évoqué cette raison, le père n’avait pas la même idée en tête. Ils avaient passé des heures, à la suite du dîner, à parler des progrès de sa fille, ainsi que des dernières affaires de la cité. Elle aurait préféré s’allonger dans son lit et dormir. Heureusement que Ted était à ses côtés. L’ours adorait ce genre de conversations, prenant aisément la parole pour discuter de telle ou telle histoire quand Danalhéa n’avait pas d’opinion sur le sujet, le trouvant futile ou inintéressant.  

Les préparations de la journée suivante furent intenses, en partie grâce, ou à cause, Dana ne savait pas vraiment dire, de la mère de Sildi, Quiynore, qui les avait levées à l’aube. Bains, manucure, massage, pause pour manger, mais pas de trop, au risque de ne plus passer dans sa robe, puis séance de méditation, soin du visage, maquillage, cheveux et finalement, essayage et derniers ajustements de la robe. Il était presque l’heure de partir quand Dana était prête, déjà fatiguée de sa journée.
Ses cheveux étaient tressés d’une manière complexe, de grands hibiscus violets, des roses jaunes, du jasmin et des violettes à parfum ornaient les tresses, insérées dans de grands anneaux d’or, quelques mèches s’échappaient pour encadrer son visage de poupée. Seule la grande cicatrice qui ornait son visage rappelait qu’elle était loin d’être une Dame. Chacun de ses mouvements était suivi d’un parfum de rose et de jasmin, puissant, mais presque alléchant. La servante qui s’était occupée d’elle lui avait confié les quelques mots à prononcer pour faire apparaître son masque, le temps venu. Par précaution, Dana avait glissé une dague dans sa jarretière de cuir et de velours glissée sur sa cuisse, et évidement assortie à sa robe. Le temps que Sildi et elle n’arrivent au cœur des festivités, assises toutes deux sur le dos du grand ours et fendant les foules sans problème, les fleurs ne faisaient que resplendir de plus belle. Elles étaient pour sur empreintes de magie, ce qui n’étonnait pas Dana, les elfes étaient particulièrement doués pour ce genre de choses.
La jeune femme descendit de son fidèle compagnon et aida Sildi à descendre également, la tenant par la main. Ce que Dana ne savait pas, c’était que l’elfe était particulièrement avide de danse, et l’humaine se fit emporter par une joyeuse Sildi en plein milieu de la foule, valsant et attrapant des verres d’alcool à tout va. Ted restait à leur côté, trottant en guise de danse.
Il avait l’air heureux, les enfants d’amusaient à courir entre ses pattes. L’un des plus téméraire lui demanda même s’il pouvait monter sur son dos. L’ours accepta de bon cœur, l’aidant à grimper et continuant de danser, comme il pouvait. Le petit garçon était rouge de bonheur et les rire des enfants, de tout le monde emplissaient l’air. La musique envahissait les oreilles de tout le monde, remplissant les cœurs d’une douce allégresse. Dana finit par trouver une table libre ou elle s’assit, le cœur battant et un grand sourire aux lèvres. Ses yeux se fermaient pendant de longues secondes, s’imprégnant de l’aura ô combien positive de ce lieu. Il respirait la vie, attisait une joie dans le cœur de l’humaine qu’elle avait cru ne jamais pouvoir ressentir de nouveau. Edwintkus la retrouva et s’assit à côté d’elle, alors qu’un grand seau de cervoise était déposé sur la table, ainsi que des choppes. Dana plongea quatre d’entre d’elle dans le seau avant de poser ce dernier à la hauteur de l’ours pour qu’il puisse lui aussi s’hydrater. Il ne s’arrêta de boire que quand le seau était vide, puis éructa vigoureusement.

« Ted !
- Eh, faut q’ça sorte ! »
C’était ainsi que l’ours posa ses pattes avant sur le banc ou était assise la jeune femme puis se racla la gorge.

« Camarades, compagnons et connaissances !
Vous, qui, dans la foule valsez avec tant d’aisance,
En ce soir bien joyeux, laissez-moi vous clamer
Un radieux morceau de mon épopée.

L’horreur ne fait pas partie de ce pèlerinage
Mais l'honneur, lui, subit de multiples lynchages.
Dans les terres du Nord, sur l’ancien contient
Au cœur de la Vallée de Saddaa se trouvait mon clan

Ces nobles ours blancs, robustes et vigoureux,
Étaient des plus grands sages et des plus courageux
Mais un jour vinrent des hommes, qui brisèrent leurs vies
Promirent à leurs enfants un futur sans merci.

Ces barbares cruels, ces hommes odieux
S’emparèrent de leurs fils et tuèrent leurs aïeux
Capturèrent leurs filles, sans pitié aucune
Leurs cris d’épouvante déchirant la nuit brune.

Mon père, le fier Arkus, ne me retrouva jamais
Comme mes frères et sœurs, j’avais été enlevé.
Loin, je fus emmené, jusqu’à la ville d’Hypat,
Exposé en trophée, les chaînes saignant mes pattes.

Bousculé, mutilé, abusé et battu
Résigné à vivre l’enfer qu’était devenu ma vie
Ce n’était pas sans compter sur mon amie
La jeune Lionne qui me secouru.

Elle-même secouée par une terrible tragédie
Elle m’affranchit de cet enfer
Pansa mes plaies, m’offrit une vie
Et dans cette nouvelle ère,
Je l’encense, pour toujours obligé à cette furie,
Gant de velours porté par une main de fer.
»

Danalhéa avait écouté, comme les fois précédentes, avec une oreille attentive. Cette fois cependant, une petite larme lui montait aux yeux, et sa gorge s’était serrée. L’émotion de voir des gens écouter son fidèle compagnon conter son histoire y jouait pour beaucoup. Finalement, il y avait un petit attroupement autour de leur table ; le dernier vers prononcé, il y eut un silence, et de nombreux applaudissements. La jeune femme devait avoir applaudit plus fort que tout le monde, avant de se jeter au cou de son ours. S’en suit quelques choppes, beaucoup de danse, des éclats de rire, des sourires enjôleurs. Sildi retrouva l’humaine au détour d’une ronde, et elle se fit tirer jusqu’aux tables pleines de nourritures, Ted suivant joyeusement, son trot changeant au rythme de la musique. Il faisait plaisir à voir.
Elle se laissa aller à la faiblesse en voyant la nourriture étalée sur une table : des gâteaux tous plus alléchants les uns que les autres, des bonbons de milles couleurs, des viandes de toutes sortes, des poissons au fumet épicé, … Dana aurait dévoré la tablée entière si son estomac et sa raison lui permettait. Elle jeta son dévolu sur plusieurs choux salé, fourrés de poulet et de béchamel aux épices qui ravirent ses papilles ainsi que son ventre qui criait famine. Elle goûta également une part de gâteau chocolaté, avec une ganache au beurre d’arachide en son cœur, puis une autre part, au fruits cette fois, avant de finalement croquer dans une fleur de violette cristallisée dans du sucre. Ce fut les mains collantes de ce caramel qu’Erylis les surprit. Sildi se jeta presque sur la demi-elfe, si vite que Dana cru qu’elles allaient chuter toute les deux.

Dana, après ses retrouvailles avec Erylis, ne put ensuite pas se refuser à danser avec son amie, sa nouvelle barrette glissée entre deux tresses de ses cheveux, remontant leur lourde masse et dégageant un peu plus son cou qui rougissait de tous ces efforts. La broche qu’elle portait toujours était désormais accrochée à sa ceinture. La demi-elfe l’abandonna une seconde pour aller leur chercher des rafraîchissements, Ted à ses côtés. Ne la voyant pas revenir, la jeune femme s’excusa auprès de son cavalier et se dirigea promptement dans la direction ou elle était partie. Elle eut juste l’occasion de voir la capitaine de la garde d’Abyre s’étaler par terre, un pauvre Nirfaël la suivant après avoir essayé de la rattraper, dans un raté d’élan chevaleresque. La jeune femme n’avait pas pu retenir un éclat de rire, alors que Ted accourait vers la source de la cohue, un seau de vin entre les dents. Il le posait sur la table la plus proche en voyant le barde, poussant sa tête sous son bras dans un signe d’affection. C’est qu’il l’aimait beaucoup, son barde. Sildi et Athéas arrivaient aussi, à la suite de Ted. Le grand jeune homme était rouge pivoine alors que l’elfe souriait à s’en décrocher la mâchoire, lançant un regard complice à sa professeure. Dana se doutait bien que quelques baisers et plus si affinité avaient été échangés. Elle lui fit un clin d’œil avant de s’avancer vers Erylis et passer un bras autour d’elle. L’alcool avait rendu l’humaine plus tactile que d’habitude, beaucoup plus souriante aussi.
Alors quand Nirfaël prit son luth, il avait été impossible à la troupe de résister à l’appel de la danse. Des musiciens rejoignirent le demi-elfe et accompagnait sa musique d’airs de flute, de tambourin et de violon. Bientôt, tout ce beau monde suivit la foule vers la chambre de Ningal. Même Sieur Ted n’avait pas oublié la Capitaine de la garde, Syobhan, qu’il avait hissé sur son dos à l’aide d’Erylis et Dana et qui oscillait entre moments de conscience heureux et somnolence. Après tout, si elle était amie avec Erylis, la capitaine était par extension, une amie a lui aussi. L’ours ouvrait le chemin au groupe, trottant en rythme avec l’air que jouait le barde et les autres musiciens. C’était sa façon a lui de danser, et de tenir Syobhan éveillée.
L’arrivée au grand amphithéâtre était une joyeuse cohue.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱   ⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱ Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
⊰ Que gronde l’Audi Gra’R’No [2019] ⊱
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 2Aller à la page : 1, 2  Suivant

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
L'Âge de Feu :: Baie d'Astal :: Abyre-
Sauter vers: